Albion à la diète

Albion à la diète

« Le gouvernement va avoir besoin de nerfs solides pour tenir ses engagements, et quatre ans, en politique, c’est horriblement long » note The Economist dans son éditorial. C’est à la Grande-Bretagne qu’il est fait référence, bien sûr, et au budget présenté par le nouveau Chancelier de l’Echiquier. L’hebdomadaire fétiche de la City de Londres applaudit des deux mains la thérapie de choc de Mr Osborne, qui va reléguer Mrs Thatcher au rayon des dirigeants communistes du fief de Sa Très Gracieuse Majesté. Certes, les Anglais ne s’étant toujours pas excusés d’avoir carbonisé la seule Pucelle que comptât alors le Royaume de France, on serait tenté de considérer le fléau qui les attend comme une juste punition du Ciel – un peu tardive, mais les tribunaux divins sont aussi encombrés que leurs homologues séculiers. Mais ce serait faire preuve d’une rancune excessive. L’exemple britannique devrait, au contraire, relativiser la dureté des mesures que notre propre gouvernement entend imposer, lesquelles, par comparaison, illustrent plutôt une austérité popote.

Les coupes budgétaires de George Osborne se font à la cognée des bûcherons de la forêt d’Elseneur : l’effectif des fonctionnaires éclairci à la débroussailleuse ; les dépenses sociales décapitées à la tronçonneuse ; l’âge de la retraite emprisonné jusqu’à 66 ans ; les impôts majorés à la fourche, en ce compris ceux payés par les hauts revenus. Un vrai tsunami gestionnaire que le pays n’avait pas connu depuis 1918 – avec les résultats désastreux que l’on connaît. Si bien que le Nobel d’Economie Stiglitz ne se mouille pas trop en déclarant : « Une fois de plus, cette politique devrait démontrer qu’une cure d’austérité en pleine crise n’aboutit qu’au recul du PIB et à la hausse du chômage  ». Bien vu, Joseph : c’est en effet ce qui devrait se produire. Avec à la clef des désordres sociaux qui pourraient faire passer nos manifestations pour un chahut de cour de récréation. Sans pour autant rééquilibrer les comptes publics, même avec le concours de la Banque d’Angleterre qui va faire tourner ses rotatives : la livre est promise à une grosse gamelle, quand les créanciers du pays auront compris qu’ils vont se faire lessiver. La Grande-Bretagne a toujours fait le choix du cousinage américain contre la promiscuité roturière des Européens. Sa loyauté familiale va lui coûter cher, maintenant que l’Oncle d’Amérique est décavé. The Economist est sans doute trop modéré : quatre ans, ce n’est pas "horriblement long". C’est une éternité.

La recette du jour

Pudding Osborne

Procédez comme il est dit dans la recette du pudding à la graisse de rognons. Mais remplacez la farine par du sable de la Tamise, le pain par des pluches de pommes de terre et la graisse de rognons par de l’huile de vidange. Attendez que des voitures soient incendiées dans votre quartier pour le cuire sans bourse délier. Puis exigez le retour de Mrs Thatcher pour obtenir un peu d’humanité.

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