Le Medef se prépare à (...)

Le Medef se prépare à une victoire de François Hollande

Bien que plutôt partisans de Nicolas Sarkozy, les grands patrons ne seraient pas mécontents de travailler avec un gouvernement de gauche. Le Medef vante les qualités de dialogue de François Hollande.

Quel que soit le résultat de l’élection du 6 mai prochain, le Medef affichera une bonne humeur de circonstance. Certes, la majorité des patrons et dirigeants d’entreprise font probablement partie des 27% d’électeurs qui ont voté pour Nicolas Sarkozy le 22 avril. Nul ne doute qu’ils soutiendront à nouveau leur champion deux semaines plus tard. Mais les instances du Medef s’accommoderaient sans trop de difficultés de la victoire de François Hollande, arrivé en tête avec presque 29% des suffrages.
« Nous sommes prêts à travailler avec le prochain gouvernement, quel qu’il soit », annonçait, le mardi précédant le premier tour, une Laurence Parisot tout sourire, qui n’hésitait pas à proclamer son « impatience ». La présidente du Medef a adressé, ce jour-là, un joli éloge au candidat socialiste. Le patronat « partage avec François Hollande l’idée que les corps intermédiaires sont utiles », affirme-t-elle. A l’évidence, le Medef n’a pas apprécié la manière dont le président sortant a décrié, à plusieurs reprises, les « corps intermédiaires », organisations professionnelles, syndicats et autres associations.
Laurence Parisot regrette cependant de n’avoir pu croiser, avant le premier tour, le candidat socialiste. « J’aurais souhaité un échange, mais cela n’a pas été possible », déplore-t-elle. Dans l’entourage du candidat, on affirme qu’une telle rencontre aurait pu être organisée. Et si ce n’est pas le cas, la patronne du Medef ne peut s’en prendre qu’à elle-même. Le 30 mars, au micro d’Europe 1, Laurence Parisot louait en effet « le boulot extraordinaire » de Nicolas Sarkozy, célébré pour avoir « remis la France en mouvement ». Au PS, on a modérément apprécié cette sortie. D’autant que la patronne des patrons en profitait pour qualifier, dans un même souffle, Jean-Luc Mélenchon d’« héritier de la Terreur ». Les piques brandies par les partisans du Front de gauche sur la place de la Bastille, lors de son meeting en plein air, le 18 mars, ont manifestement impressionné la patronne des patrons. L’entourage du candidat socialiste avait alors soupçonné Laurence Parisot de jouer sciemment de la peur qu’inspire le communisme dans les beaux quartiers. De leur côté, les partisans de Jean-Luc Mélenchon en profitaient pour se positionner en opposants farouches du patronat. Leur champion progressait alors encore un peu dans les sondages, avant de retomber à 11% lors du scrutin de dimanche.

Déficit zéro

Avant le premier tour, et la nouvelle poussée du Front national, Laurence Parisot se vantait d’avoir imposé quelques thèmes de campagne. « Le conseil exécutif du Medef se réjouit d’avoir installé un concept très peu présent en 2007, celui de compétitivité », déclarait-elle. Si Nicolas Sarkozy a fait de ce concept « un thème central » de sa campagne, François Hollande « reconnaît qu’il y a des efforts à faire en matière de compétitivité », souligne-t-elle. De même, les deux finalistes ont affirmé « leur exigence d’un déficit zéro », se félicite la présidente du Medef, qui espère cette échéance pour 2015, alors que le président sortant l’a promise en 2016 et le candidat socialiste en 2017. Mais qu’importe la date, « la musique est douce à nos oreilles », estime Laurence Parisot.
Le patronat regrette en revanche l’absence, dans la campagne, de plusieurs sujets qui lui sont chers. La question européenne a été pratiquement éludée par la plupart des candidats avant le premier tour. Les seuls qui ont évoqué l’UE, à l’extrême-droite ou à l’extrême-gauche, prétendaient surtout en dénoncer les risques. De même, « la question du numérique, pourtant fondamentale, a été incroyablement oubliée », déplore la présidente du Medef. Enfin, il a manqué selon elle, dans les semaines passées, « l’éloge de l’entrepreneur, le sel de la terre, qui permet de rendre le terreau de l’économie plus fertile ».

Hollande et Parisot s’évitent

Même si le second tour ne semble pas totalement joué, l’après-6 mai est déjà dans les têtes. Le programme des négociations entre partenaires sociaux a même été fixé : « modernisation du dialogue social, qualité de vie au travail, égalité hommes-femmes, employabilité », annonce-t-on au Medef. Le patronat se prépare aussi au « coup de pouce » que François Hollande devrait donner au Smic dès le début de l’été s’il est élu. Certes, une augmentation du salaire minimum, « si elle n’est pas liée à des gains de productivité, pourrait poser des problèmes pour la pérennité de l’entreprise », avance Laurence Parisot, avant de se rassurer aussitôt en rappelant que le candidat socialiste avait promis que cette évolution « ferait l’objet d’une concertation ».
D’ici là, la patronne des patrons et le nouveau président se seront-ils rencontrés ? « Nous aurons peut-être cette occasion… », indique Laurence Parisot, « avant le 6 mai », ajoute-t-elle vite, comme pour démentir l’idée qu’elle parierait un peu trop visiblement sur son élection.

Sociologie électorale

Le 22 avril, la gauche s’est mobilisée, comme en atteste la première place donnée à François Hollande dans les urnes et le score honorable de Jean-Luc Mélenchon. Le total des voix de gauche atteint 44%, contre seulement 35% en 2007. Mais la droite, avec l’extrême-droite, demeure en tête, recueillant 47% des voix. La France, traditionnellement, vote à droite. Ce n’est qu’à la faveur d’un fort rejet d’un président sortant, ou lorsque le candidat socialiste parvient à créer une alchimie, que la gauche peut espérer l’emporter. Ces deux conditions sont-elles réunies ? Réponse le 6 mai prochain.

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