L'impact de l'Ordonnance

L’impact de l’Ordonnance du 25 mars 2020 sur le traitement des salaires

L’ordonnance du 25 mars 2020 permet aux entreprises françaises, non considérées comme un commerce « essentiel » de bénéficier de l’activité partielle pour ses salariés en raison de la crise sanitaire que connait notre pays.
Le gouvernement a adapté et modifié le dispositif d’activité partielle afin qu’un grand nombre de sociétés en profite.


Par Sabria MOSBAH, Avocat au Barreau de Nice, Membre du Conseil de l’Ordre - Référent social *******

L’indemnisation des heures chômées du fait de l’activité partielle au sein de l’établissement, est fonction de la rémunération brute du salarié concerné.

L’obligation de l’employeur est d’assurer au salarié une indemnité égale à 70% de cette rémunération, pour chaque heure chômée.
Une convention collective ou un accord de branche peuvent prévoir des dispositions plus favorables. L’employeur peut également prendre une décision unilatérale allant dans ce sens.

Les éléments à retenir dans l’assiette de calcul de la rémunération brute du salarié


L’assiette de calcul de la rémunération brute est celle de l’indemnité de congés payés telle que fixée à l’article L 3141-24 du code du travail (Article R 5122-18 du code du travail).

On retiendra par exemple les majorations pour heures supplémentaire, les indemnités perçues pendant des périodes assimilées à du travail effectif (congé maternité, congé de paternité et d’accueil de l’enfant ou arrêt de travail pour accident de travail ou maladie professionnelle par exemple).

En sont exclues, les primes d’intéressement, de participation, de fin d’année ou encore le treizième mois.

La méthode de calcul de l’indemnité d’activité partielle

Concrètement il s’agit d’additionner les éléments de rémunération brute compris dans l’assiette de calcul, sur la période de référence (qui est la même période que celle pour l’indemnité des congés payés)

La rémunération brute doit ensuite être ramenée à un montant horaire, en fonction des heures effectuées sur la période de référence, dans la limite de la durée légale du travail, ou lorsqu’elle est inférieure, la durée collective de travail ou la durée figurant au contrat de travail.

Cette opération permet de calculer ensuite l’indemnité brute horaire d’activité partielle à verser au salarié, en appliquant le coefficient de 70%.

Exemple 1

Pour une période de référence de 3 mois, pour un salarié dont l’horaire contractuel est de 151,67H/mois, soit 35H par semaine :

Décembre 2019 : 169h – rémunération brute de 2 526€
Janvier 2020 : 151,67 – rémunération brute de 2 223€
Février 2020 : 160h – rémunération brute de 2 368€

On additionne les trois mois de salaires et on divise par 455,01 (151,67 X 3), car les durées doivent être plafonnées à la durée légale du travail.

Le montant horaire sera calculé comme suit : (2526+2223+2368) / (455,01) = 15,64€

L’indemnité brute d’activité partielle à verser au salarié sera donc de 70% de 15,64€ soit 10,95€/heure.

Exemple 2

Pour une période de référence de 3 mois, pour un salarié dont l’horaire collectif de travail est de 147,22H/mois, soit 34H par semaine :

Décembre 2019 : 150h – rémunération brute de 2 150€
Janvier 2020 : 147,22h – rémunération brute de 2 111€€
Février 2020 : 155h – rémunération brute de 2 220€.

Même règle à appliquer soit (2150+2111+2220) / (441,66) = 14,67€

L’indemnité brute d’activité partielle à verser au salarié sera donc de 70% de 14,67€, soit 10,27€/heure

Exemple 3

Pour une période de référence de 3 mois, pour un salarié dont l’horaire contractuel est de 39H/semaine soit 169H/mois :

Décembre 2019 : 169h – rémunération brute de 2 526€
Janvier 2020 : 169h – rémunération brute de 2 600€
Février 2020 : 170h – rémunération brute de 2700€

Soit : (2526+2600+2700) / (455,01) = 17,20 €.
L’indemnité brute d’activité partielle à verser au salarié sera donc de 70% de 17,20€, soit 12,04€/heure.

Le montant à verser au salarié

Le montant de l’indemnité brute d’activité partielle est fonction du nombre d’heures réellement chômées par chaque salarié, dans la limite de la durée légale du travail, ou lorsqu’elle est inférieure, la durée collective de travail ou la durée figurant au contrat de travail.

