Dans la montagne d'ilonse

Dans la montagne d’ilonse, si les brebis ont des puces, c’est pour être mieux connectées !

"Alors, vous êtes un agriculteur connecté" ? Laurent Boulogne s’esclaffe quand on lui pose cette question. C’est un jeune quadragénaire qui vit de plain-pied dans le XXIème siècle, représentatif d’une petite poignée d’éleveurs 2.0 installés dans les Alpes-Maritimes. Reconnaissons que, dans nos esprits de citadins un peu trop coupés des réalités de la nature, les notions "agriculture" et "technologies numériques" ne paraissent pas forcément voisines. Avant de discuter avec Laurent Boulogne, nous étions à cent lieues d’imaginer ce qu’implique la génétique animale que tout bon éleveur se doit d’avoir assimilé pour la préservation et l’amélioration de la race, et le confort que les progrès technologiques peuvent lui apporter.

Une sélection rigoureuse

Le troupeau de Laurent reste dehors toute l’année, sauf lors de la période de l’agnelage en février et mars. Le berger passe donc beaucoup de temps dans la montagne d’Ilonse avec ses deux cent quatre-vingts mères et ses cinquante agnelles de renouvellement. Comment l’imaginer dans ces paysages bucoliques avec un ordinateur sous le bras, à 1250 mètres d’altitude ? Et pourtant, les brebis sont bel et bien fichées et numérisées (le RGPD ne s’applique pas...)
"J’ai sélectionné des bêtes qui me plaisent, qui sont belles, rustiques, bonnes mères et de bonnes marcheuses, qui donnent du lait en abondance" explique Laurent. Il préfère la race pure "Mourrerous" plutôt que les croisements, génétiquement imprévisibles. Les meilleures femelles donnant naissance aux plus beaux agneaux, il se livre à de savantes analyses pour sélectionner les meilleurs animaux. Son expérience lui a confirmé que mieux vaut un troupeau de volume moyen plutôt qu’important, bien plus difficile à gérer.
Le pedigree de chaque animal, en quelque sorte son CV, est enregistré dans une base de données. Le logiciel "Ovitel" rassemble cette data que l’éleveur peut lire à tout moment sur une tablette connectée en passant un scanner sur l’oreille de la brebis pucée. "Outre un gain de temps, on constate le travail effectué, je me régale à calculer les différents index livrés par l’ordinateur.

En circuit court

Laurent a découvert la gestion informatisée du troupeau alors qu’il était contrôleur de performance à la chambre d’agriculture. Il utilise ce logiciel depuis trois ans maintenant. Malgré tout, le berger d’Ilonse n’a pas grand-chose d’un geek. Il est proche de son troupeau en toutes circonstances :"en période d’agnelage, on est a eu jusqu’à vingt-quatre naissances par jour. Mes enfants m’aident souvent dans ces moments là".
Le métier n’est pas facile, et il sait pourquoi il ne poussera pas sa fille et son garçon à prendre la suite, sauf s’ils le souhaitent. Au-delà du travail auprès des bêtes, il assure la vente de sa production en local, circuit court, comme on voudra.
C’est pour cela que l’on mange si bien dans la Tinée...

lonse, où les brebis pucées ignorent tout du RGPD...(ML)

Des chiffres : 50 500 ovins dans les Alpes-Maritimes (220 00 dans les BdR),
1 000 tonnes de viande produites par an.
Photo de Une : Laurent Boulogne, éleveur 2.0., ses brebis et son chien de troupeau. (DR ML)

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