L'utilité de la politique

L’utilité de la politique de décarbonation des compagnies d’assurance au Gabon


Par Jaelle Joaddan Nze Ep Moubele
Juriste du Risque et du Développement Durable
Membre ANEJA et AFJE06

Parution dans le cadre du cycle d’étude "Droit des assurances approfondi - L’assurance face à la décarbonation"


La politique de décarbonation des compagnies d’assurances pourrait être une solution pour atteindre la neutralité carbone adoptée par l’Union Européenne d’ici 2050. Pendant que l’économie mondiale s’oriente progressivement vers un développement durable en promouvant une économie responsable, les compagnies d’assurances, acteurs économiques reconnus comme des investisseurs occupent une place majeure aussi bien dans la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) que dans celle de la transition énergétique.
A l’instar d’autres acteurs économiques, les compagnies d’assurances ont
progressivement pris conscience de l’impact du développement industriel et de ses conséquences sur l’environnement notamment le réchauffement climatique (1) et la perte de la biodiversité. En allant dans ce sens, Thomas Buberl, PDG d’Axa, affirme que : « le changement climatique est de retour en tête de l’ordre du jour  ».
En effet, les pertes mondiales inhérentes aux nombreuses catastrophes naturelles. aiguillonnent le marché des assurances à investir vers une transition écologique qui passerait, d’une part, par la décarbonation de son portefeuille clients, et d’autre part, par la redéfinition de ses priorités en termes d’investissement.

La transition écologique est une opportunité pour le marché français des assurances en plein essor et attractif.

Il offre des moyens d’investissement favorables notamment en ce qui
concerne les projets ou les PME exerçant dans les secteurs d’activités non polluantes.
Aussi, en plus d’être une opportunité pour le marché des assurances, la transition écologique est aussi un moyen économique pour réduire la productivité du marché carbone et ses conséquences climatiques. Les compagnies d’assurances ont la possibilité d’exiger de leurs assurés d’amoindrir les risques environnementaux pour obtenir la couverture de leur activité par un contrat d’assurance et cela peut avoir pour effet de réduire les activités polluantes.

Le Gabon pourrait-il s’inspirer de cette politique de décarbonation des compagnies d’assurances pour continuer de se hisser au [rang d’acteur mondial de premier plan en matière d’actions climatiques (2) ?

Pays d’Afrique centrale, le Gabon a rapidement pris conscience des enjeux climatiques engagement politique de longue date à préserver l’environnement naturel intact de son pays (3), soit 88% de la surface de son territoire couvert par la forêt appartenant au Bassin du Congo. Le Gabon a opté pour la gestion durable de ses ressources naturelles notamment la préservation de sa forêt, sa biodiversité et ses océans.
La politique de préservation de sa forêt qui est le deuxième plus grand puits de carbone au monde, fait de lui l’un des pays les plus positif en matière de carbone, et ce titre sert à la planète (4). En effet, cette forêt absorbe près de 200 millions de tonnes de carbone mises en vente sur le marché carbone.

Toutefois, à coté de cette préservation d’espace naturel, le Gabon reste un pays
producteur de pétrole bien qu’émettant peu de carbone. D’où son engagement, non pas sur une réduction de GES mais sur la maitrise de ses émissions de GES dans le cadre de son développement (5). Ces émissions de GES proviennent du torchage de gaz et de l’extraction pétrolière.
De, l’extraction pétrolière et même minière (6), n’a pas épargné le pays des pollutions massives (7), laissant des dommages à son environnement et sur les populations bien qu’étant un puits à carbone par sa forêt.
Si le Gabon souhaite maintenir la préservation de sa forêt, sa biodiversité et ses océans, tout en maitrisant ses émissions de GES provenant de son activité pétrolière et du secteur minier,
Il gagnerait à prendre en compte dans sa politique économique le marché des assurances. Il est vrai que le marché des assurances est jeune en Afrique mais cela n’empêche pas le Gabon s’il souhaite renforcer son rôle d’acteur du changement climatique, de protéger son patrimoine naturel par le biais des assurances en les orientant vers une politique de décarbonation. Cela pourrait d’ailleurs favoriser un premier pas vers la mise en œuvre d’une des politiques de réduction de GES déclarée lors de la COP 28 ; le soutien apporté par les puissances mondiales économiques en faveur des pays en voie de développement. Ces puissances économiques pourraient contribuer à l’essor et à l’attractivité du marché gabonais d’assurance.
L’État gabonais pourrait ainsi, concernant les acteurs économiques exploitant dans les secteurs polluants, rendre obligatoire une assurance qui couvrirait le risque lié à ces activités.
Cela permettrait à ces acteurs économiques d’exercer leurs activités de manière responsable et durable, sans exposer l’environnement et les populations aux catastrophes.
Cela permettrait également à l’État gabonais, d’encourager les compagnies d’assurances à investir dans des projets de transition énergétique et accompagner le secteur agricole pour que celui-ci ne soit pas une cause de déforestation.


Références de l’article

1) La préoccupation des assureurs pour le réchauffement n’est pas une surprise. L’année 2021 va peser lourd sur leurs comptes. Entre les inondations en Europe et en Asie, les dômes de chaleurs et les tempêtes en Amérique du Nord, les destructions de productions agricoles en France, le remboursement des dégâts va coûter une fortune. Selon le réassureur Swiss Re, les dégâts dus
aux catastrophes naturelles du 1er semestre étaient estimés a ?US$ 40 milliards. Mais le second semestre, en particulier les mois de juillet et août seront bien plus couteux. Rien qu’en Allemagne les intempéries meurtrières de l’e ?te ? se chiffrent à 26 milliards €. Gislin MBYE NTOMA et Stéphanie CAPDEVILLE, consultant national et internationale ONU. Malgré la faible activité des assurances au Gabon, la politique de décarbonation des compagnies d’assurances françaises peut être efficace pour renforcer la préservation de l’environnement et la lutte contre la pollution.
2) Le Gabon, un modèle de préservation de l’environnement
3 Savana AMMASSARI, Coordinatrice résidente des Nation Unies au Gabon.
4 Le Gabon, un modèle de préservation de l’environnement
3) Savana AMMASSARI, Coordinatrice résidente des Nation Unies au Gabon.
4 Le Gabon, un modèle de préservation de l’environnement

Lire aussi : Le transfert du risque climatique au prisme des Cat Bonds : instrument financier adapté à l’émergence des catastrophes naturelles ?

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