Exemple

Un salarié, avec un montant brut horaire d’activité partielle de 12€, dispose d’un contrat de travail de 39H/semaine.

Il est en activité partielle durant 22H la seconde semaine de mars 2020. Il a donc travaillé 17H cette semaine-là.

Pour déterminer le nombre d’heures à indemniser, on doit donc appliquer la méthode tel qu’explicitée supra : (durée légale du travail – nombre d’heures travaillées dans la semaine)

Le nombre d’heures à indemniser sera donc de (35 – 17) = 18 H

Dans ces conditions, l’indemnité d’activité partielle versée au mois de mars 2020 sera de 18 X 12€, soit 216€ bruts.
Les quatre heures supplémentaires prévues au contrat sont bien chômées, mais elles ne donnent lieu ni à allocation par l’Etat et l’UNEDIC, ni à indemnisation par l’entreprise.

Il est à noter que :

Si la durée collective de travail est inférieure à la durée légale, la formule de calcul du nombre d’heures à indemniser est : (durée collective de travail – nombre d’heures travaillées)

Si la durée stipulée au contrat de travail est inférieure à la durée légale, la formule de calcul du nombre d’heures à indemniser est : (durée contractuelle de travail – nombre d’heures travaillées)

Le régime social de l’indemnité

Les indemnités d’activité partielle versées par l’employeur à ses salariés ne sont assujetties ni au versement forfaitaire sur les salaires, ni aux cotisations de sécurité sociale.
Les indemnités sont soumises à CSG et CRDS après un abattement de 1,75%.

Cas Particuliers

- Si le salarié est en arrêt maladie pendant cette période, il n’y a pas de cumul possible entre les allocations d’activité partielle avec les indemnités journalières de sécurité sociale. Il bénéficiera seulement de ces dernières.

- Pour le calcul de l’indemnité de licenciement, si la période de chômage partiel n’a aucune incidence sur l’ancienneté à retenir pour la détermination du droit à l’indemnité de licenciement, la période de suspension du contrat liée à une activité partielle n’entre pas en compte pour calculer l’ancienneté.

- Le salarié en cours de préavis en raison d’un licenciement ou d’une démission, deux cas de figure sont à distinguer :

Si le salarié est dispensé de l’exécution de son préavis, il perçoit alors à ce titre, une indemnité compensatrice de préavis. L’activité partielle n’a alors aucune incidence.

Si le salarié exécute son préavis, il a droit à une indemnité de préavis calculée à partir de sa durée de travail, c’est-à-dire :

— soit la durée légale ou conventionnelle de travail pour les salariés à temps plein ;
— soit la durée fixée au contrat pour les salariés à temps partiel.

L’employeur doit donc verser le salaire habituel sans aucune prise en charge au titre de l’activité partielle.

- Un jour férié qui aurait dû être travaillé (Lundi de Pâques par exemple) sera indemnisé au titre de l’activité partielle comme n’importe quel autre jour compris dans une telle période.

- Concernant les salariés employés par des particuliers employeurs, il a été mis en place par les pouvoirs publics une mesure exceptionnelle d’indemnisation des heures prévues non travaillées par les salariés au cours du mois de mars.

Si les particuliers employeurs ne peuvent pas assumer le coût des heures non effectuées, ils peuvent bénéficier de la mesure exceptionnelle d’indemnisation.

Dans ce cadre, la procédure à suivre est la suivante :

- L’employeur déclare et rémunère dans un premier temps les heures réellement effectuées par son salarié pour le mois de mars
Ensuite, l’employeur déclare les heures prévues mais non effectuées par son salarié au cours du mois de mars.

- Le service communique le montant de l’indemnisation à verser au salarié, soit 80 % du montant net des heures non réalisées. L’employeur verse à son salarié le montant de l’indemnité.

Après étude, l’employeur est remboursé du montant de l’indemnité versée à son salarié.

En plus de cette indemnité à hauteur de 80% du montant net des heures prévues et non travaillées, l’employeur peut faire le choix de verser les 20 % complémentaires de la rémunération sous la forme d’un don solidaire.

Il faut noter que :

- L’employeur est remboursé du montant de l’indemnité,
- L’indemnité n’est pas éligible au crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile,
- Le montant versé n’est pas soumis aux prélèvements sociaux employeur et salarié,
- L’indemnité versée figurera sur la déclaration d’impôt sur les revenus du salarié.

Visuel de Une : Me Sabria MOSBAH (DR et courtesy S-M)

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