Tellement compliqué (…)

Tellement compliqué de faire simple

Un peu plus de quatre mille pages sont aujourd’hui nécessaires au Dalloz pour contenir les 10 000 articles de lois, décrets et arrêtés régissant les relations professionnelles entre les salariés et les employeurs. Ce corpus ne cesse d’augmenter. Le Code du Travail constitue un mille-feuille aussi indispensable qu’indigeste, sur lequel transpirent (abondamment) les partenaires sociaux et les professionnels du droit. Bien sûr, personne n’a vraiment intérêt à une réduction à la tronçonneuse de cette masse, car ce code est le fruit d’années de travail, de réflexion et de négociations pour régir de façon équilibrée notre vie au boulot.

L’époque est, paraît-il, à la « simplification ». Vraiment ? Si oui, c’est là que les choses se compliquent...

Par exemple, en apprenant que la Commission européenne souhaite réduire à un an le contrôle technique obligatoire des voitures de plus de dix ans, l’automobiliste français a quand même la fâcheuse impression que l’on cherche encore à l’enquiquiner dans un « toujours plus » avec une nouvelle mesure technico-administrative dont Bruxelles a le secret. Alors que le but recherché – supprimer les voitures dangereuses et polluantes – semble louable, il est cependant loin d’apparaître comme une nécessaire évidence : combien d’épaves encore roulantes parmi les 22 millions d’autos qui seraient concernées dans l’Hexagone ? Très peu, grâce au contrôle technique obligatoire tous les deux ans qui élimine impitoyablement les guimbardes. En revanche, nos Twingo de première génération et autres modèles ‘vintage’, même cabossés, sont indispensables à beaucoup pour se rendre au travail, en courses, pour traverser les déserts médicaux, le tout en slalomant entre les radars toujours plus nombreux, les ZFE qui ont du plomb dans l’aile, et les nouvelles voies réservées au covoiturage.
La surcharge financière pour un contrôle technique annuel représente une dépense équivalente à celle d’un plein. C’est loin d’être négligeable pour les plus modestes : environ 8 % d’un Smic mensuel net. Les Gilets jaunes ont démarré pour une taxe de quelques centimes par litre seulement. Il y a là de quoi faire réfléchir le Parlement européen et les États membres au moment de valider – ou pas – cette nouvelle mesure.

Entre la théorie et la réalité, le fossé ne cesse de se creuser. Les Français le constatent chaque jour dans leur vie quotidienne. Ils ont le sentiment que leurs libertés s’amoindrissent par un excès de normes, de règles et – oserons-nous le dire – de lois dont les discussions à l’Assemblée déchirent le tissu national sans toujours apporter les effets bénéfiques et tangibles escomptés. Pour ne rien dire des textes n’ayant jamais « bénéficié » de décrets d’application…
Ce cholestérol administratif, cette sorte de «  tout ça pour ça  » engorge la machine. Cela fait des années que les gouvernements successifs veulent simplifier, sans y parvenir. La très officielle « direction interministérielle de la transformation publique » est le nouveau comité Théodule chargé de cette mission. Sa première ambition est de « rendre clair le langage  » avec l’administration pour permettre « au destinataire visé de facilement trouver, comprendre et utiliser l’information dont il a besoin  » (c’est bien le moins).

Un bon début, qui demande à l’évidence que soit encore simplifiée... la simplification.