Municipales : comment

Municipales : comment communiquer sans risque juridique en période préélectorale ?

Durant la période dite « préélectorale », qui a commencé le 1er septembre et ne s’achèvera que lors du scrutin des élections municipales, prévu les 23 et 30 mars 2014, le Code électoral encadre la communication des communes ainsi que celle des candidats. L’enjeu est de taille : la méconnaissance d’une des règles est susceptible d’entraîner l’annulation du scrutin et la condamnation pénale des auteurs des infractions.

Ces règles s’ajoutent à celles qui encadrent le financement des campagnes électorales. Les équipes sortantes et les nouveaux candidats doivent maîtriser quelques règles élémentaires et éviter certains écueils.

Inutile de cesser de communiquer. Pendant la période préélectorale, il n’est nullement question d’interdire aux communes de continuer à fonctionner et à communiquer. L’encadrement de la communication durant cette période vise au contraire à le permettre, en imposant simplement une communication objective et mesurée, qui ne détourne pas les moyens des communes au profit des candidats et qui ne porte pas atteinte à l’égalité des candidats.
Le contenu du bulletin municipal doit s’inscrire dans la continuité des précédents bulletins. Il ne doit donc pas comporter, soudainement, un nombre de photographies du maire plus important qu’à l’habitude ou une présentation renforcée des moindres réalisations de la commune, etc…

Contrairement à une idée reçue, il n’est nullement interdit aux maires de poursuivre leurs habituels éditos, dès lors qu’ils sont dépourvus de toute polémique et de toute allusion aux élections municipales. De même, l’opposition conserve son droit à publier une tribune dans le bulletin municipal. Les communes qui décident de suspendre ces tribunes des groupes politiques dans le bulletin municipal croient bien faire mais elles violent probablement l’article L2121-27 du Code général des collectivités territoriales.

Aucune publicité commerciale. L’article L 52-1 du Code électoral interdit formellement toute publicité commerciale à des fins de propagande électorale, par voie de presse ou par tous moyens de communication audiovisuels. Il est ainsi interdit à tous les candidats d’acheter des encarts publicitaires dans la presse, des affiches publicitaires etc… Mais la publicité commerciale dépasse les traditionnelles publi-informations.

Même gratuite, une campagne de communication peut être considérée comme de la publicité commerciale. Ainsi, un candidat qui bénéficie gratuitement d’un espace dans un journal, pour procéder à une publicité pour sa liste, se rendrait coupable de l’infraction de publicité commerciale interdite. Même un bulletin municipal est considéré comme un organe de presse à travers lequel un candidat est susceptible de réaliser une publicité commerciale interdite. En revanche, sont autorisées toutes les communications opérées sur des supports réalisés et diffusés par le candidat (tract, journal du candidat etc…).

La publicité commerciale interdit également l’usage des bannières publicitaires, des espaces commerciaux ou l’achat de mots-clés sur Internet destinés à rediriger le trafic vers le site du candidat. A titre dérogatoire, elle est autorisée pour solliciter des dons, et uniquement avec cet objet (art. L 52-8 du Code électoral).

Pas de campagnes de promotion des réalisations ou de la gestion d’une commune. L’article L 52-1 du Code électoral interdit aux communes de procéder à des campagnes de promotion publicitaire, de leur réalisation ou de leur gestion, en période préélectorale. Les candidats peuvent procéder à un tel bilan avantageux à leurs frais, mais la commune ne peut, en aucun cas, prendre à sa charge la réalisation d’une telle communication au service de la liste sortante.

Cette interdiction rend particulièrement délicate la communication des communes pendant les six mois de la période préélectorale. La jurisprudence se montre pragmatique et n’interdit nullement aux communes de procéder au bilan de leur action.
La règle de conduite consiste à s’assurer que ce bilan reste objectif et ne présente pas les réalisations ou la gestion sous un angle avantageux. Les tribunaux vérifient également si le bilan était traditionnellement réalisé chaque année ou s’il s’agit d’une démarche exceptionnelle justifiée par la période préélectorale. L’antériorité revêt donc une grande importance. Les communes doivent donc s’abstenir de toute communication inhabituelle (bulletin municipal supplémentaire, supplément exceptionnel etc…) et/ou qui présente un bilan élogieux des actions de la commune.

La communication de l’opposition encadrée. L’opposition, elle aussi, est concernée par l’encadrement de la communication, en période préélectorale, et notamment par l’interdiction des publicités commerciales.
Par ailleurs, il est jugé que le maire ne peut s’opposer à une tribune de l’opposition ou procéder à une quelconque censure et qu’en outre cette parution ne constitue pas un avantage en nature procuré par la commune, qui serait constitutif d’un don prohibé par le Code.

L’organisation des manifestations. Les communes doivent également être vigilantes sur l’organisation d’événements, de manifestations ou d’inaugurations pendant cette période préélectorale, qui pourraient en effet être considérés comme un moyen détourné de propagande électorale, aussi bien par l’organisation de l’événement lui-même que par la promotion ou la communication qui pourrait être réalisée autour.
Là aussi, le juge vérifiera la sincérité de l’événement. Par exemple, l’inauguration d’un bâtiment, en présence d’un ministre, plus d’un an après son ouverture, a été jugée comme une manœuvre de propagande électorale. De même, l’organisation des événements ne doit pas revêtir une ampleur particulière en raison de l’approche des élections. Le traditionnel banquet de Noël des anciens de la commune devra par exemple s’inscrire dans la continuité des années précédentes. Le colis offert par la municipalité aux anciens ne devra pas être plus généreux qu’à l’accoutumée, ni être accompagné d’un mot mettant particulièrement en valeur la personnalité du maire sortant.

Sous la réserve de ces quelques précautions élémentaires, les communes pourront continuer à communiquer et à travailler, même pendant la période préélectorale, sans encourir de suspicion d’un détournement des moyens de la commune au profit du maire sortant. En cas de méconnaissance d’une des règles, le tribunal administratif, s’il est saisi par le préfet ou directement par une liste ou un candidat battu, appréciera s’il y a lieu d’annuler l’élection ou non. Pour cela, il tiendra compte principalement de l’écart de voix mais également d’une série d’autres critères.

Carte de vœux

La diffusion des cartes de vœux peut être considérée comme un élément de propagande électorale. La diffusion de ces cartes doit donc s’inscrire dans la continuité des précédentes années, aussi bien pour le nombre de destinataires que le contenu du message ou sa présentation. Aucune allusion aux élections ne doit y être faite.

Sites internet et réseaux sociaux

En la matière, la règle d’or est l’étanchéité totale entre le compte ou le site de la commune et ceux des candidats. Aucun lien de redirection ou bandeau publicitaire ne doit se trouver sur le site ou le compte de la commune, bien évidemment. Il est jugé qu’un site Internet ne constitue pas une publicité commerciale dès lors qu’il n’est accessible qu’aux personnes qui se connectent volontairement. Il en serait différemment si le candidat avait diffusé sur le Net et des liens de redirection ou acheté des mots-clés etc…

Visuel : © Frédéric Bisson

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