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Daniel Sfecci : "la société va changer radicalement de modèle économique"

Le nouveau président de l’UIMM parle de l’action de son syndicat dans le 06 et en région Paca et des attentes du monde de l’industrie pour les années à venir... après les présidentielles.

Votre sentiment sur la situation des Alpes-Maritimes ?

En prenant la présidence de l’Union des Industries et Métiers de la Métallurgie, j’ai fait le constat que notre département a une position éloignée, et pas seulement au sens géographique. Nous arrivons dans une période où l’on prône la régionalisation, alors que nous aurions tendance ici dans le 06 à rester un village gaulois. Ma première orientation, c’est donc de déterminer comment rayonner et être représenté au plan régional. J’ai donc entrepris de renouer des relations avec nos voisins de Paca, relations qui historiquement étaient difficiles. Le 06 fera ses propositions au prochain bureau Paca sur le fonctionnement régional. Je suis optimiste, on avance.

Une nouvelle gouvernance pour l’UIMM dans les Alpes-Maritimes ?

Il faut dépoussiérer nos vieilles habitudes. J’ai fait entrer beaucoup de personnes nouvelles au conseil d’administration de l’UIMM, dont des femmes et des jeunes de la génération Y, afin d’être représentatif de l’entreprise du XXIème siècle. Je propose quatre groupes d’influence : l’emploi et la formation, le social, le financement de l’entreprise, et le développement de l’UIMM.

Et au niveau national, pour l’emploi par exemple ?

Notre syndicat est une vraie force de propositions sur de nombreux thèmes pour les présidentielles. Sans entrer dans la politique politicienne, on vient de vivre cinq années particulières. Les gouvernements ont été loin de nos espoirs mais, pour être francs, on ne s’attendait pas à mieux. Il n’y a pas eu de stratégie économique, toutes les grandes réformes fiscales ont été retoquées. Même si l’on nous dit que la situation de l’emploi s’est améliorée en 2016, il y a 600 000 chômeurs de plus sur le mandat. Notre pays ne va donc pas mieux. L’industrie est l’un des pans qui souffre le plus. Aujourd’hui, on continue à désindustrialiser. Il faut exploiter le filon startups, mais elles se créent à la même vitesse qu’elles meurent. Et celles qui réussissent ne restent pas chez nous. Il y a là quelque chose à travailler.

Mais il se créé tous les jours des entreprises en France...

L’augmentation du nombre d’entreprises relève surtout des microentreprises et des autoentrepreneurs. Dans l’industrie, des grands groupes sont en train de licencier. Il nous faut donc une vision de reconquête. Il faut une visibilité sur la trajectoire. Faisons des plans d’avenir, investissons dans les énergies renouvelables, facilitons les investisseurs et allons-y !

Les métiers évoluent, quid de la formation ?

Elle est l’un des piliers de l’UIMM. Avec le campus de l’apprentissage nous aurons les moyens de former la main d’œuvre de demain. On ne parle plus maintenant de diplômes mais de compétences. Nous sommes en train de revoir le dispositif conventionnel. Les syndicats d’employés sont d’accord sur le principe de remettre en cause la qualification dans nos métiers. Nous serons en mesure de proposer une feuille de route qui corresponde aux attentes.

Loi travail : la pénibilité, c’est une usine à gaz ?

Alors que l’on parle de reporter l’âge de la retraite, il me parait de bon sens d’imaginer que quelqu’un qui a eu un travail usant sur le plan humain puisse partir avant. Mais les modalités de la loi pénibilité sont inapplicables. Nous proposons de remodeler l’approche de la médecine du travail, de lui donner une vraie valeur, un rôle fondamental dans la prise de décision sur les critères de pénibilité validés de manière paritaire.

Les 48 heures hebdo proposées par Fillon c’est sérieux ?

L’augmentation du temps de travail fait peur car les gens pensent que les patrons vont unilatéralement tirer la couverture à eux. Mais on est en train de changer radicalement de modèle, de société. La consommation n’y sera plus le maître mot, les gens veulent remettre l’humain au centre. La nouvelle feuille de route doit assouplir la trame pour que personne ne soit volé, ni l’employeur ni l’employé. 48 heures, c’est mettre la barre haut, cela doit se négocier avec nos partenaires. La souplesse sera le maître mot dans les entreprises de demain.

Le Brexit, une menace pour notre économie ?

L’Angleterre provoque une grande déstabilisation. Sa nouvelle approche des relations commerciales nous pose problème. Cela montre combien nous sommes fragiles, nous européens, face au reste du monde. Il nous faut arriver très vite à un consensus fiscal et social pour définir l’Europe de demain et lutter à armes égales avec les États-Unis et la Chine.

Donald Trump ?

Les plus pauvres, qui n’ont plus rien à perdre, ont été séduits par son discours populiste de reality show. C’est un avertissement pour nos démocraties, ne construisons pas l’avenir sur du rêve. Je pense qu’il reviendra sur certaines de ses annonces économiques, car le protectionnisme fait perdre du savoir et des marchés. Par la force des choses, il va réajuster son tir.

Un impact pour nos entreprises exportatrices ?

Au CES de Las Vegas, on a vu que les startups françaises prennent des parts de marchés non négligeables. Je ne suis pas inquiet, mais il faut s’adapter au nouveau business international.

- Union des Industries et Métiers de la Métallurgie
- 500 entreprises.
- 14 000 salariés dans le 06
- 3,7 milliards d’€ de chiffre d’affaires.
- 55 % à l’export.

Photos de l’article ; JMC

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