Colette Weizman : « Ce sont les collaborateurs que nous avons du mal à attirer »


Finance


24 juin 2022

Les 7 et 8 juillet se tiendra à Cannes le Congrès régional des experts-comptables et des commissaires aux comptes. Si la profession a beaucoup évolué elle peine encore à attirer des collaborateurs.

Pourquoi avoir choisi ce thème pour le Congrès : « Au cœur du changement » ?


- On a traité de beaucoup de choses : l’expert-comptable au cœur de l’économie, au cœur de l’entreprise, au cœur de la société… et à un moment donné on s’est dit : et l’humain dans tout ça ? Face à la pénurie de collaborateurs, à la fatigue que tous les experts-comptables ont ressentie à la sortie du Covid, on s’est dit qu’on avait beaucoup parlé d’intelligence artificielle et qu’il était peut-être temps de parler d’intelligence émotionnelle et de mettre l’expert-comptable au cœur du changement managérial, au cœur du changement de son métier et au cœur des enjeux sociétaux. Aujourd’hui par exemple, quand on est en phase de recrutement et qu’on reçoit de jeunes collaborateurs (et on le voit de plus en plus) les questions qu’ils nous posent sont : est-ce que vous êtes zéro papier ? Comment avez-vous géré la digitalisation du cabinet ? Est-ce que vous faites le tri ? Ce sont des questions que je n’avais pas il y a cinq ans. Je trouve cela top. En interne, il faut que l’on fasse attention à cela, et pour nous et pour nos entreprises. L’expert-comptable a un rôle moteur pour montrer les bonnes pratiques et les bons réflexes.

Combien de personnes attendez-vous pour ce Congrès ?

- Quand c’est à Marseille, on accueille jusqu’à 1 400 personnes. On est en sortie de Covid, à Cannes, au mois de juillet. On espère avoir au moins 1 000 personnes. Je ne sais pas si on les aura mais on est en train de mettre tous les moyens en œuvre pour qu’il y ait du monde. Tous nos partenaires nous ont dit qu’ils seraient présents donc pour nous c’est très important. Il y aura aussi une soirée festive au cours de laquelle on pourra un peu oublier le Congrès et penser à autre chose. Comme ce sont les 10 ans cette année, on a invité tous les stagiaires, avec un prix des meilleurs mémoires. C’est aussi une journée de rencontre avec les institutions.

Comment se porte la profession d’expert-comptable ?

- Elle se porte plutôt bien, à part qu’elle est très fatiguée, épuisée par cette période de Covid et par la pénurie de collaborateurs. Economiquement elle va bien, c’est physiquement qu’elle est fatiguée.

Il est toujours difficile de recruter ?

- Cela reste difficile parce que je pense que c’est un métier très mal connu. C’est pour cela que dans tous les conseils de l’Ordre de toutes les régions de France, on essaie vraiment de communiquer, avec des commissions attractivité, sur notre métier, qui a complètement changé. Mais dans le regard de certains, et notamment de certains jeunes, quand on parle d’expert-comptable on imagine toujours le monsieur en costume ou la dame en tailleur, un peu triste. On veut vraiment essayer de changer cette image. Aujourd’hui, l’expert-comptable, c’est un chef d’entreprise dynamique, actif. L’expert-comptable a changé et le métier aussi. D’ailleurs combien de fois on m’a dit dans ma carrière ‘Mais tu n’as pas une tête d’expert-comptable’. Cela veut bien dire que dans le regard des gens l’expert-comptable doit avoir un certain physique, un certain mode vestimentaire. Je pense heureusement que cela a beaucoup bougé. Et je crois que le Covid nous a un peu mis dans la lumière. Je regrette que ce soit à cause d’une pandémie mais je pense qu’aujourd’hui le métier est vraiment mis en avant. Je pense que les entreprises qui n’avaient pas d’expert-comptable pendant ces deux années de Covid ont dû beaucoup souffrir. Quand on voit tout ce qu’on a fait pour nos chefs d’entreprise, je ne sais pas comment ont fait ceux qui n’en avaient pas. Je parle des TPE/PME de notre région, qui représentent 90 % de notre tissu économique en Paca.

Il manquerait encore du temps avant que l’image ne bascule définitivement ?

