Collectivités locales (…)

Collectivités locales : Vers un numérique responsable

Un séminaire d’Orange a permis de mesurer la bonne volonté des collectivités pour agir en faveur d’un numérique responsable en même temps qu’il a révélé la complexité des actions à mener.

David Kernanec, senior manager d’Orange Consulting, l’assure : face à l’inflation réglementaire liée aux transitions écologique et numérique, les collectivités territoriales, celles des Alpes-Maritimes comme ailleurs, se retrouvent bien souvent au pied d’une « montagne » et « l’idée est de pouvoir leur fournir une boussole ».


Ils étaient une vingtaine de représentants à venir chercher de l’information et des pistes de réflexion ©S.G

Ils étaient une vingtaine de représentants à venir chercher de l’information et des pistes de réflexion le 11 avril sur le site d’Orange, à Sophia Antipolis : des maires, adjoints, conseillers municipaux ou membres de directions de services de la Métropole Nice Côte d’Azur, de l’agglomération Cannes Pays de Lérins et des communes d’Antibes, Biot, Castagniers, Grasse, Le Rouret, Mandelieu-la-Napoule, Mougins, Nice, Saint-André-de-la-Roche, Saint-Etienne-de-Tinée, Saint-Laurent-du-Var, Saint-Paul-de-Vence, Valbonne et Valderoure. Après quelques présentations, David Kernanec a supervisé un atelier participatif au cours duquel les représentants des collectivités ont eu un petit aperçu des démarches à effectuer dans le cadre d’un PCAET (Plan climat-air-énergie territorial). « On parle de toutes les communes parce qu’elles seront toutes touchées, peu importe leur taille, par des questions de ressource en eau, des problématiques d’énergie et des problématiques d’attractivité et mobilité », souligne-t-il. « Il faut passer des idées à l’action, mais à l’action partagée. Les élus ne sont pas les seuls décideurs, ils vont le faire avec tout un écosystème : institutions, entreprises et leurs propres services  ».
Philippe Bardey, conseiller municipal à Mougins subdélégué à la politique du développement durable et à la ville numérique notamment, a reconnu avoir été « très intéressé par les échanges que nous avons pu avoir pour essayer de voir comment aider l’ensemble des acteurs à respecter les lois ou contribuer à faire évoluer certaines directives pour les simplifier et les rendre accessibles par tous ».

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« Tout prendre en compte »

Il a admis que son travail d’élu aujourd’hui était « plutôt à subir les directives. La difficulté, c’est de mettre des priorités dans les actions. Des réunions comme celles-là sont intéressantes pour montrer les secteurs où il y a le plus à gagner ».
Éric Bonfils, adjoint au maire de Saint-Laurent-du-Var, a apprécié les intervenants (David Kernanec et Pauline Rocu, de l’ADEME, l’agence de la transition écologique), qui leur « ont ouvert l’esprit ». « Nos décisions ont des incidences et il faut tout prendre en compte. Il faut regarder l’impact sur la population, sur les finances, sur la formation à venir. Le coût est important, d’autant que les collectivités ont de moins de moins d’argent  », a-t-il noté. Ce séminaire a été organisé dans le cadre d’une convention signée en novembre dernier au salon des maires à Paris. «  Nous avons décidé cette année de nous intéresser au numérique responsable, sujet à la croisée de la transition numérique et de la transition écologique  », a expliqué Laurent Londeix, délégué régional Orange Provence Côte d’Azur. « Depuis plusieurs années, nous organisons des séminaires d’information et d’échanges avec les représentants des collectivités territoriales », a-t-il poursuivi. «  Nous avions travaillé sur les réseaux sociaux au début des années 2010 puis sur la cybersécurité et sur l’intelligence artificielle, en 2019. On essaie d’éclairer, à chaque fois, les impacts qu’ont les nouvelles technologies sur les collectivités territoriales. Nous avons une vision relativement éthique et inclusive du numérique, nous vivons du numérique mais nous ne vivons pas d’une surconsommation du numérique  », a assuré le responsable d’Orange, ajoutant que le groupe s’était fixé comme objectif d’être neutre en carbone dès 2040.

« Une production réglementaire en accélération constante »

David Kernanec, senior manager d’Orange Consulting ©S.G

David Kernanec a présenté les deux grandes lois qui traitent du numérique responsable, indiquant que la «  production réglementaire » dans ce domaine était « en accélération constante ». Il a mentionné la loi AGEC, du 10 février 2020, «  relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire » et notamment ses articles 13.1 (plus grande information des consommateurs par les producteurs et les importateurs de produits), 13.3 (informer les abonnés de la quantité de données consommées), 16 (indice de réparabilité), 19 (mise à disposition de pièces détachées pendant cinq ans), 22 (extension de la garantie légale de conformité), 27 (mises à jour des logiciels), 55 (réduction de la consommation de plastiques à usage unique) et 58 (réemploi, réutilisation, recyclage). « Le but du jeu est de créer de moins en moins de choses, de les réutiliser et d’aller au bout du bout, tant d’un point de vue physique que des logiciels. Tout le sens de cette loi est de sortir d’initiatives isolées pour arriver à une économie circulaire  », a résumé David Kernanec au sujet de la loi AGEC. Il a ensuite évoqué la loi REEN, du 15 novembre 2021, « visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France  ». Cette dernière a cinq objectifs : « faire prendre conscience de l’impact environnemental du numérique, limiter le renouvellement des appareils numériques, favoriser des usages numériques écologiquement vertueux, promouvoir des datacenters et des réseaux moins énergivores et promouvoir une stratégie numérique responsable dans les territoires  ». Pour David Kernanec, «  l’un des sujets clé pour avancer  » pour les collectivités « est de mettre autour de la table la direction de la commande publique et la direction des systèmes d’information, la première pour porter les enjeux et de la SPASER (schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables) et la seconde, ceux de la loi REEN ».

Bientôt un site de l’ADEME à disposition des collectivités

Dans le cadre du programme Alt Impact, co-porté par l’Inria et le CNRS, l’ADEME a pensé un « plan d’action déploiement dans les territoires », incluant un site web à destination des collectivités territoriales qui sera disponible cet été, avec des ressources utiles comme des outils de calcul d’impact et des guides de bonnes pratiques, ainsi qu’un travail prévu avec le réseau TETE (Territoires engagés pour la transition écologique) et des expérimentations sur le territoire.
Ce programme Alt Impact a été présenté par Pauline Rocu, du service Sobriété numérique (SoNum) de l’ADEME. Elle avait dans un premier temps présenté les impacts du numérique, expliquant que l’ADEME se concentrait sur la « sobriété numérique », le numérique responsable étant une notion plus large. «  Le numérique a beaucoup d’impacts sur l’environnement », a-t-elle assuré, indiquant que 2,5 % de l’empreinte carbone était liée au numérique (« un taux supérieur au secteur des déchets et domaine en plus forte croissance  ») et que cet impact était «  essentiellement lié à la fabrication ». «  Quand on achète un ordinateur, 80 % de son empreinte carbone a déjà eu lieu », a expliqué Pauline Rocu. Elle est également revenue sur les quatre scénarios de transition de l’ADEME pour 2050 (S1 Génération frugale, S2 Coopérations territoriales, S3 Technologies vertes et S4 Pari réparateur) avec leurs implications concernant le secteur du numérique. Seul le premier scénario permettrait une réduction des émissions de CO2 du numérique (- 45%). Pour les autres, les hausses d’émissions seraient de 32 % pour le S2, de 183 % pour le S3 et de 372 % pour le S4.

Photo de Une ©S.Guiné