Bath, la blatte !

Bath, la blatte !

Découvrir un cafard chez soi déclenche toujours un début de panique. C’est un insecte répugnant qui squatte volontiers les égouts et qui vit en colonies. Comme dit l’autre, quand il y en a un, ça va ; c’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes. Et il y en a toujours beaucoup. Le cancrelat prolifère depuis au moins 400 millions d’années et vivra longtemps après que l’homme aura disparu : cette foutue bestiole encaisse sans broncher un mois de diète complète ; elle résiste étonnamment à des radiations dix fois plus puissantes que celles qui terrassent l’homo sapiens ; elle survit plus d’une semaine à la décapitation : voilà pourquoi la guillotine ne figure pas dans la panoplie anti-blattes. Et ce serait folie de vouloir exterminer l’espèce. Car une équipe de chercheurs de l’Université de Nottingham vient de découvrir ce que les Chinois et les Grecs anciens savaient déjà : le cafard est une sorte de pharmacie ambulante. Son cerveau et ses tissus nerveux contiennent au moins neuf molécules capables, en particulier, de zigouiller le staphylocoque doré, cette véritable hantise des milieux hospitaliers qui résiste aux antibiotiques les plus puissants et que l’on ne peut vaincre sans générer des dommages collatéraux importants chez le patient.

Selon les spécialistes de l’Université britannique, la découverte n’est pas surprenante : « Ces insectes vivent souvent dans de très mauvaises conditions sanitaires et d’hygiène, dans des environnements où ils sont exposés à un grand nombre de bactéries différentes. Il est donc logique qu’ils aient développé des moyens de se protéger contre les micro-organismes ». Voilà donc une information capitale. Depuis que nous sommes obsédés par une hygiène scrupuleuse qui nous fait nous récurer de pied en cap plusieurs fois par jour ; depuis que les chipotages de la diététique constituent l’essentiel de nos préoccupations ; depuis que la quête inlassable d’un meilleur confort a supplanté celle du Graal, nous sommes devenus plus fragiles qu’une porcelaine de Saxe. C’est malin : un véritable suicide collectif. Ah, çà ! Pour mieux perpétuer notre espèce, il nous faudrait une bonne crise. Qui nous oblige à vivre comme des blattes. Que l’on se rassure : avec un peu de chance, nous serons bientôt exaucés.

La recette du jour

Cancrelats à la gnole

Vous êtes légitimement préoccupé par votre longévité. Vendez votre demeure aseptisée et déménagez dans l’égout le plus proche. Investissez dans un élevage de cancrelats, que vous dégusterez grillés après avoir anesthésié vos papilles gustatives d’un bon coup de gnole. Vous mourrez peut-être de dégoût, mais au moins ferez-vous la nique à cette cochonnerie de staphylocoque doré.

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