Assises de la transition

Assises de la transition énergétique : Au tour de Sophia Antipolis

Les 3e Assises azuréennes de la transition énergétique (AATE) de la CCI Nice Côte d’Azur viennent d’avoir lieu à Sophia Antipolis, un territoire confronté aux défis de l’habitat et de la mobilité.

A Sophia Antipolis, repenser la stratégie de proximité et les déplacements

Au sein de la Communauté d’agglomération Sophia Antipolis (CASA), « le premier sujet qui ressort toujours est celui de la mobilité  », a commenté d’emblée Jean-Pierre Savarino. Le président de la CCI Nice Côte d’Azur a ouvert la première table ronde de ces 3e AATE, au Campus Sophia Tech, intitulée « Réussir le défi de la transition énergétique des territoires » . « Le secteur des transports est le premier consommateur d’énergie et émetteur de gaz à effet de serre », a-t-il justifié, avant d’indiquer que la CCI était partenaire de la démarche CASA 20240. Il s’agit d’une démarche transversale de planification du territoire à l’horizon 2040 (habitat, économie, mobilités, transition écologique et énergétique, paysage, agriculture, commerces et équipements). La Chambre de commerce et d’industrie peut «  suggérer, analyser, étudier et, éventuellement, tester un certain nombre de sujets concernant la technopole de Sophia Antipolis », a-t-il poursuivi. Jean-Pierre Savarino a également confié qu’une grande étude de mobilité était en cours avec des milliers de données concernant les usagers, des données « qu’il faudra traiter et analyser afin de pouvoir donner des orientations permettant d’optimiser les problématiques de transition énergétique ».

Jean Leonetti et Jean-Pierre Savarino ont notamment livré leurs réflexions sur la mobilité à
Sophia Antipolis. ©S.G

Jean Leonetti, maire d’Antibes et président de la CASA, a ensuite donné quelques chiffres, qui éclairent l’étendue de la problématique de la mobilité au sein de la technopole. « Nous avons maintenant 41 500 salariés sur le territoire. C’est 10 000 de plus qu’il y a 10 ans et 6 000 de plus qu’il y a 5 ans. Ces salariés n’habitent pas tous sur Sophia Antipolis, je dirais même que c’est une infime minorité qui y habite. C’est une stratégie qui a été développée qu’il faut inverser », a affirmé M. Leonetti. « La première des choses, c’est la proximité  ». Ce qui suppose pour lui qu’il «  faut accepter, et ce n’est pas facile politiquement, que l’on construise de l’habitat sur le territoire sophipolitain. Or l’habitat sur le territoire sophipolitain c’est Antibes, un peu Vallauris, énormément Valbonne et un peu Biot et les villages alentour. Dans ce contexte, cela veut dire qu’il faut que l’on s’implique. Antibes est partie prenante dans cette stratégie mais vous avez bien noté que politiquement, et pardon d’en parler aussi clairement, toute la population incite les maires à ne pas construire ».

« Trouver un équilibre »

«  En même temps, les maires ne sont pas très chauds pour construire », a-t-il admis. « Pour la bonne et simple raison que construire de l’habitat cela signifie qu’il faut également construire des écoles, des crèches, des services publics en général. Par conséquent, l’idéal c’est de l’activité économique virtuelle qui rapporte beaucoup d’argent en termes de taxe ». Pour Jean Leonetti, « le deuxième élément de la stratégie énergétique, ce sont les déplacements. Les Sophipolitains viennent de partout, y compris du Var. Cela veut dire que la stratégie de déplacement ne peut pas être que celle de la CASA, il faut que nous travaillions ensemble sur les déplacements au niveau des Alpes-Maritimes et même un peu sur le Var. et c’est la raison pour laquelle le train est un élément important ». Il a également évoqué « de petites avancées » à ne pas négliger : le covoiturage et le vélo. « Le covoiturage, ce n’est peut-être pas grand-chose, c’est peut-être anecdotique, mais en tout cas cela diminue la consommation et l’utilisation des véhicules. L’autre (avancée), c’est le vélo, à condition que l’on arrive à développer suffisamment de vélos électriques ». Un peu plus tard au cours de la table ronde, le président de la CASA a confié qu’il y avait autour de la transition énergétique «  un conflit de valeurs permanent » et qu’il convenait de « trouver un équilibre ». « Cette transition énergétique nous force à regarder un peu plus loin, un peu plus large et je pense que quand on regarde un peu plus loin, un peu plus large, on est plus intelligents  », a-t-il analysé. « Comment on se déplace et comment on bâtit demain ? », a-t-il ensuite interrogé. « Il y a un nouveau deal qui est passionnant. Je pense que la mixité sur Sophia Antipolis c’est que la technopole s’humanise et abrite une partie de la population  ».

