Gil Bernardi : « Le (…)

Gil Bernardi : « Le Cap Nègre était réputé imprenable »

Dans la nuit du 15 août 1944, sitôt l’abattant métallique du L.C.A abaissé, un à un, les Commandos d’Afrique se sont lancés hors de la barge de débarquement dans la nuit noire et en file indienne.

Ils sont derrière le capitaine Ducournau, l’élève de Saint-Cyr, qui les emmène au « bal ». Les hommes du 1er commando prennent pied sur les rochers de l’éboulis, au pied de la sinistre et vertigineuse falaise qu’il va falloir escalader. Silencieusement. Pour tenter de surprendre l’ennemi, de neutraliser les canons, tout en haut du promontoire, tapis sous les casemates bétonnées.

MISSION IMPOSSIBLE

Cette mission impossible, conçue par un stratège génial ou par un esprit dérangé, c’est pour eux, les Commandos d’Afrique – Mais ils ont beau se compter et se recompter. Ils ne sont que 35 démons de guerre, au pied de l’objectif au lieu des 60 prévus initialement. Le reste du détachement a raté la cible. Inutile de les attendre. Il faut monter au combat.
Pourtant, cette « mère Patrie », si exigeante des vies de ses enfants pour recouvrer la liberté, la plupart la découvrent. Bien peu ont foulé son sol métropolitain. Cette bande de volontaires, de têtes brûlées, rassemble tous ceux que l’armée régulière n’a pas encore intégrés. Les « pieds-noirs », bien sûr, mais aussi les évadés de la France occupée, passés par l’Espagne, les rescapés des Corps Francs dissous, les engagés des « bleds » et du désert, les Tabors Marocains, les Tirailleurs d’Afrique, les anciens Légionnaires. Français libres de Brosset, coloniaux de Magnan, Africains de Monsabert, goumiers de Guillaume. Ils sont de toutes origines, de toutes confessions. Chrétiens, juifs, musulmans, coptes. De tous rangs, bergers des Aurès, officiers d’active, simples civils, fondus dans le même creuset d’une unité d’élite vouée à percer les lignes ennemies. Là où personne ne les attend, là où personne ne veut risquer sa peau. Bouvet est sûr d’eux. Ce sont les meilleurs parmi les meilleurs. Il a poussé leur entraînement à l’extrême pour affronter n’importe quelle situation. Jusqu’à la limite de l’endurance humaine, depuis le serment de la plage de Sidi Ferruch, en décembre 1943.

LA PRISE DU CAP NÉGRE

Le Cap Nègre fait partie de ces objectifs réputés imprenables. Un « gros morceau ». Mais lui sait qu’ils en sont capables. Tant ils se sont aguerris au fil des exercices à balles réelles, au maniement de toutes les armes, à l’infiltration derrière les lignes Allemandes, au parachutisme comme à l’escalade et aux opérations amphibies, aux tyroliennes et aux « ponts de singes ». Ces jeunes volontaires pour l’enfer ont tout appris. Ils savent tuer les sentinelles en silence, dynamiter les redoutes, percer les lignes et déjouer les champs de mines. Bouvet les a transformés, en quelques mois en véritables machines de guerre, capables de s’adapter à toutes les adversités, à prendre les initiatives les plus folles : capables de se battre à un contre cent- Il est sûr d’eux, depuis qu’il leur a remis l’insigne du Commando : le croissant couronné de la voile latine frappée de l’étoile d’or – sur la plage de Staoueli où le « cirque Bouvet » a poussé leur entraînement au-delà du supportable, pour ne conserver que les meilleurs. Georges-Régis Bouvet qu’ils vénèrent. Bouvet qui les a soudés par-delà leur diversité. Et surtout, qui leur a inculqué le sens de l’improvisation, l’intelligence de déjouer les pièges et la capacité de renverser une situation précaire en véritable option de victoire – L’esprit Commando. « Je ne connais qu’une seule fuite : la fuite en avant ».
« Lorsque vous serez encerclés, laissez-leur croire qu’ils vous tiennent, puis renversez la situation par la puissance de feu, et foutez-leur sur la gueule. C’est vous qui les capturerez » (...).
Gil Bernardi, maire du Lavandou.

Photo de Une : ©PRESSE AGENCE.