
Les principales dispositions de la Loi de financement de la sécurité sociale
- Par Emmanuel Labrousse --
- le 13 mai 2025
Lors d’un récent webinaire, Frédérique Fontaine-Hoareau et Emmanuel Labrousse, directeurs Service social RH au sein de Walter France, ont présenté les principales dispositions de la Loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que différentes actualités sociales concernant les entreprises et leurs salariés.
Tout comme la Loi de finances, cette loi de financement de la sécurité sociale a été votée dans un contexte inédit d’instabilité politique, qui a conduit à un vote tardif le 17 février 2025. Sans surprise, plusieurs mesures visent à réduire le déficit de l’Etat.
Plusieurs mesures concernent les charges sociales patronales.
Fusion des dispositifs d’allégements de charges sociales patronales
Les trois dispositifs connus vont perdurer jusqu’au 31 décembre 2025 :
– la réduction générale de cotisations patronales « Fillon »,
– la réduction de cotisations patronales Maladie,
– la réduction de cotisations patronales Allocations Familiales.
Mais au 1er janvier 2026, ces trois dispositifs fusionneront et pourront être activés pour les salaires dans la limite de trois SMIC.
Révision des plafonds à la baisse pour 2025
À compter du 1er janvier 2025 (avec effet rétroactif), seul le plafond de rémunération pour le calcul de la réduction générale de cotisations patronales « Fillon » reste inchangée, avec une limite à 1,6 SMIC, soit 34 595,32 euros. En revanche, le plafond de réduction de cotisation patronale Maladie passe de 2,5 à 2,25 SMIC soit 48 649,77 euros et le plafond de réduction de cotisation patronale d’Allocations Familiales passe de 3,5 à 3,3 SMIC soit 71 352,85 euros.
Réduction générale de cotisations patronales et prime de partage de la valeur
La réduction générale de cotisations patronales concerne les salariés percevant une rémunération inférieure à 1,6 SMIC. Il est inversement proportionnel à la rémunération perçue : plus la rémunération est proche du plafond de 1,6 SMIC, plus l’allégement général est faible, pour s’annuler à 1,6 SMIC.
Jusqu’au 31 décembre 2024, la rémunération prise en compte était le salaire soumis à cotisations. À compter du 1er janvier 2025, c’est le salaire soumis à cotisations auquel s’ajoutent les primes de partage de la valeur (qui peuvent être versées deux fois par an).
Cette mesure est rétroactive au 1er janvier 2025.
À noter que les primes PPV (primes de partage de la valeur) doivent être prises en compte non seulement pour le calcul du plafond, mais également pour le calcul du coefficient de réduction et pour le calcul de l’allégement.
Exonération pour les travailleurs occasionnels et les demandeurs d’emploi du secteur agricole
Cette mesure a été prise suite à la crise agricole, afin de réduire la masse salariale sur les bas salaires.
L’exonération totale des charges sociales patronales est pérennisée, et désormais pour les salaires jusqu’à 1,25 fois le SMIC, soit 2 252,30 euros.
Attention, pour bénéficier de cette exonération, trois conditions cumulatives doivent être respectées :
– seules sont concernées les rémunérations des salariés exclusivement affectés à des tâches liées au cycle de production animale ou végétale, aux travaux forestiers ou aux activités exercées dans le prolongement de l’activité agricole ;
– les salariés doivent être employés au maximum 119 jours par an (consécutifs ou non) et rémunérés en deçà de 1,6 fois le SMIC ;
– les contrats concernés sont les suivants : CDD à caractère saisonnier, CDD d’usage Contrat vendanges, CDD d’insertion (CDDI) conclu par une entreprise d’insertion ou par une association intermédiaire, CDD CIE (Contrat Initiative Emploi conclu notamment dans le cadre du Contrat Unique d’Insertion), CDI conclu avec un demandeur d’emploi (inscrit à France Travail depuis au moins 4 mois ou 1 mois si cette inscription fait suite à un licenciement) par un groupement d’employeurs composés exclusivement de membres exerçant les activités éligibles visées ci-dessus.
Abaissement du plafond d’exonération sociale pour les contrats d’apprentissage
Les cotisations salariales sont exonérées dans la limite de 50 % du SMIC, au lieu de 79 % précédemment. Les cotisations CSG-CRDS sont elles aussi exonérées dans la limite de 50 % du SMIC, alors que l’exonération était totale précédemment.
Ces nouveaux plafonds d’exonération sont applicables pour les contrats conclus à compter du 1er mars 2025.
Plafond revu à la baisse pour les indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS)
Pour mémoire, le montant des indemnités journalières de sécurité sociale correspond à 50 % du salaire de référence (3 derniers salaires bruts de l’assuré).
