Les experts-comptables

Les experts-comptables au premier plan face à l’urgence

Depuis hier, les cabinets d’expertise-comptable doivent répondre à une demande exponentielle de leurs clients, touchés de plein fouet par l’épidémie de Covid-19 et le confinement - qui limitent voire paralysent complètement leurs activités. Nous avons pris contact avec Mariem Mimouna à la tête du Cabinet Direxion à Cagnes sur Mer et présidente du CJEC Côte d’Azur Corse, pour qu’elle nous explique comment elle et de façon générale les experts-comptables se mobilisent dans cette période exceptionnelle.

Dans quel état d’esprit êtes-vous ?

Si j’ai un mot en tête, je dirai « urgence ». Nous sommes vraiment en train de gérer des cas d’urgence. Nous nous considérons en quelque sorte comme des urgentistes des chefs d’entreprises. Nous traitons toutes les demandes des clients pour appliquer les mesures exceptionnelles que le gouvernement a mis à leur disposition.

Comment se matérialise la gestion de ces urgences ?

Chaque cabinet met en place sa propre procédure. En ce qui nous concerne, un questionnaire en ligne est disponible pour gérer les premières urgences dans lequel on jauge un peu l’activité de notre client. Cela nous permet de voir si son activité est à l’arrêt, s’il a des salariés, s’il a des assurances en place… À partir de ces premières indications, nous l’accompagnons.

Que leur proposez-vous pour faire face à ce qui arrive ?

Ils ont la possibilité de mettre en place du chômage partiel pour leurs salariés, nous les accompagnons pour avoir des délais de paiement auprès des banques et des fournisseurs. Nous proposons de les aider dans l’échelonnement des cotisations sociales personnelles et salariales. Ça s’apparente à de la médecine d’entreprise.

Quel est votre rôle auprès des responsables d’entreprises ?

Déjà il faut leur faire passer les informations. De nouvelles actualités sortent quotidiennement avec la mise à jour régulière du Journal Officiel. Il nous faut tenir compte des nouvelles mesures qui concernent nos clients, les décrypter, et les transmettre à nos clients. Ensuite, nous sommes vraiment dans une démarche personnalisée et c’est le cas pour les autres cabinets que je connais. Tous ont ouvert une cellule de crise. On a mis en pause tout ce qui est "formalités classiques", à savoir tout ce qui tient du déclaratif puisqu’on a eu une suspension temporaire des déclarations. Enfin on prend aussi le temps d’écouter, car les chefs d’entreprises ont un vrai besoin d’être rassurés.

Sentez-vous une forme de panique chez vos clients ?

Oui, je pense sincèrement que le nerf de la guerre c’est la trésorerie. Donc les clients ont très peur puisqu’ils vont prochainement devoir affronter le règlement des charges fixes, que ce soient les loyers, leurs assurances, EDF mais aussi le règlement des salaires et des indemnités auxquelles vont avoir droit leurs salariés. Tout ça face à un chiffre d’affaires en très net ralentissement pour ne pas dire nul.

Des solutions existent pour limiter ces problèmes de trésorerie ?

Tout à fait, des prêts ont déjà été octroyés par la Région, des garanties sont données par la Banque publique d’investissement (Bpifrance) pour négocier les facultés de paiement auprès des banques. Notre rôle est d’aiguiller notre client dans tout ce qui existe en lui fournissant les attestations dont il va avoir besoin.

Les entreprises ont-elles déjà pris des mesures ?

La plupart du temps c’est déjà le cas. Les entreprises qui ont des salariés avec une activité à l’arrêt privilégient le chômage partiel. C’est d’ailleurs la plus grosse demande à laquelle nous répondons actuellement. L’arrêt pour garde d’enfant est aussi très demandé avec une plus forte requête chez les femmes même si les hommes ont tout à fait le droit d’y recourir. Nous faisons des attestations classiques auprès de la CPAM pour que le salarié puisse être indemnisé.

Quelles vont être les prochaines mesures importantes à prendre dans les semaines à venir ?

Le deuxième gros volet phare va être la sollicitation de la Banque Publique d’Investissement pour l’octroi de prêt et de facilité de paiement.

Les différentes annonces gouvernementales suffisent-elles à donner confiance en l’avenir aux chefs d’entreprise ?

Les entrepreneurs ont peur car ils n’ont aucune visibilité. Un chef d’entreprise a l’habitude de travailler avec un tableau de bord, moyen et long terme. Là on se retrouve à lui donner des solutions à court terme uniquement, donc forcément ça bouleverse sa manière de visualiser l’avenir et ça le fait paniquer. Nous savons très bien que les entrepreneurs sont en attente de solutions un peu plus importantes.

Comment le chef d’entreprise peut rentrer en contact avec votre cabinet ?

Nous sommes complètement ouverts pour nos clients, mais sans réception physique. Le travail s’effectue via un poste dématérialisé et beaucoup en phoning. Nous avons également réduit au maximum nos déplacements qui peuvent être repoussés à un peu plus tard.

Propos recueillis Par Kévin Sanchez

Photo de Une DR et courtesy Mariem Mimouna

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