La loi de Finances (...)

La loi de Finances 2020 analysée par le CROEC

Comme un artiste qui ne lasserait jamais son public, Jean-Pierre Cossin, conseiller maître à la Cour des Comptes et professeur associé à l’Université de Paris 12, est (re)venu une nouvelle fois décortiquer devant les experts-
comptables des Alpes-Maritimes la Loi de Finances, celle de 2020. Ou plutôt débusquer la petite bête qui se cache entre les lignes, présenter les nouveautés, les mettre en perspective... Un exercice de style bien rôdé, drôle parfois, sur un sujet pourtant aride, mais qui concerne au premier chef les experts-comptables et leurs clients.

Cette "tournée", organisée par le CROEC-Paca et relayée par la commission administrative présidée par Sylvie Roulle, est passée par Sisteron, Marseille, Toulon, Avignon, Aix et Cagnes-sur-Mer, au casino Terrazur, dont la grande salle de conférence affichait complet mercredi soir.

Heureusement que cette Loi de Finances "est pauvre" selon Jean-Pierre Cossin, qui l’a commentée pendant deux heures.
"Pauvre", parce que l’année dernière a vu l’application de grandes réformes, dont le prélèvement à la source. La loi 2020 voit cependant l’IR des particuliers baisser (taux de 11% au lieu de 14%), ce qui concerne douze millions de foyers qui vont économiser 250€ en moyenne par rapport à l’an dernier pour les mêmes revenus. Une baisse dont sont exclus les hauts revenus : "il est prévu que leur contribution exceptionnelle, créée en 2011, sera supprimée quand le budget sera équilibré. C’est-à-dire dans un siècle ou un millénaire"... En revanche, la prime pouvoir d’achat "gilets jaunes" défiscalisée et sans charge ne pourra être versée que dans les entreprises ayant un accord d’intéressement, ce qui exclut la plupart des TPE et PME...

Domiciliation fiscale des dirigeants de grandes entreprises (+ de 250 M€ de CA) désormais réputés comme exerçant leur activité professionnelle en France, élargissement du dispositif Denormandie, "grandes optimisations et petits mécanismes fiscaux", fiscalité des entreprises, baisse de la taxe d’habitation (mais révision des valeurs locatives programmée d’ici 2026), contrôles fiscaux avec exploitation des réseaux sociaux qui peuvent dénoncer un train de vie, intelligence artificielle utilisée par Bercy... Pas étonnant que Jean-Pierre Cossin soit à la fois intarissable sur le sujet et passionnant !

Lionel Canesi taille des costards bien ajustés

Lionel Canesi, président du CROEC-Paca, s’est montré très "punchy" pendant son intervention devant l’assistance. En attaquant directement la présidence nationale, coupable d’inaction à ses yeux. "Jamais, au cours des dernières années, nous ne nous sommes résignés à devenir de simples supplétifs des services fiscaux. Car nous sommes aux côtés des chefs d’entreprises au cœur du réacteur. Certains, y compris dans nos rangs, y compris au plus haut niveau, voudraient que l’on subisse, que l’on accepte que des lois soient votées sans que nous soyons consultés. C’est à mes yeux insupportable, indécent, inacceptable ! Je dénonce l’attitude passive, couchée et complaisante que le Conseil supérieur a adoptée". Il a stigmatisé "une action tellement discrète qu’elle disparaît. Le ton est complaisant, le lobbying se résume à quelques rendez-vous en ville".
Lionel Canesi a dénoncé ensuite une réforme des retraites injuste, dans laquelle "notre représentation nationale brille par son absence, où il y a une fausse concertation et un hold-up annoncé sur les régimes autonomes. Ceux-ci sont bien gérés, ne coûtent rien et sont en plus solidaires en versant chaque année près d’un milliard d’euros à la collectivité nationale. Je demande solennellement à l’ensemble des experts-comptables de Provence Alpes-Côte d’Azur de refuser d’établir les comptes de campagne" (des candidats aux élections municipales, ndlr).
Il a conclu en interpellant la profession sur les grandes évolutions sociétales qui ont des répercussions humaines, managériales et technologiques. Avant d’annoncer qu’il sera candidat à la présidence nationale en novembre prochain, mais cela tout le monde l’avait déjà compris dès avant la fin de son discours...

Photo de Une : Jean-Pierre Cossin (DR JMC)

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