Jusqu’à présent, le plafonnement des trois derniers salaires pris en compte pour le calcul du salaire de référence était de 1,8 SMIC, soit 3 243,31 euros. La Loi de financement de sécurité sociale, confirmée par un décret du 20 février 2025, abaisse ce plafonnement à 1,4 SMIC, soit 2 522,57 euros. Cette mesure est applicable aux arrêts de travail débutant à partir du 1er avril 2025.
Cette diminution du montant des IJSS maladie va augmenter le maintien du salaire à la charge de l’employeur ou versé par les organismes de prévoyance. En conséquence, il y a fort à parier que ceux-ci augmentent la cotisation prévoyance.
À noter que cette mesure ne concerne que les arrêts maladie, pas les accidents du travail ni les maladies professionnelles.
Un taux moins favorable pour les jeunes entreprises innovantes
Parmi les critères d’éligibilité au dispositif JEI, un niveau minimum de dépenses en recherche est exigé pour bénéficier des exonérations patronales. Jusqu’au 28 février 2025, un taux minimum de dépenses en recherche de 15 % était exigé. A compter du 1er mars 2025, ce taux minimum de dépenses est relevé à 20 %.
Un certain nombre d’autres mesures, visant à soutenir les entreprises et les salariés, ont été quant à elles votées au sein de la Loi de finances. Parmi les mesures phare, plusieurs mesures concrètes, destinées à améliorer le pouvoir d’achat des salariés et leur emploi, méritent d’être signalées. D’autres, à l’inverse, sont rabotées ou supprimées.
Plusieurs changements concernent les frais de transport
L’employeur doit prendre en charge 50 % des titres d’abonnement aux transports publics ou de services publics de location de vélos. A titre temporaire, ce plafond avait été porté à 75 % pour l’exonération sociale et fiscale en 2023 et 2024. Bonne nouvelle : cette mesure est maintenue par la Loi de finances 2025, au titre de la seule année 2025.
La possibilité de cumuler la prime transport avec la prise en charge obligatoire de 50 % des frais d’abonnement aux transports publics ou de services publics de location de vélos, qui avait été instaurée de 2022 à 2024, est en revanche supprimée.
La possibilité d’attribuer la prime de transport en exonération aux salariés utilisant leur véhicule personnel pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail alors même qu’ils pouvaient utiliser les transports en commun, est, elle aussi, supprimée.
Réduction de certains avantages :
– Prime transport : 600 euros par an et par salarié, dont 300 euros au titre des frais de carburant (essence, diesel), contre 700 euros et 400 euros en 2024 ;
– Forfait mobilités durables : 600 euros par an et par salarié, contre 700 euros en 2024 ;
– Le cumul des aides pour les mobilités durables et le remboursement des frais de transport public ne peut pas dépasser 900 euros par an et par salarié, sauf si le remboursement obligatoire des frais de transport public est plus élevé, auquel cas c’est ce montant plus favorable qui s’applique ;
– Indemnités kilométriques vélo mises en place avant le 11 mai 2020 : limite de 600 euros par an et par salarié (après cette date, ces indemnités ont été intégrées dans le forfait Mobilités durables).
Prolongement de la possibilité de racheter des jours de RTT
Les salariés conservent en 2025 la possibilité de se faire racheter, avec l’accord de l’employeur, les journées et demi-journées de repos acquises et non prises, accordées dans le cadre d’un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine ; ou dans le cadre d’un accord de RTT antérieur à la loi du 20 août 2008. Cette rémunération majorée bénéficie d’une déduction des cotisations salariales et d’une déduction forfaitaire sur les cotisations patronales.
À noter que pour les salariés en forfait annuel en jours, un dispositif pérenne de rachat de jours de repos est déjà mis en place.
Prolongation de certains autres dispositifs
Les exonérations d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales sur les pourboires remis volontairement par les clients aux salariés qui ne dépassent pas 1,6 SMIC sont prolongées en 2025.
Depuis 2024, la majorité des communes auparavant classées en zone de revitalisation rurale (ZRR), bénéficiant de diverses exonérations fiscales et sociales, ont rejoint le nouveau zonage ZFRR. Celles qui ne l’ont pas intégré sont maintenues jusqu’au 31 décembre 2027 dans le dispositif des communes classées en ZRR. Bonne nouvelle pour elles !
Création de l’APLD « Rebond »
Un nouveau dispositif voit le jour pour aider les entreprises à faire face à des difficultés ponctuelles tout en préservant les salariés. Il s’agit de l’Activité Partielle Longue Durée (APLD) « Rebond ». Ce dispositif peut être mis en place par accord d’entreprise ou par décision unilatérale de l’employeur (prise en application d’un accord de branche) et il devra être validé par l’administration.
