Mis à la retraite d'office

Mis à la retraite d’office !

Ce que c’est que l’étourderie, tout de même...
Comme une bombe à retardement, provoquant des dégâts conséquents au moment le plus inattendu, une distraction a renvoyé dans ses foyers Jean-Paul Delevoye, ci-devant ex-ministre des retraites, qui avait omis de signaler un certain nombre de "mandats" - dont deux rémunérés - à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Pour le gouvernement, dans le timing, l’affaire tombe mal, alors que les Français sont obligés d’aller à pieds au travail depuis quinze jours, et qu’on leur promet des trains au dépôt pour les vacances de Noël. Exit donc Jean-Paul Delevoye, qui "incarnait" cette réforme rejetée par une large majorité.
Sur le fond, rien n’a changé. Les dommages collatéraux sont déjà conséquents. La rectification dans l’urgence de la "déclaration d’intérêts" de Delevoye ne s’est pas transformée par magie en un solde de tous comptes : l’opinion n’a pas besoin d’une étincelle supplémentaire pour s’enflammer.
Cette "affaire", qui dans un autre contexte serait passée inaperçue, met une nouvelle fois en évidence le décalage existant entre la France qui trime pour 1 521,22 euros brut par mois (quand elle a la chance d’avoir un travail), et les dirigeants. Delevoye, tellement occupé, avait juste oublié de déclarer un revenu de 5 000 euros mensuels, l’équivalent d’ un gain au loto pour beaucoup de gens. Dans ce contexte, il n’y a pas de "droit à l’erreur"...

Bon prince, Édouard Philippe a pourtant soutenu son ministre dans la tempête, lui réitérant sa confiance alors que le bateau tanguait déjà très fort.
Ce faisant, le Premier ministre a pris des risques évidents puisqu’en politique le symbole est toujours plus fort que les actes. Le voilà maintenant en première ligne sur les retraites, sachant que Jean-Paul Delevoye emporte avec lui la mémoire de deux années de discussions avec les syndicats.
Avec cette réforme mal préparée, mal expliquée, mal comprise et ressentie comme injuste, les "Gaulois réfractaires" ont trouvé une nouvelle occasion de chahuter le Père Fouettard des retraites, de jeter du vinaigre sur des blessures chaque jour plus saignantes. La mobilisation de mardi en dit long sur les craintes, toutes professions confondues.

Comment calmer la rue, faire admettre que cette réforme est - peut-être - le moindre mal dans une société où l’on vit de plus en plus vieux ?
Dans ses "malheurs", Jean-Paul Delevoye trouvera sans doute un peu de réconfort auprès des autres ministres également atteints d’une forme de phobie administrative. La liste en est assez longue, à commencer par Mme Belloubet, qui a oublié à son entrée au gouvernement de faire figurer des logements dans sa déclaration de patrimoine, ainsi que pour onze autres membres du gouvernement.

Tout cela fait assez désordre.

Si Jean-Paul Delevoye, qui a maintenant du temps devant lui, écoute une radio nostalgique spécialisée dans les anciennes chansons, il sera forcément "tombé" sur la vieille ritournelle d’Eddy Mitchell "J’ai oublié de l’oublier..." qu’il fredonne peut-être le matin en enfilant ses chaussettes (noires).

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