Qu'il est rassurant (...)

Qu’il est rassurant parfois de se faire enguirlander...

Chassez le naturel... Même s’il a annoncé avoir changé et beaucoup appris de l’exercice du pouvoir, Emmanuel Macron ne peut se défaire de cette manie détestable de donner des leçons sur un ton péremptoire.
Dernière épisode en date, la "remontée de bretelles" accordée publiquement à Beyrouth, et devant les caméras de télévision, au grand reporter du Figaro Georges Malbrunot, pourtant fin connaisseur du Moyen-Orient. Le président l’a accusé d’irresponsabilité pour avoir transcrit des propos qu’il a échangés avec le chef du Hezbollah pour essayer de convaincre ce dernier de s’engager sur la voie d’une réforme politique.
Qu’un président fasse une leçon de journalisme à un représentant (qui plus est réputé et respecté) de la profession, voilà qui est cocasse sinon déplacé. Le job du reporter consiste à rapporter et à analyser, même si cela chatouille ou cela grattouille.
Dans le cas présent, aucun démenti sur la véracité des propos n’a été publié par la suite. Malbrunot n’étant pas un employé du Quai d’Orsay, il était donc dans son bon droit de faire son devoir, celui d’informer ses lecteurs, n’en déplaise à l’élysée, qui a tort d’en appeler à une certaine forme d’auto-censure.
Mais comme en Macronie rien n’est jamais simple, ce président qui tance la presse est aussi celui qui "en même temps" la défend. Et pas seulement à l’occasion de petites querelles de salon, comme il en a trop souvent l’habitude. Alors que Charlie Hebdo a republié les caricatures de Mahomet à l’occasion de l’ouverture la semaine passée du procès des attentats, Emmanuel Macron a pris clairement position lors d’une conférence de presse pour le droit au blasphème, consubstantiel de la liberté des consciences. Certains penseront que, dans le climat actuel, il n’était pas besoin de jeter de l’huile sur le feu. Mais le courage a justement consisté à réaffirmer les valeurs de notre République qui garantit à tous les libertés d’expression et de culte qui manquent tant dans les états théocratiques fusionnant droit divin et loi civile.
Ce caractère vif argent - qui fait la marque de ce président comme celle de Nicolas Sarkozy avant lui - a pourtant déjà valu à Emmanuel Macron quelques bonnes volées de bois vert, à l’image de la scène du sac dans Les Fourberies de Scapin. Comme lorsqu’il avait dit à un jeune homme qu’il suffirait de traverser la route pour trouver un emploi...
Au risque (assumé) de se faire enguirlander, toutes les vérités ne sont sans doute pas "agréables" à dire, à écrire et à lire. Se priver de cette liberté serait renier la démocratie, dont on sait bien depuis Churchill qu’elle est "le pire des régimes à l’exception de tous les autres".

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