Clause de non concurrence

Clause de non concurrence : du nouveau sur la délimitation du périmètre d’application

Par un arrêt du 8 avril 2021 (n° 19-22.097 F-D, Y. c/ Sté Hendrix genetics recherche technologie et services), la Cour de cassation exclut la validité d’une clause de non concurrence qui prévoit expressément une délimitation dans l’espace au "monde entier".
Pour comprendre cette décision, retour sur la complexe, et souvent contestée, clause de non concurrence.



Par Maître Eva NABET et Maître Marion WACKENHEIM
Avocates associées Cabinet NW Avocats
Droit social et droit des affaires

Définition

La clause de non concurrence est la clause par laquelle le salarié s’interdit pendant une période déterminée de travailler sur des activités concurrentielles dans une zone géographique et sur une période limitée dans le temps.
Elle est donc régulièrement appréciée par les employeurs qui la considère comme une véritable garantie, notamment contre les risques de débauchage ou de détournement de clientèle.

Cinq conditions cumulatives

Pas facile de concilier une interdiction (délimitée) de travailler avec le principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle.
C’est pour cela que la clause de non concurrence ne doit pas conduire à ce que le salarié se trouve dans l’impossibilité absolue d’exercer une activité professionnelle conforme à ses aptitudes et à ses connaissances générales ainsi qu’à sa formation professionnelle.
Aussi, et pour rendre compatible interdiction de travailler et libre exercice d’une activité professionnelle, cinq conditions cumulatives doivent être respectées par la clause de non concurrence  :
Elle doit :
- Être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise. L’entreprise doit donc subir un préjudice réel si le salarié venait à exercer une activité professionnelle concurrente.
- Tenir compte de la nature de l’activité de l’entreprise et des spécificités de l’emploi occupé par le salarié.
La clause doit donc définir précisément les actes de concurrence que le salarié sera interdit d’exercer, après la rupture de son contrat de travail.
- Être limitée dans le temps et dans l’espace.
Limitation dans le temps, c’est-à-dire ?
Sauf si les dispositions conventionnelles en prévoient une, aucune limite de durée n’est fixée par la loi. Ainsi, cette durée va varier en fonction principalement de la qualification, du poste et des responsabilités occupés par le salarié.
La pratique veut que la clause de non concurrence soit limitée à une durée allant de 12 à 24 mois.
Limitation dans l’espace, mais encore ?
Une fois encore, sauf si les dispositions conventionnelles la fixe expressément, l’employeur peut librement (ou presque) définir le secteur géographique où le salarié sera interdit de le concurrencer.
Le champ géographique visé par la clause de non concurrence peut être étendu, dès lors que l’ancien salarié peut exercer une activité conforme à sa formation, à ses connaissances et à son expérience professionnelle (Cass. soc. 20-1-1999 n° 96-45.669).
Par exemple, une interdiction de concurrence s’étendant à l’ensemble du territoire français n’est en général pas considérée comme nulle.
Toutefois, la pratique veut que le secteur géographique soit délimité à un ou plusieurs départements.
- Comporter pour l’employeur l’obligation de verser au salarié une contrepartie financière.
Une clause de non concurrence n’est licite que si elle comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière.
À défaut, la clause contractuelle doit être considérée comme nulle.

Quel montant prévoir ?

Cette contrepartie financière :
- Doit être ni excessive ni dérisoire,
- Peut être fixée soit sans référence à la rémunération versée au salarié au cours de la relation de travail, soit par rapport à un pourcentage de salaire,
- Être versée soit à la fin de chaque mois, au cours de toute la durée d’application de la clause de non concurrence, soit par un versement unique lors de la cessation du contrat de travail,
- Doit obligatoirement être versée après la rupture du contrat de travail. Un paiement de l’indemnité avant la rupture peut entraîner la nullité de la clause de non concurrence.
Attention précision
Dans l’éventualité où cette clause serait intégrée à un contrat de travail existant, cela constituerait une modification du contrat de travail et nécessiterait donc l’accord préalable du salarié se matérialisant par la préparation d’un avenant et le recueil de la signature des deux parties.

Et si l’une des conditions fait défaut ?

La clause qui ne remplit pas les conditions susvisées peut être frappée de nullité étant précisé que cette annulation peut ouvrir droit, pour le salarié, à la réparation du préjudice subi apprécié et évalué souverainement par les juges du fond (Cass. soc. 25-5-2016 n° 14-20.578).
La vigilance est donc de mise lors de la rédaction d’une clause de non concurrence !

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