Rentabiliser sa démarche

Rentabiliser sa démarche RSE : investir dans les innovations environnementales

La question du retour sur investissement se pose à tout chef d’entreprise menant une démarche de responsabilité sociale et environnementale. En effet, la promesse de retombées économiques positives demeure le déterminant principal justifiant la mise en place d’une démarche RSE, qui doit être source de compétitivité pour l’entreprise sur le long terme. Dans le cadre de sa stratégie de développement, l’entreprise peut faire de la RSE un avantage compétitif si elle engage des investissements conséquents dans trois domaines majeurs : celui des innovations environnementales, celui des relations sociales et celui des certifications RSE. Nous vous proposons une série de trois articles portant sur chacun de ces thèmes, en commençant par aborder les opportunités que l’entreprise peut saisir en investissant dans les innovations environnementales.

Par Romain Vallier - Doctorant en droit à l’Université de Nice Sophia-Antipolis- Juriste d’entreprise - Spécialiste RSE et certifications environnementales

Les innovations environnementales sont une source de compétitivité pour l’entreprise

Les innovations environnementales sont toutes les solutions permettant de mieux protéger l’environnement. Plus précisément, il s’agit de produits, de services et de procédés, nouveaux ou améliorés, intégrant dans leur conception des éléments favorables à la protection de l’environnement. En privilégiant ce type d’innovation, l’entreprise tente de limiter les impacts environnementaux négatifs pouvant affecter, notamment, la biodiversité, le climat ou encore la santé humaine.
Les innovations environnementales, ce sont les énergies renouvelables, les biocarburants, les matériaux écologiques et durables destinés aux produits de consommation ou aux constructions immobilières, mais également les offres de services, les produits financiers ou encore les formations favorisant la protection de l’environnement.
Pour améliorer sa compétitivité, l’entreprise, qu’elle soit de type industrielle ou commerciale, a un triple intérêt à favoriser ces innovations environnementales.

Premièrement, les innovations environnementales permettent une réduction des coûts de production en interne, car elles favorisent des solutions industrielles et commerciales plus efficientes et moins polluantes. Par l’innovation environnementale, l’entreprise améliore sa gestion interne, optimise ses activités, et s’inscrit dans une démarche de qualité.

Deuxièmement, les innovations environnementales permettent de renforcer la protection du personnel de l’entreprise face aux risques environnementaux, tels que les risques chimiques ou industriels. La limitation des risques environnementaux pouvant affecter les salariés conduit corollairement à une réduction des accidents de travail, des maladies professionnelles, ainsi que des contentieux sociaux. Ainsi, outre l’intérêt "humain" de ces innovations pour l’intégrité et la santé des salariés, celles-ci permettent également de réduire les dépenses sociales de l’entreprise. Troisièmement enfin, les innovations environnementales permettent d’améliorer l’image de l’entreprise auprès de ses parties prenantes externes. L’entreprise peut valoriser ses efforts en matière de protection environnementale, en particulier si elle met en avant ses innovations dans le cadre d’une démarche de certification environnementale.

Juridiquement cependant, hormis quelques vagues développements constitutionnels existants sur le sujet, aucun texte de loi ne contraint ou n’incite les entreprises à se tourner vers ce type d’innovation. Or, peu de dirigeants savent que les normes environnementales volontaires abordent particulièrement ces innovations environnementales.

Les normes volontaires permettent à l’entreprise de valoriser les innovations environnementales

Dans le cadre d’une démarche RSE, les innovations environnementales voient leur importance grandir dans le management environnemental [1] des entreprises. En effet, ces innovations permettent de mener une stratégie de dépollution techniquement efficace et économiquement profitable.
À ce titre, les pouvoirs publics et les organismes de normalisation mettent en avant l’intérêt qu’a l’entreprise à investir massivement dans les innovations environnementales. Ainsi, les normes de gestion des sites ISO 14 001 et EMAS, les écolabels officiels français et européen de même que la norme ISO 26000 font plus ou moins directement référence aux innovations environnementales, notamment de type technologique.

De façon générale, pour qu’une innovation soit considérée comme "environnementale", ces normes posent trois exigences : une démarche d’écoconception, une démarche de substitution et une démarche d’amélioration continue.

- D’une part, l’entreprise doit s’engager dans une démarche d’écoconception [2]. Il s’agit d’intégrer dans la conception même de ses produits, de ses services ou de ses procédés des solutions (matériaux, substances ou techniques par exemple) destinées à prévenir les pollutions.

- D’autre part, l’entreprise doit respecter le principe de substitution. Autrement dit, elle doit substituer les éléments les plus polluants liés à la composition de ses biens et services par d’autres moins polluants dès qu’elle le peut. Bien entendu, ce changement doit rester économiquement viable pour l’entreprise.

- Enfin, l’entreprise doit respecter le principe d’amélioration continue. Ici, elle doit chercher des axes d’amélioration pour limiter de plus en plus ses impacts environnementaux grâce à ses innovations. Pour ce faire, la meilleure solution reste d’une part de mener une veille juridique, environnementale et technologique, et d’autre part de faire du "benchmarking", c’est-à-dire de comparer ses propres pratiques managériales et sa stratégie avec celles des concurrents.

