Fiscalité et américains

Fiscalité et américains accidentels

Par Maître Julien ALQUIER, Avocat en droit fiscal au Barreau de Nice, Chargé d’enseignement à l’Université Nice-Sophia Antipolis, Doctorant au sein du laboratoire CERDP (E.A n°120)

La nationalité américaine peut s’acquérir notamment par jus soli, autrement dit par le droit du sol, c’est-à-dire compte tenu de la naissance d’une personne physique sur le territoire des États-Unis. Cela signifie que toutes ces personnes qui naissent aux États-Unis, qu’elles possèdent ou non une autre nationalité, bénéficient dès la naissance de la nationalité américaine. Très souvent, ces personnes ont quitté les États-Unis tout juste après leur naissance et n’y ont jamais travaillé ni résidé. Mais tout cela serait sans grande incidence si les États-Unis d’Amérique n’étaient pas l’un des rares pays au monde à appliquer l’extraterritorialité en matière de fiscalité personnelle. En d’autres termes, les États-Unis imposent les contribuables non pas en fonction de leur lieu de résidence, mais au regard de leur citoyenneté. Ces personnes appelées "américains accidentels" détiennent la nationalité américaine sans en avoir jamais tiré profit, ni même parfois eu conscience d’être américain, et elle se sentent appartenir exclusivement à leur seconde nation. Mais cela suffit-il pour justifier de son absence de déclaration aux États-Unis ? La réponse est malheureusement négative.

La loi FATCA comme déclencheur des procédures

Le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) est une réglementation américaine qui vise à lutter contre l’évasion fiscale des contribuables américains et dont les dispositions sont entrées progressivement en vigueur depuis le 1er juillet 2014. Ce règlement du code fiscal des États-Unis oblige les établissements bancaires des pays ayant accepté un accord avec le gouvernement américain à signer avec le Département du Trésor des États-Unis un accord dans lequel ils s’engagent à lui communiquer tous les comptes détenus par des citoyens américains. Eu égard au système fiscal américain, la notion de contribuable couvre donc les résidents aux États-Unis, les titulaires d’une carte de résident permanent aux États-Unis, leurs conjoints et enfants, toute personne qui a des biens substantiels aux États-Unis, et, indépendamment de sa résidence, les citoyens américains résidant à l’étranger. C’est dans cette dernière catégorie que les américains accidentels ont été classés quand les institutions financières françaises ont entrepris de mettre en œuvre la législation FATCA. Ces institutions ont donc envoyé des courriers à leurs clients américains, dont faisait partie les américains accidentels, leur annonçant qu’ils allaient communiquer leur identité à l’administration fiscale américaine ou Internal Revenue Service (IRS). Les américains accidentels se retrouvent donc engagés dans un processus avec l’administration fiscale américaine sans jamais avoir été informés de leurs droits, ni de leurs devoirs fiscaux en tant que citoyens américains.

Le principe d’élimination des doubles impositions

Que les américains accidentels se rassurent, la convention franco-américaine prévoit la méthode de l’imputation d’un crédit d’impôt afin d’effacer les doubles impositions en matière de revenus et de fortune. Du côté français, cela signifie que la France réimpose les revenus de source américaine attribués à une personne physique résidente de France, que l’imposition américaine de ces revenus soit exclusive ou non. Le crédit d’impôt imputable sur l’impôt français, correspondant au revenu de source américaine, est égal à l’impôt américain payé à ce titre en fonction du type de revenu (dividendes, des intérêts, des plus-values uniquement immobilières, des jetons de présence et des rémunérations des artistes et des sportifs) ou à l’impôt français relatif à ce revenu, pour tous les autres revenus de source américaine, ce qui efface dans la plupart des cas entièrement l’imposition.

Cependant, la convention franco-américaine ne permettait pas jusqu’à récemment de régler tous les problèmes de double imposition. En effet, l’administration fiscale américaine retenait une définition restreinte de la notion d’impôt considérant que la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) n’entraient pas dans le champ de cette convention fiscale. Cela avait donc pour conséquence de soumettre les contribuables franco-américains à une double imposition en ce qui concerne les revenus des placements et les plus-values du patrimoine car l’IRS refusait d’octroyer un crédit d’impôt pour la CSG et la CRDS. Cette problématique, ayant ouvert un contentieux depuis plus de dix ans, semble avoir été résolue le mois dernier par un tribunal fiscal à Washington, qui a estimé que les contribuables soumis à la CSG et à la CRDS étaient en droit de réclamer des crédits d’impôts. Mais cet épilogue ne résout pas pour autant la situation des américains accidentels.

Une régularisation spontanée toujours plus intéressante

Au même titre que les comptes bancaires étrangers non déclarés à l’administration fiscale française, la régularisation volontaire par un contribuable est toujours la meilleure des solutions vis-à-vis de l’IRS. En effet, des procédures spécifiques sont prévues par l’administration fiscale américaine afin de déclarer ses revenus en tant qu’américain accidentel. Cela permet de conserver sa nationalité américaine sans pour autant subir les conséquences néfastes du pays le plus puissant du monde dans tous les états où l’accord FATCA a été signé.

Le conseil de votre Avocat fiscaliste parlant parfaitement la langue de Shakespeare et maîtrisant notamment le vocabulaire fiscal anglo-saxon devrait vous permettre d’envisager des pénalités minorées et de vous mettre en règle avec l’administration fiscale américaine.

deconnecte