- Ce n’est plus du temps qu’il nous manque, c’est de la com’. On réfléchit là-dessus au niveau du Conseil national et au niveau des Conseils régionaux. On essaie de faire des campagnes de pub par des jeunes, des choses qui bougent. Pour la présentation du Congrès, on a essayé de faire quelque chose d’animé pour sortir de notre mode de communication habituel. On n’a pas de problème pour avoir des experts-comptables. C’est un métier qui attire beaucoup. Ce sont les collaborateurs que nous avons du mal à attirer. On va y arriver. On est en train de créer des partenariats avec des écoles qui forment à notre métier, pour les mettre en avant, afin qu’elles puissent avoir un label : le label collaborateur de cabinet. Il y a un nouveau diplôme, le Bachelor, qui se fait en trois ans. On s’est rendu compte que deux ans c’était court et cinq ans trop long. Ce Bachelor peut permettre à ces jeunes qui s’arrêtent au bout de deux ans d’avoir un peu plus de formation et ceux qui ne veulent pas aller jusqu’à cinq ans trouveront un compromis. Là, on espère vraiment créer de la main d’œuvre. La ressource humaine est le premier facteur de réussite de nos cabinets. Je crois que pour la première fois de ma carrière, et j’ai échangé avec énormément de confrères, on n’hésite pas aujourd’hui à refuser des clients, parce qu’on n’a pas la main d’œuvre. Quand on a un peu de conscience professionnelle, on se dit je ne vais pas le prendre, qui va le traiter ? Il y a deux phénomènes : on hésite à prendre un client si on sait qu’on ne va pas pouvoir lui accorder le temps nécessaire et il y a aussi beaucoup de confères qui vont s’attacher à satisfaire les clients qui ont conscience de notre rôle et à ne plus s’occuper des clients « jamais contents ». Ce n’était pas notre politique avant de dire cela.

Expert-comptable ou commissaire aux comptes ?

Colette Weizman rappelle que « l’expert-comptable est là plutôt pour accompagner le chef d’entreprise, le conseiller et, bien sûr, faire les comptes puisque c’est une obligation fiscale » alors que « le commissaire aux comptes est là pour valider que tous les comptes qui ont été présentés par l’entreprise, avec ou sans expert-comptable, sont bien fidèles et sincères. Il veille aussi au respect des droits des associés et des actionnaires et de la vision des comptes par les tiers. S’il y a un expert-comptable, il aura fait évidemment des comptes sincères et fidèles ».

Le programme du Congrès régional 2022

10ème Congrès régional de la profession du chiffre et de l’audit : « Experts-comptables et commissaires aux comptes au cœur du changement », jeudi 7 et vendredi 8 juillet au Palais des festivals de Cannes.

Ateliers (jeudi et vendredi) : L’expert-comptable au cœur du changement managérial : 5 accords toltèques pour transformer votre management et booster votre cabinet !
L’expert-comptable au cœur du changement de son métier : Les nouvelles trajectoires vers l’association, comment fidéliser les talents d’aujourd’hui ; L’expert-comptable au cœur des enjeux sociaux et sociétaux : Vers un verdissement des missions ; La responsabilité sociale et environnementale des entreprises : Des clés pour comprendre, des enjeux pour les CAC (commissaires aux comptes) ; Comment le CAC peut-il auditer les crypto-actifs ?
- Intervenants : Carole Adam (coach), Nicole Carrion (élue au Conseil national des experts-comptables), Pierre-Yves Lagarde (associé chez Imani), Hervé Gbego (élu au Conseil national des E-C, président du comité RSE), Marie de Carcouët (consultante) et Fabrice Heuvrard (expert-comptable et commissaire aux comptes).

Tables rondes (jeudi)  : Crise sanitaire, guerre en Ukraine : la reprise est-elle menacée ? (jeudi) ; De l’intelligence émotionnelle vers un management augmenté (jeudi) ; Vie professionnelle, vie personnelle : la nouvelle donne (vendredi).
- Intervenants  : Béatrice Fornari (coach professionnelle), Christopher Pratt (navigateur), Maurice Thévenet (professeur à l’Essec Business School) et Olivier Torres (professeur à l’Université de Montpellier).

- Soirée festive (jeudi)

- Remise de prix des meilleurs mémoires, prestation de serment, cocktail et photos (vendredi)

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Sébastien Guiné