L’application complexe des droits de douane
- Par Maître Julien ALQUIER --
- le 5 mars 2019
Si le développement de l’Union européenne (UE) a permis de dissimuler l’existence physique des frontières, il n’en demeure pas moins que les services des douanes sont toujours présents et ne doivent pas être occultés que ce soit pour les particuliers ou même les professionnels.
Des situations peuvent porter à confusion sur l’exigibilité des droits de douane et avec la sortie prévue du Royaume-Uni de l’UE, l’interrogation sur les éventuels paiements dont toute personne pourrait faire l’objet est légitime.
Par Maître Julien Alquier, Avocat en droit fiscal au barreau de Nice, Chargé d’enseignement à l’Université Nice-Sophia Antipolis, Doctorant au sein du laboratoire CERDP (E.A n°120)
Qu’il s’agisse de particuliers ou d’échanges commerciaux, des impositions peuvent s’appliquer comme les droits de douane, l’octroi de mer, les droits additionnels, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), les droits d’accise, etc. Il conviendra de distinguer tout d’abord, les importations et exportations depuis la France vers les pays situés hors de l’UE, ensuite, les échanges intracommunautaires pour enfin s’attarder sur le cas du e-commerce.
Les échanges hors de l’Union européenne
À titre liminaire, il est à noter que tous les envois non commerciaux de particulier à particulier, que ce soit hors et dans l’UE, doivent avoir un caractère occasionnel et porter exclusivement sur des marchandises réservées à l’usage personnel ou familial des destinataires. Ils ne doivent pas non plus faire l’objet de contrepartie financière pour éviter d’entrer dans un cadre commercial. D’une part, le traitement douanier d’une marchandise dépend de trois éléments que sont la dénomination de la marchandise (dite "espèce tarifaire" des marchandises), son origine et sa valeur en douane. Dans le cas où la valeur intrinsèque d’une marchandise, c’est-à-dire sans prendre en compte les frais supplémentaires comme notamment le transport et l’assurance, ne dépasse pas un certain seuil, le particulier pourra bénéficier d’une franchise. Au-dessus du seuil de franchise, toute marchandise importée sur le territoire français doit supporter les taxes exigibles sauf les cas particuliers profitant d’une exonération.
D’autre part, dans le cadre d’échanges commerciaux, le calcul des droits de douane se fait en fonction de la valeur et de la nature des marchandises, autrement dit son espèce tarifaire. Il s’agit de codification des marchandises au niveau de l’UE, servant de référence pour déterminer le taux des droits de douane applicable à chaque marchandise. Le montant de la TVA sera calculé en fonction de la valeur de la marchandise au moment de son entrée sur le territoire douanier. Une déclaration sommaire d’entrée comprenant des données sûreté et sécurité doit être envoyée au premier point d’entrée dans l’UE ainsi qu’une déclaration en douane pour que les marchandises soient éventuellement soumises aux droits de douane et à la TVA.
Les échanges au sein de l’Union européenne
En cas d’envoi intracommunautaire réservé à un usage personnel et respectant les règles citées précédemment, sauf exception, il n’y a pas de formalité de dédouanement ni de droits de douane et taxes exigibles car en général, ces derniers sont payables directement dans le pays européen où les achats sont effectués comme la TVA et les droits d’accise par exemple. Il existe cependant des exceptions concernant certains produits, telles que les boissons alcoolisées, les tabacs ou encore l’achat de véhicule avec une
réglementation particulière et notamment des seuils fixés au-delà desquels le paiement de droits peut être appliqué.
D’autres exceptions territoriales sont à prévoir, pour les départements d’Outre-mer, les collectivités d’Outre-mer ainsi que des régimes spécifiques comme notamment en Andorre, les îles Anglo-Normandes ou les îles Canaries.
Pour ce qui concerne les opérations commerciales réalisées au sein du territoire de l’UE, le taux des droits de douane et le taux de la TVA varient toujours en fonction de la désignation de la marchandise et de son origine.
De plus, en fonction du statut de l’entreprise cette dernière dispose d’un identifiant fiscal permettant d’acheter hors taxes dans l’UE et de récupérer la TVA lors des importations. C’est la notion douanière d’introduction qui concerne les échanges intracommunautaires de marchandises, autrement dit les achats dans l’UE. Pour ceux-ci, il existe une déclaration d’échange de biens nécessaire au-delà d’un certain seuil dans le cas d’achat de matières premières, de produits ou matériels pour une entreprise dans les États membres de l’UE et lors de vente hors taxes aux entreprises communautaires. Les achats via internet ne sont pas exempts de ces règles.
La situation particulière du e-commerce
Pour mémoire, il est abordé ici les échanges commerciaux à distance entre un particulier consommateur et un professionnel puisque les envois non commerciaux adressés de particulier à particulier font l’objet des règles abordées précédemment.
L’e-commerce ou plus généralement les achats à distance ont connu une croissance exponentielle qui a mené les consommateurs à faire face, lors de la réception de colis, à des formalités douanières inattendues, voire une taxation.
Effectivement, même si de nombreux produits sont disponibles sur internet, certaines marchandises sont interdites ou réglementées à la vente en ligne, telles que les contrefaçons ou le tabac.
Si l’achat provient des États membres de l’UE, la réception en France métropolitaine ne génère normalement pas de droits de douane mais seulement la TVA au taux en vigueur dans le pays du commerçant.
Si l’achat provient de pays situés hors de l’UE, la réception en France métropolitaine de marchandises en provenance d’un pays extérieur à l’UE est soumise à la TVA et aux éventuels droits de douane.
Le plus souvent, il s’agit d’une mauvaise surprise qui interviendra à la réception du colis par le transporteur quand les taxes supplémentaires seront réclamées.