Plaidoyer pour la gabelle

Plaidoyer pour la gabelle

Bien que la Suisse ait subi les effets redoutables du changement climatique, depuis que les capitaux ne bénéficient plus que rarement d’une météo paradisiaque, le pays continue d’afficher une belle prospérité. Ainsi que ses habitants : selon une étude récente d’Allianz, les ménages Suisses détiennent le matelas financier le plus épais, parmi les ressortissants des cinquante premières nations du monde. Bien plus confortable que le grabat du Français et trois fois plus douillet que la paillasse de l’Allemand – classé en 16ème position, contre toute attente. Il n’est donc pas étonnant que les préoccupations suisses, en matière de fiscalité, n’aient rien de commun avec les nôtres. Chez nous, on cherche tous les moyens pour accroître les impôts et les taxes sans trop fâcher le pékin, et en lui laissant un peu d’argent de poche pour payer ses cigarettes – qui vont bientôt augmenter. En Suisse, et tout particulièrement à Lausanne, un referendum sera bientôt organisé pour décider du sort d’une vieille taxe que toutes les grandes villes ont déjà abandonnée : l’impôt sur les divertissements, institué il y a longtemps pour calmer les préventions calvinistes à l’égard de l’amusette et financer l’assistance publique. Mais désormais, on tolère en Suisse quelques heures de récréation par semaine et il y est interdit d’être pauvre : cet impôt ne se justifie plus.

Dans notre pays, gagné par la grâce de l’écologie, le système fiscal a la réputation de plutôt protéger les riches, dont l’espèce serait en voie de disparition. Mais d’autres dangers guettent la population, que l’on pourrait protéger efficacement tout en remplumant le Trésor. Il y a les taxes sur le tabac et l’alcool, bien sûr ; mais tous les Français ne picolent pas et ils sont de moins en moins nombreux à fumer. En revanche, tous consomment beaucoup trop de sel, qui est, selon la Faculté, une calamité pour la santé publique. Si nos calculs sont pertinents, la consommation annuelle de sel dans le pays devrait représenter environ 180.000 tonnes. En restaurant la gabelle sur le même barème que les accises, il y a matière à gommer nos déficits en un tournemain et faire de la Sécu une entreprise bénéficiaire. Il suffira ensuite d’instaurer un impôt identique sur le sucre et le gras pour rendre au Français une forme olympique et aux comptes publics la rutilance d’un coffre-fort suisse. Avec un tel plan, le signataire ne doute pas d’être bientôt appelé au ministère des Finances.

La recette du jour

Conserves de saison

A l’approche de l’hiver des finances publiques, il convient de stocker en masse le sel, le sucre, le lard, le tabac et l’alcool. Non par crainte de pénurie, mais dans l’attente d’une forte taxation de ces produits nocifs pour la santé. Vous pourrez ainsi trafiquer au marché noir et, avec les profits, vous offrir une cure de remise en forme dans une clinique suisse.

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