Il est ouvert aux entreprises en difficulté ponctuelle sans menace sur leur pérennité à long terme. Il faut que maximum 40 % du temps de travail soit chômé (dans certains cas particuliers, ce pourcentage peut monter jusqu’à 50 %). L’allocation de l’employeur se monte à 60 % du salaire brut, et l’indemnisation du salarié se monte à 70 % de son salaire brut (et peut aller jusqu’à 100 % dans certains cas).
Cette mesure est entrée en vigueur le 1er mars 2025 et est applicable jusqu’au 28 février 2026 au plus tard.
L’aide à l’apprentissage est rabotée
Jusqu’au 23 février 2025, l’aide était de 6000 euros. Pour les contrats conclus entre le 24 février et le 31 décembre 2025, cette aide est rabaissée à 5000 euros pour les entreprises de moins de 250 salariés, et à 2000 euros pour les entreprises de plus de 250 salariés. Pour les salariés en situation de handicap, quel que soit l’effectif, l’aide est maintenue à 6000 euros.
Entrée en vigueur du dispositif de partage de la valeur pour les entreprises de moins de 50 salariés
Ce dispositif avait été voté en novembre 2023 et est entré en vigueur au 1er janvier 2025. Il concerne les entreprises de 11 à 49 salariés qui ne sont pas tenues de mettre en place la participation comme c’est le cas dans les entreprises de plus de 50 salariés. Il est expérimental pendant 5 ans.
Il concerne les entreprises qui réalisent un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs, sachant qu’il s’applique pour la première fois aux exercices ouverts à partir du 1er janvier 2025, les conditions étant appréciées sur la base des exercices 2022, 2023 et 2024. La définition du bénéfice est identique à celui de la participation.
Y sont soumises les entreprises qui n’ont pas encore mis en place un système de partage de la valeur : participation, intéressement, abondement à un plan d’épargne salariale ou encore prime de partage de la valeur.
Les entreprises individuelles et les sociétés anonymes à participation ouvrière (SAPO) ne sont pas concernées.
Cas particulier des entreprises de l’économie sociale et solidaire
Il s’agit des fondations ou des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 (ou par le Code civil local d’Alsace-Moselle), des coopératives, des mutuelles ou des unions relevant du code de la mutualité ou encore des sociétés d’assurance mutuelles relevant du code des assurances.
Elles sont soumises aux mêmes conditions que les entreprises du secteur lucratif, sauf que pour ces entreprises, on ne parle pas de bénéfice fiscal mais de résultat excédentaire. En conséquence, si ces entreprises réalisent pendant trois années consécutives un résultat excédentaire au moins égal à 1 % de leurs recettes, elles doivent mettre en place ce dispositif, qui doit être prévu par un accord de branche étendu.
Comment partager la valeur ?
Les entreprises concernées peuvent mettre en place, au choix :
– la participation (sauf pour les entreprises de l’économie sociale et solidaire) soit par mise en place volontaire, soit par application d’un dispositif de participation conclu au niveau de la branche ;
– l’intéressement, soit par un accord d’intéressement, soit par application d’un dispositif d’intéressement conclu au niveau de la branche ;
– l’abondement à un plan d’épargne salariale. Attention, un plan d’épargne salariale ne suffit pas. L’employeur doit abonder ; rappelons qu’il peut abonder jusqu’à 300 %, mais cela peut être moins.
– une prime de partage de la valeur.
Attention à l’équité entre les salariés
La loi ne précise pas de montants ni de pourcentages à appliquer pour les montants à distribuer. Chaque entreprise a donc la liberté d’appliquer ce nouveau dispositif selon ses règles propres. En revanche, la distribution doit être collective et concerner tous les salariés ; il n’est pas possible de faire de distinction entre des catégories de salariés.
Attention toutefois à l’impact social si une entreprise est tentée de distribuer un montant très faible alors qu’elle a de très bons résultats…
Réforme des avantages en nature pour les véhicules
Lorsqu’un employeur met un véhicule à disposition permanente d’un salarié, l’utilisation non professionnelle de ce véhicule constitue un avantage en nature soumis à cotisations sociales et à l’impôt sur le revenu pour le salarié.
À compter du 1er février 2025, les règles d’évaluation forfaitaire de cet avantage sont modifiées.
La réforme introduit une distinction selon la date de mise à disposition du véhicule :
– Véhicules mis disposition jusqu’au 31 janvier 2025 : application des anciennes règles,
– Véhicules mis à disposition à partir du 1er février 2025 : application des nouvelles règles.
