Patrick Moulard (BTP) :

Patrick Moulard (BTP) : « dans les A-M, la situation est très compliquée »

Ne parlez surtout pas à Patrick Moulard, vice président du BTP-06, de la prime de mille euros défiscalisée et sans charges sociales pouvant être versée aux salariés qui « ont eu le courage de se rendre sur leur lieu de travail  » pour reprendre les mots de Bruno Le Maire. Cette annonce du ministre de l’E-Économie le fait tomber de sa chaise : «  Mais qu’est-ce que cela veut dire ? Que l’on cherche des mercenaires ? Des gens qui seraient prêts à risquer la contamination pour une prime ? Ce n’est pas sérieux ! Notre première responsabilité, notre première préoccupation comme employeurs, c’est de garantir la sécurité de nos salariés  ».

Comme Philippe Renaudi, président de l’UPE-06, qui dès hier tirait la sonnette d’alarme pour les métiers du bâtiment (et pour les autres secteurs), Patrick Moulard constate a minima des distorsions dans des messages envoyés par l’État, des demandes contradictoires qui exigent à la fois le confinement et la reprise du travail...?
Comme entrepreneur du bâtiment, il estime que «  cela ne se passe pas très bien. À titre d’exemple, pour mes propres entreprises, on a été obligés de suspendre toute production sur les chantiers parce que l’on ne veut pas exposer nos salariés au risque du coronavirus. Mais dans le même temps, nous faisons partie des entreprises qui ont une obligation de continuité de service dans l’installation électrique, donc nous honorons nos contrats de maintenance pour certains clients pour qui nous avons des astreintes  ».

Le pilotage à vue… par temps de brouillard est donc la réalité quotidienne des sociétés maralpines qui, dans leur grande majorité, ont mis leur personnel en chômage technique.

Grosse tension dans le secteur du BTP, le gouvernement reprochant un arrêt des chantiers BTP, alors que les employeurs ne peuvent pas assurer leur obligation de sécurité (DR JMC)

« Je ne vous cache pas que nous avons été très surpris des annonces de notre ministre du Travail Mme Pénicaut lorsqu’elle nous a dit qu’elle ne comprenait pas pourquoi nous avions arrêté de travailler sur les chantiers. Maintenant, des discussions sont actuellement en cours à Paris entre nos instances et le gouvernement. Nous travaillons à trouver des pistes autour de l’adaptation des postes de travail pour reprendre l’activité, en tout cas c’est le but qui est recherché. Notre fédération est quand même très réservée sur ces questions. Car même s’il ne faut pas forcément de masque – c’est ce qui semble se dessiner à l’heure où je vous parle (vendredi 17 heures) - il faudrait réaliser une prise de température des collaborateurs tous les jours. On veut bien, mais ce sera compliqué à mettre en œuvre, et cela représente une responsabilité complémentaire qui n’est pas neutre. Il ne faut certes pas bloquer la machine économique, mais tous les chefs d’entreprise sont-ils en mesure de prendre cette responsabilité ? Pas sûr ! De plus, nous ne sommes même pas certains que les salariés veuillent prendre le risque d’aller travailler  ».

M. Moulard indique qu’il y a eu dans ses équipes un cas de contamination possible. « Dans le doute, j’ai tout arrêté, je n’ai pas voulu prendre le moindre risque. Les autres entrepreneurs réagissent comme moi. Mardi, nous aurons une ébauche du plan de prévention pour le bâtiment que nous préparons avec le ministère. Nous écrivons la liste de ce qui est réalisable, mais dans la mesure où déjà il n’y a pas de masques, ce sera forcément compliqué. Autre exemple, il est question qu’il n’y ait plus deux personnes dans la même voiture pour aller sur un chantier, mais toutes les entreprises n’ont pas forcément assez de véhicules à disposition. Il faudrait donc demander aux employés d’utiliser leurs voitures, vous voyez la complexité »…

Photo de Une DR

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