Économie : quel avenir

Économie : quel avenir pour la France ?

L’économiste Christian Saint-Etienne estime que l’économie française est fragile structurellement et qu’elle a besoin d’une "réindustrialisation massive" et de plus de travail.

Né en 1951, Christian Saint-Étienne a été économiste au FMI et administrateur à l’OCDE. Il a ensuite été professeur à l’université Paris-Dauphine (1991-2000) puis à l’université François Rabelais (2000-2009). Il enseigne depuis 2009 au Conservatoire national des arts et métiers où il est titulaire de la chaire d’économie industrielle. Il a écrit une vingtaine d’ouvrages dont le dernier, "Le libéralisme stratège contre le chaos du monde", est paru en août 2020.

"Globalement, aujourd’hui, on a une politique sanitaire qui est plutôt bonne. La politique économique qui a accompagné cette politique sanitaire a été, au démarrage, meilleure que la politique sanitaire, puisqu’on a mis très rapidement en place des instruments comme le chômage partiel. Cela a pu sauver entre 500 000 et 700 000 emplois", a-t-il analysé avant une conférence devant les adhérents de l’UPE06.

Problème structurel

"En relatif, la situation française ne s’est pas massivement dégradée au cours de ces deux (dernières) années. En revanche, ce qui me préoccupe, c’est la situation que nous avions au moment d’entrer dans la crise, qui était mauvaise et que nous n’avons pas corrigée. Sur le plan structurel et stratégique, je continue de penser que nous ne faisons pas ce qui est nécessaire".

Désindustrialisation

"En 2019, nous avions un double déficit : un très gros déficit public et un déficit extérieur préoccupant. Quelle est l’origine de cette crise ? C’est très clairement la désindustrialisation du pays. Je le dis depuis 15 ans. (…) Sur la période 1999-2019, (la France) a perdu 40% de (ses) parts de marché à l’exportation, ce qui est absolument colossal. C’est la pire crise de désindustrialisation en temps de paix depuis le début de l’économie moderne il y a deux siècles".

Déclassement

"Nous avons vécu depuis 15 ans un déclassement de l’économie française et l’appauvrissement est effectif. Un tiers de l’économie, et donc un tiers de la population active, est déclassé. Ce sont tous ces gens qui vous disent que les fins de mois sont difficiles. La France a subi un déclassement. Si on le nie, on ne peut pas s’en sortir. Dans les crises, la pire des choses c’est de nier la crise".

Réindustrialisation

"La seule façon de s’en sortir, c’est une réindustrialisation massive. Il est très important de comprendre que l’industrie change de sens à chaque révolution industrielle. Aujourd’hui, l’industrie, c’est tout ce qui marche avec des ordinateurs. C’est une mutation totale, qui n’est pas du tout intégrée. Pour moi, la banque et l’assurance, qui sont essentiellement de gros ordinateurs, c’est de l’industrie. Les services informatiques et d’ingénierie, c’est de l’industrie".

37 heures ?

"Si on veut sortir de cette situation structurelle difficile, il va falloir se remettre au travail. Les gens demandent du pouvoir d’achat et je pense que c’est une bonne chose mais il faut leur dire : il faut passer de 35 heures à 37 heures. Les gens veulent plus de pouvoir d’achat tout en restant à 35 heures, voire en passant à 32 heures, mais ce n’est pas comme cela que ça va se passer".

Choix

"On est à l’heure des choix, de choix stratégiques qu’on refuse de faire depuis 15 ans. Je pense que des ruptures vont nous forcer à faire ces choix. Il faut tous qu’on prenne nos responsabilités parce que l’ampleur de l’effort à faire après les ruptures, qui vont venir si on ne fait rien, c’est trois fois plus de souffrances que l’ampleur des efforts à faire avant la rupture".

Visuel de Une : L’économiste Christian Saint-Etienne S.G

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