A partir du 1er février 2025, les règles d’évaluation forfaitaire sont les suivantes :
Évaluation de l’avantage en nature pour les véhicules 100 % électriques
Les véhicules électriques bénéficient d’un régime de faveur à condition de disposer d’un éco-score minimal pour être éligible au bonus écologique. Jusqu’au 31 décembre 2027, les frais d’électricité engagés pour la recharge du véhicule ne sont pas pris en compte dans le calcul de l’avantage en nature. Un abattement est appliqué sur l’évaluation de l’avantage en nature :
- au réel : 50 % d’abattement avec un plafond de 2 000,30 euros par an ;
– forfaitaire : 70 % d’abattement avec un plafond de 4 582 euros par an.
Avantage en nature pour une borne de recharge électrique
Les règles d’évaluation des bornes de recharge restent inchangées jusqu’au 31 décembre 2027 :
– borne installée sur le lieu de travail : aucun avantage à valoriser.
– borne installée hors du lieu de travail, rendue à l’employeur à la fin du contrat de travail : aucun avantage à valoriser.
– borne installée au domicile du salarié, conservée après la rupture du contrat de travail : exclusion de cotisations jusqu’à 1 043,50 euros (ou 1 565,20 euros si la borne a plus de 5 ans).
Réforme des saisies sur salaire : l’employeur est davantage impliqué
La saisie sur salaire consiste à prélever une partie du salaire d’un salarié, quel que soit son contrat de travail, pour rembourser toute dette de nature privée. Pour désengorger la justice, à partir du 1er juillet 2025, la procédure sera mise en œuvre par les commissaires de justice, sous le contrôle du juge de l’exécution. Les étapes seront les suivantes :
1ère étape : signification d’un commandement de payer par le Commissaire de justice.
2ème étape : délai d’un mois pour le salarié débiteur pour payer la somme, négocier un échéancier ou contester la dette.
3ème étape : si aucun accord n’est trouvé, le créancier doit, dans un délai de trois mois, après désignation d’un Commissaire de justice « répartiteur », faire signifier son procès-verbal de saisie à l’employeur du salarié débiteur.
4ème étape : l’employeur devra déclarer au Commissaire de justice les informations suivantes :
– la situation de droit existant entre lui-même et le salarié débiteur (le type de contrat de travail notamment) ;
– le montant de la rémunération versée au débiteur ;
– les autres procédures de cession, saisie, saisie administrative à tiers détenteur ou paiement direct des pensions alimentaires en cours d’exécution.
5ème étape : l’employeur procédera au calcul de la retenue sur salaire, selon des modalités inchangées et la reversera au Commissaire de justice « répartiteur ».
6ème étape : le Commissaire de justice « répartiteur » reversera les sommes au créancier saisissant et répartira les fonds en cas de pluralité de créanciers.
Quels risques pour l’employeur ?
Si l’employeur s’abstient, sans motif légitime, de déclarer les informations requises, par exemple pour protéger un salarié, ou s’il fait une déclaration mensongère, il peut être condamné par le juge, à la demande du créancier, au paiement d’une amende civile d’un montant maximum de 10 000 euros et s’expose à devoir payer des dommages-intérêts.
S’il ne procède pas aux versements prévus, il peut être condamné au paiement des retenues qui auraient dû être opérées ; en clair, payer à la place de son salarié !
Déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés
Les entreprises d’au moins 20 salariés doivent déclarer leurs effectifs de travailleurs handicapés par la DSN (déclaration sociale nominative) d’avril 2025, exigible le 5 ou le 15 mai 2025. Pour celles qui n’atteignent pas le quota de 6 %, elles doivent verser une contribution annuelle en fonction de leur effectif. Les compte rendus métiers, avec les nouveaux effectifs, ainsi qu’un guide explicatif, sont disponibles sur le site de l’Urssaf.
En 2025, pour la dernière année, les entreprises pourront bénéficier d’une mesure transitoire permettant un abattement.
Baisse de la contribution assurance chômage
A compter du 1er mai 2025, le taux de cette contribution est réduit de 4,05 à 4 %. Cette baisse aura des conséquences, notamment sur le bonus-malus, qui verra une réduction du taux de 0,05 %, et également un impact sur la réduction générale des cotisations patronales.
Modification des taux de cotisations AT / MP depuis le 1er mai 2025
Depuis le 1er mai, les cotisations Accidents du travail et Maladies professionnelles ont évolué, sans effet rétroactif. Les employeurs peuvent consulter leur taux 2025 sur leur compte AT/MP.