Auditions pour malentenda

Auditions pour malentendants

Le saviez-vous ? Les astrologues nous ont avertis hier que Jupiter entrait en Cancer. Marquant ainsi l’avenue d’une période de changements, de ruptures, de litiges et de procès. De grand chambardement, en somme. C’est sans doute pourquoi les forces cosmiques ont concentré sur la même journée des événements signifiants : la double audition, par les Parlementaires, d’une personnalité déchue pour fourberie fiscale et d’une autre anéantie par sa libido jupitérienne. Le billettiste a choisi d’auditionner l’ancien Directeur général du FMI, commis ès qualités pour éclairer les Sénateurs sur le rôle des acteurs financiers dans l’évasion des ressources fiscales. Avec l’aisance d’un orateur rompu à ce type d’exercice, l’intéressé n’a rien révélé que chacun ne sût déjà. Encore que les questions saugrenues de certains élus aient laissé accroire qu’ils découvraient le fil à couper le beurre. La sphère financière a dû se convaincre qu’elle n’avait rien à redouter de la perspicacité sénatoriale. Mais l’esprit général de l’exposé, distillé avec une morgue pateline et une ironie courtoisement désobligeante, peut ainsi être résumé : vous pouvez toujours causer, auditionner et éventuellement légiférer. Votre agitation aura autant d’effets que de souffler dans un violon.

Pour autant, les allégations de l’ex-DG du Fonds sont parfaitement recevables. Oui, la sphère financière a la main sur les affaires du monde ; oui, la technicité de ses opérations rend leur contrôle illusoire, avec des superviseurs « nuls » - les meilleurs professionnels étant recrutés à prix d’or par l’industrie financière ; oui, au nom du pragmatisme, les gouvernements ne souhaitent pas se priver de l’opacité des paradis qu’ils conspuent publiquement. Oui, l’impunité des dirigeants bancaires, face aux désordres systémiques qu’ils provoquent, est un authentique scandale. Mais tout ramener à la solution de ce problème manque de hauteur de vue ou relève de la mauvaise foi. En suggérant que le système lui-même pouvait être responsable des désordres présents, une Sénatrice a été promptement renvoyée dans ses 22. Au motif que pour imparfait qu’il soit, le système en vigueur n’aurait pas d’alternative crédible. Point final à la réflexion. Pourtant, DSK a bien reconnu que les événements économiques catastrophiques échappent à la rareté rassurante que leur confère la distribution gaussienne. C’est-à-dire que le modèle dominant produit beaucoup plus de bugs que ne l’affirme la théorie. Et le même jour, pour confirmer cette observation déplaisante dans un autre domaine - celui du sport -, le Tournoi de Wimbledon ajoutait à la liste invraisemblable des abandons quelques défaites hautement improbables sur une courbe de Gauss. Comme celle de Federer, véritable Jupiter du gazon anglais. Moralité : athlètes et systèmes sont soumis à la même malédiction. L’usure finit toujours par provoquer leur déchéance.

La recette du jour

Menu de sénateur

Respectueux des traditions culinaires, vous reproduisez chaque année la recette du civet de lièvre à la royale, que votre grand-mère tenait de son aïeul le sénateur Couteaux. Ne soyez pas surpris si votre famille décline maintenant l’invitation : c’est par miracle si votre civet n’a encore tué personne. A moins que vous ne dirigiez le FMI, optez plutôt pour le râble de maquereau rôti.

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