Du crédible à l'improbable

Du crédible à l’improbable

Ainsi donc nos princes et autres éminences ont découvert un nouveau mot dans le dictionnaire : « crédible ». On doit à Jean-Claude Trichet la primeur de la trouvaille, qu’il utilise désormais à jet continu : l’euro est « une monnaie crédible ». A laquelle, donc, « on peut attacher un certain degré de confiance ou de vraisemblance », selon la définition du TLF. De la part du grand-prêtre de l’euro, c’est une formulation bien tiédasse, vous en conviendrez, pour proclamer sa foi. D’autant qu’en ces périodes d’hérésie monétaire galopante, la BCE ne sait où donner de la tête pour protéger le culte de l’euro, contre la mécréance des traders et la barbarie des Yankees.

Et puis voilà que notre Président, amené à se prononcer publiquement sur l’intervention musclée de l’armée israélienne contre le convoi destiné à Gaza, a courageusement réclamé une enquête « crédible et impartiale » sur les événements en cause. En d’autres temps, il eût suffi de réclamer « une enquête » pour satisfaire aux exigences de la prudence diplomatique. Demander qu’elle soit « crédible » et « impartiale », c’est à-peu-près la même chose que d’exiger d’un Tribunal que ses juges soient diplômés et non stipendiés. Il faut sans doute croire que d’ordinaire, toute enquête internationale n’est qu’une pantalonnade – ce qui, finalement, n’est peut-être pas très loin de la réalité...

Reconnaissons toutefois que dans cette affaire, les parties ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour que la situation dégénère. A force de provocations et de menaces, sur un fond de nette dégradation des relations entre Israël et la Turquie, la flottille ne pouvait que s’engager dans l’aventure, et les commandos ne pouvaient que l’intercepter. Dans ce contexte, nul ne peut raisonnablement s’étonner qu’il y ait eu de la casse. Dans une région où l’outrance et l’intransigeance tiennent lieu de politique, la « communauté internationale », mal-nommée en l’espèce, serait sans doute plus « crédible » en mobilisant ses forces au profit de l’ordre international, s’il en existe un, plutôt que d’épuiser ses finances, son énergie et sa bonne foi, dans la traque picrocholine du taliban afghan.

La recette du jour

Civet de chèvre en castagne

La viande de chèvre est coriace : battez-la vigoureusement pour l’attendrir. Si elle se rebiffe, prenez garde : la chèvre est probablement vivante. Si elle vous envoie le poing dans la figure, ce n’est pas une chèvre que vous battez, mais son berger. Attendez-vous alors à un long service de représailles. Mais si le plat vous plait, déménagez au Moyen-Orient : on vous en servira à tous les repas.

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