Travail dissimulé : (...)

Travail dissimulé : les services de l’État renforcent les contrôles

Sous une forme ou sous une autre, le "travail au noir" est dans le collimateur des autorités. La loi prévoit de lourdes sanctions...

Le rouge et le noir

Illégal, contraire à l’éthique, socialement dangereux... Bien que tout le monde reconnaisse le caractère frauduleux du travail dissimulé, il est toujours très pratiqué en France, les entreprises peu scrupuleuses comme certains travailleurs "au noir" y trouvant leur compte. On estime qu’il représente 2% du PIB. Alors que les comptes sont dans le rouge, l’État accentue la répression en multipliant les contrôles. Le travail dissimulé a été codifié par une loi du 11 mars 1997. Son interdiction est définie à l’article L 8211-1 du Code du travail.

Avertissement, redressement, condamnation...

Le travail dissimulé (emploi de salariés non déclarés), le prêt illicite de main-d’œuvre, le cumul irrégulier d’emplois, l’emploi irrégulier de travailleurs étrangers (sans titre de travail), la fausse déclaration pour obtenir des "revenus de remplacement" sont considérés comme du travail illégal. Des pratiques sanctionnées, selon la gravité, administrativement, ou par les tribunaux qui prononcent des condamnations pénales.

Sous-traitants et... responsables

En cas de sous-traitance, l’entreprise donneur d’ordre doit s’assurer que son sous-traitant respecte bien ses obligations en matière sociale (déclaration d’activité et d’emploi salarié, paiement effectif des cotisations et contributions sociales). Elle doit lui demander de fournir une attestation, obligatoire dès que le contrat dépasse 5 000 € HT. En cas de manquements, le donneur d’ordre peut être sanctionné pour complicité de travail dissimulé et devra régler les cotisations sociales du sous-traitant...

Jurisprudence

La jurisprudence considère que l’employeur qui ne déclare ses salariés à
l’Urssaf qu’à l’issue de leur période d’essai se rend coupable d’un travail
dissimulé (arrêt n°14-80532 de la chambre criminelle de la Cour de Cassation du 20 janv. 2015). Rémunérer des heures supplémentaires en partie sous forme de primes (arrêt n° 14-21772 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 23 mars 2016) est aussi considéré comme du travail dissimulé.

Des peines sévères

Pour les personnes physiques, la loi prévoit jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, voire plus si récidive ou infraction commise envers une personne vulnérable. Les personnes morales peuvent être condamnées jusqu’à 225 000 euros d’amende.
La dissolution ou fermeture de l’établissement peuvent être prononcées.

Quid du travailleur "au noir" ?

Si le travailleur "au noir" n’est pas poursuivi pour travail dissimulé, il risque cependant les foudres de Pôle Emploi et/ou du Conseil départemental (RSA) s’il touche des allocations ou des prestations sociales indues. Le salarié s’expose à la suppression (et remboursement) des aides versées et à des sanctions pénales et financières pour fraude.

Ne plus pédaler dans la semoule...

Dans un arrêt rendu le 28 novembre 2018, la Cour de cassation a estimé que les livreurs à vélo, qui exercent leur activité sous un statut d’indépendant, sont des salariés, et non des auto-entrepreneurs.
Il s’agit là d’une décision qui concerne les milliers de livreurs qui pédalent en France, mais aussi à travers leur statut celui de l’ubérisation qui a déferlé depuis trois ou quatre ans, souvent à l’instigation de groupes américains qui pratiquent à la fois optimisation fiscale et sociale...

Un exemple

Rudy Ricciotti, architecte notamment du Mucem à Marseille, vient d’être condamné par le tribunal correctionnel de Toulon à quatre mois de prison avec sursis et 150 000 euros d’amende pour travail dissimulé lors de travaux réalisés sur sa villa des calanques de Cassis. Outre des libertés prises avec le code de l’urbanisme, il lui était reproché la présence sur le chantier de plusieurs travailleurs étrangers non déclarés et sans carte de séjour. La condamnation ne sera pas inscrite au casier de l’architecte, ce qui l’aurait empêché de concourir aux marchés publics.

Photo de Une (illustration DR)

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