Par ailleurs, afin de parvenir concrètement à identifier l’impact de ses activités de production, et à quantifier ces derniers, l’entreprise peut mener une analyse de cycle de vie (ACV). Ce mécanisme d’évaluation multicritère et multi étapes [3] permet de faire un bilan environnemental et de recenser l’intégralité des pollutions engendrées par l’entreprise.
Le respect de ces différentes démarches peut non seulement aider l’entreprise à identifier et à structurer sa démarche d’innovation environnementale, mais cela peut également contribuer à ce que l’entreprise obtienne une certification ou un label valorisant ses efforts de protection de l’environnement auprès du public.
Économiquement toutefois, la question des coûts initiaux devant être engagés pour obtenir ces innovations est délicate, notamment pour les PME. Celles-ci n’ont pas nécessairement les ressources financières, les moyens techniques et les compétences humaines requises pour mener des ACV, pour utiliser des composants ou des procédés moins polluants, et plus largement pour investir en matière de recherche et développement. Différents outils financiers permettent pourtant de financer ces innovations environnementales.

Le crowdfunding permet à l’entreprise de financer les innovations environnementales

Le crowdfunding environnemental [4] se révèle être le mécanisme de financement des innovations environnementales le plus adapté aux entreprises, et ce notamment pour les PME. Ce mécanisme financier consiste pour une entreprise à collecter des fonds auprès du grand public afin de financer un projet favorable à la protection de l’environnement. Pour inciter le public à investir, l’entreprise décrit son projet sur le site internet spécialisé de son choix.
Grâce au crowdfunding environnemental, l’entreprise peut alors financer des projets qui reposent tout ou en partie sur des innovations environnementales. Il peut s’agir de projets favorisant les énergies renouvelables (photovoltaïque, éolien), les formations et sensibilisations au développement durable, les bâtiments et des infrastructures durables (matériaux écologiques de construction, rénovation thermique et efficacité énergétique des bâtiments), les transports durables (biocarburants), l’agriculture durable (circuits courts), la commercialisation de biens durables (durée de vie prolongée, réparation et recyclage des produits facilitées, matériaux d’emballages propres, valorisation des déchets), ou l’économie circulaire.
- Il convient de préciser que n’importe quelle entreprise peut chercher à financer un projet reposant sur des innovations environnementales en s’adressant directement au public via un site de crowdfunding.

Par ailleurs, peu importe que le projet porte exclusivement ou non sur la protection de l’environnement, l’important est seulement qu’il ait un effet positif sur celle-ci.
Ainsi, à l’échelle nationale, l’entreprise EDF dès 2015 a procédé à une levée de fonds sur internet d’environ 135 000 euros afin de financer un projet de parc éolien. Depuis, l’entreprise finance chaque année de nombreux projets éoliens sur ce modèle.
Dans la région PACA, le secteur du photovoltaïque ainsi que de la méthanisation [5]) sont en pointe, et les projets de crowdfunding reposant sur ces innovations environnementales se multiplient.

Pour valoriser les projets tenant compte de l’environnement, les entreprises peuvent par ailleurs tenter d’obtenir un label officiel public. Les conditions d’attribution de ce label reposent sur des critères environnementaux établis par l’État, et sa délivrance se fait par un site spécialisé en la matière [6]. Cette démarche de labélisation peut permettre à l’entreprise de rendre plus attractif, plus crédible et plus visible son projet environnemental.

Les crédits d’impôts et statuts permettant à l’entreprise de financer les innovations environnementales

L’État, les collectivités locales et l’Union Européenne prévoient d’autres mécanismes de financement afin de financer des projets incluant des innovations environnementales.
Ainsi, l’État propose le crédit innovation, qui peut notamment aider les PME, en complément du crédit impôt recherche et du crédit impôt compétitivité, à financer des innovations fondées sur l’écoconception.Ces crédits d’impôts peuvent intéresser toutes les entreprises créant des innovations favorisant la transition écologique et énergétique.
Pour les nouvelles entreprises, le statut de jeune entreprise innovante peut accompagner le développement des innovations. De même, il existe plusieurs aides, prêts et réductions permettant de financer les innovations environnementales, notamment pour les entreprises s’orientant vers l’économie sociale et solidaire.

[1Management environnemental : ensemble des démarches volontaires de protection de l’environnement menées par l’entreprise dans ses actions et décisions quotidiennes. Il s’agit du volet environnemental de la RSE

[2Écoconception : intégration d’éléments favorables à la protection de l’environnement dans la conception d’un bien, d’un service, d’un procédé.

[3Analyse de cycle de vie : évaluation globale des impacts environnementaux d’un bien, d’un service ou d’un procédé sur l’ensemble de son cycle de vie, du berceau à la tombe.

[4Crowdfunding environnemental : financement participatif environnemental. Mécanisme économique permettant de financer un projet favorisant la protection de l’environnement par une levée de fonds sur internet directement auprès du public.

[5Procédé de dégradation de la matière organique par des micro-organismes.

[6Pour la liste complète des conditions à remplir ainsi que la liste des sites de crowdfounding labelisateurs : www.ecologique-solidaire.gouv.fr/la... ou financeparticipative.org/label-croissance-verte/

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