Objectif 2025

Gouverner, c’est prévoir. En foi de quoi France-stratégie a été chargée, par l’Elysée, de réfléchir aux grands enjeux pour notre pays sur la décennie à venir. Il en résulte un intéressant rapport, solidement étayé dans l’analyse de nos faiblesses. Mais plus évasif sur les pistes de redressement.

Il y avait autrefois le Commissariat général au Plan, institué par de Gaulle au lendemain de la Deuxième guerre. Le principe de la planification « à la française » fut toutefois ébauché sous le régime de Vichy : un plan indicatif et incitatif afin d’orienter les investissements prioritaires pour la croissance. Pas un plan directif à la soviétique. Pourtant, afin de gommer sa connotation bolchevique, l’organisme fut rebaptisé Centre d’analyse stratégique en 2006. Puis transformé l’année dernière en Commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP), un libellé supposé plus approprié aux ambitions de cette législature. La direction du Commissariat a été confiée à Jean Pisani-Ferry (fils de l’ancien ministre Edgard Pisani et arrière-petit-neveu de Jules Ferry), un familier des machins économiques : il a dirigé le CEPII, présidé le Conseil d’analyse économique, participé à la création de Bruegel et dirigé ce think tank bruxellois, polarisé sur les politiques économiques et efficacement financé par les Etats-membres de la Zone euro, en association avec autant d’entreprises multinationales.

C’est donc à Jean Pisani-Ferry que le président de la République a confié, dès l’été dernier, un « travail de réflexion sur les grands enjeux à dix ans pour la France ». En conformité avec l’objet du CGSP, qui « apporte son concours au Gouvernement pour la détermination des grandes orientations de l’avenir de la nation ». Telle est l’évolution de la gestion publique : en son temps, les politiques se faisaient élire sur un programme qui définissait les « grandes orientations pour la nation » - sans pour autant le respecter scrupuleusement une foi installés, convenons-en. Désormais, l’élection est une sorte de concours de beauté, selon le modèle développé par Keynes, et l’heureux élu charge les technocrates-experts de fabriquer une politique qui aille bien avec son costume. Si l’on en croit le quotidien Les Echos , Jean Pisani-Ferry serait un « social-démocrate convaincu », à ce titre d’une grande proximité intellectuelle avec notre Président. Pour preuve, c’est lui qui aurait inspiré le recrutement de Laurence Boone, débauchée de Bank of America pour occuper le poste de conseiller économique et financier de l’Elysée. Pourtant, si l’on en juge à ses écrits, Laurence serait plutôt une libéralo-libérale très convaincante, se situant sur l’échiquier politique quelque part à la droite de Gengis Khan…

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