« Un territoire très consommateur d’énergie »


Armelle Simonnet-Delettre, référente Transition énergétique et climatique à Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), qui participait à la première table ronde des Assises, a assuré que le département était « un territoire très consommateur d’énergie ». « Nous consommons beaucoup et nous produisons peu  », a-t-elle affirmé. Elle a par ailleurs évoqué le triple rôle de l’Etat dans la transition énergétique : un rôle de coordination, avec notamment le guichet EnR (énergies renouvelables) pour les porteurs de projets, un rôle d’accompagnement et un rôle de financement avec les deux milliards d’euros du Fonds vert en 2023. Elle s’est également référée à la loi du 10 mars 2023, relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, qui « donne la main aux territoires et aux communes, EnR par EnR ». Johan Ransquin, directeur ADEME Sophia-Antipolis, a de son côté précisé que l’Agence de la transition écologique ne faisait pas de gestion de risques et qu’elle était là pour «  porter une logique de trajectoires, c’est-à-dire qu’il faut anticiper : limiter les ruissellements, désartificialiser les surfaces, travailler sur les îlots de chaleur urbains… ». « On ne sait pas tout, on ne connaît pas l’étendue de ce qui va se produire, c’est pour cela que l’on parle de trajectoires au pluriel. On est sur des temps longs, il faut que cela résiste au temps politique, aux alternances ».

©S.G

« Travailler à l’échelle d’un territoire »


Ce sont quelque 200 personnes qui ont participé à cette 3e édition, des élus, des responsables d’entreprises mais également des experts dans le domaine de l’énergie, issus du monde de l’entreprise, associatif ou académique. En ouverture de la journée, Bernard Mouret, conseiller technique CCI Nice Côte d’Azur, a commencé par planter un décor peu réjouissant mais basé sur des faits scientifiques : «  Ce qui se passe sur le plan climatique relève de l’inédit dans l’histoire de l’Homme. Penser que l’adaptation de nos modes de vie, dans le temps, suffira à surmonter le défi est une gageure. La menace est d’ampleur mondiale et porte sur plus de 50 % de la population. Les causes premières de ces phénomènes sont principalement les émissions de gaz à effet de serre et principalement les usages des énergies fossiles ». Il a ensuite rappelé que le but des Assises azuréennes de la transition énergétique, lancées en 2021, était de « travailler, à l’échelle d’un territoire, hier Nice puis Grasse, aujourd’hui la CASA et demain la CARF (Communauté d’agglomération de la Riviera française) ». Cet événement, qui propose des tables rondes, des ateliers et un village des solutions, permet « de partager les projets naissants et existants et de trouver ensemble des réponses pour accélérer la mise en œuvre des projets ». Bernard Mouret a également souligné que le rôle de la CCI était d’identifier des freins et de chercher «  avant tout de l’efficacité, de la rapidité ».
Pour Fabienne Gastaud, vice-présidente de la CCI chargée de l’Industrie, de l’Energie et de l’Environnement et présidente du Club Energie, « ces freins peuvent être financiers, juridiques, un peu moins techniques car nous avons un territoire riche (…) en entreprises de toutes tailles et en formations. Et il faut faire parler les gens : une collectivité avec un donneur d’ordres, une start-up… Il faut que les gens s’écoutent, s’entendent et agissent ensemble ».

La journée a été rythmée par des conférences et ateliers sur les thèmes majeurs de la transition énergétique ©S.G

Prochaine étape : Menton

Passage de témoin entre la CASA et la CARF. ©S.G

Le tour du territoire azuréen se poursuivra l’année prochaine à Menton pour la 4e édition des AATE. « Nous sommes au bout du territoire et heureux de prendre le relais », a déclaré Albert Filippi, vice-président de la CARF et maire de Sainte-Agnès. Il a retenu de cette 3e édition la notion d’équilibre nécessaire, mise en avant par Jean Leonetti, et le rôle de la CCI en tant que gestionnaire de connexions et de simplifications. « Nous avons, nous aussi, à l’est du département, ce travail à faire de recherche d’équilibre. Nous sommes un peu un laboratoire », a-t-il indiqué, relevant l’importance du tourisme sur le territoire de Menton et l’ouverture aux communes italiennes voisines. « Nous sommes largement confrontés à la gestion d’économie de l’eau. Des réflexions doivent être ouvertes à ce sujet. Il faut également avoir des synergies entre les sources d’énergie. Nous aurons tous ces points à aborder l’année prochaine ».

Photo de Une : Le village des solutions des 3e Assises azuréennes de la transition énergétique était installé cette année au Campus Sophia Tech. Jean Leonetti président de la CASA et maire d’Antibes a tout naturellement présidé les débats en compagnie de Jean-Pierre Savarino président de la CCI Nice Côte d’Azur ©S.G

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