Gestionnaires de biens

Gestionnaires de biens immobiliers, attention aux ASL fantômes...

Un copropriétaire au sein d’un immeuble urbain refuse un beau jour de régler ses charges soutenant qu’il ne les devrait qu’à une ASL (Association Syndicale Libre), superstructure censée gérer l’ensemble immobilier plus vaste au sein duquel se trouvait implanté l’immeuble où il habite.

Pourtant l’ASL conçue en 1970 pour servir à la gestion des futurs équipements communs et voies de circulation d’un programme constructif comprenant de l’habitat, des commerces, une salle des fêtes publique et des parkings dont seule une fraction de la 1ère tranche a vu le jour (l’immeuble de résidence du récalcitrant) en raison de la déconfiture du promoteur, n’avait pas connu d’assemblée constitutive et n’avait pour cause rien eu à gérer (ses statuts avaient été quand même publiés en Préfecture comme toute association).

L’intéressé conteste les assemblées générales de son immeuble organisées en 1998 au visa de la loi du 10 juillet 1965 ayant décidé de la scission du foncier de la parcelle d’assiette du programme non réalisé intégralement et validé les budgets fondant l’exigibilité des appels de fonds contre lui en excipant de ce qu’elles auraient dû se tenir sous le régime alternatif de la loi du 21 juin 1865.

Il est accueilli par le TGI de Grasse puis la Cour d’appel d’Aix-en-Provence qui annulent les assemblées en question.

La 3ème chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi diligenté par le syndic par arrêt du 6 novembre 2007 (pourvoi n°06-14.304) aux motifs que :

"ayant par motifs propres et adoptés constaté que l’acte constitutif de l’association syndicale libre avait écarté délibérément le statut de la copropriété et relevé qu’un régime de propriété spécifique avait été déterminé pour un bâtiment dénommé "salle des fêtes" devant revenir à la Commune de Mandelieu-la-Napoule, la Cour d’appel en a déduit à bon droit que la résidence "La Casinca" ne pouvait être soumise au régime de la Copropriété et que les assemblées générales devaient être annulées".

Le critère est celui de l’hétérogénéité de droits en concurrence sur le sol (droits privatifs et droits indivis) excluant la Copropriété où chacun a des droits homogènes et indivis sur le sol.

Le syndic change alors de stratégie, ne nie plus l’existence de l ASL, compose avec et agit en paiement (le débiteur n’avait pas contesté les assemblées des années subséquentes) en soulignant que l’ensemble immobilier est régi par une ASL certes mais dont l’immeuble en son périmètre est soumis en ce qui le concerne à la loi du 10 juillet 1965.

Cette approche est couronnée de succès ; le requis est enfin condamné et sur pourvoi la 2ème chambre civile de la Cour de cassation selon arrêt du 19 février 2015 (pourvoi n°14-12.849) confirme :

"il résultait de l’acte descriptif de division et du règlement de Copropriété établis par acte notarié du 21 décembre 1970 publié le 8 février 1971 que l’immeuble dénommé "le Saint-Pancrace-Gendarmerie" était soumis au régime de la copropriété et constituait le lot n°2 d’un ensemble immobilier dénommé "Résidences de la Casinca" comprenant des terrains, des aménagements et des services communs dont l’administration, la gestion et l’entretien étaient assurés par une ASL, c’est sans méconnaître l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt ayant dit que l’ensemble immobilier "Résidences de la Casinca" n’était pas soumis au régime de la copropriété mais géré par une ASL, que la Cour d’appel a exactement retenu que le syndicat des copropriétaires qui avait adopté le nom de "Résidence la Casinca" était en réalité le syndicat des copropriétaires de l’immeuble dénommé "le Saint-Pancrace-Gendarmerie" qui avait qualité pour agir en recouvrement de charges afférentes à cet immeuble et a rejeté la fin de non recevoir soulevée par M W."

Enseignements : surveiller si des statuts d’ASL n’ont pas été publiés en Préfecture avant d’envisager des réorganisations du foncier, provoquer une assemblée constitutive pour voir constater qu’elle n’a plus d’objet, qu’elle est devenue caduque et qu’elle doit être dissoute (à condition d’être certain de recueillir le vote de l’unanimité des membres) ou bien laisser l’ASL dans son "sommeil" et ne porter en assemblée de copropriété des bâtis que des questions ne pouvant déborder sur les attributions théoriques de l’ASL fût-elle jamais en fonctionnement.

Par Maître Pierre-Alain RAVOT
Avocat au Barreau de Grasse
Membre de l’AARPI LEXWELL Avocats
Square Carnot - 9 rue Masséna
06110 LE CANNET - FRANCE

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