La Commission et le (...)

La Commission et le Cheminot

Voyez comme ils sont retors, ces technos de la Commission européenne. Selon le quotidien Les Echos, ils auraient demandé à la France de prendre « des mesures pour supprimer la garantie de l’Etat sur les engagements de la SNCF ». Voilà qui s’appelle tourner autour du pot : l’Etat est en effet systématiquement garant des emprunts d’un établissement public. Il ne peut en conséquence « supprimer » sa caution de sa propre volonté. Sauf, évidemment – et c’est là où la Commission veut en venir – si la SNCF abandonnait son statut d’EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial) pour adopter, par exemple, celui d’une société anonyme. Car ce n’est pas vraiment la garantie des emprunts qui la préoccupe, mais l’urgence qu’il y aurait à faire disparaître, le plus vite possible, les quelques entreprises nationales qui font encore tâche dans l’horizon libéral. Car c’est bien connu : dès qu’elles passent au privé, de telles grandes entreprises deviennent bien plus performantes. Voyez EDF : depuis qu’elle n’est plus établissement public et qu’elle est soumise à la concurrence, ses tarifs n’ont cessé d’augmenter. Et elle a claqué sa trésorerie dans des aventures extraterritoriales, au détriment des investissements indispensables sur son sol. L’exemple est éclairant, si l’on ose dire. Finalement, on se prend à regretter le temps où les Electriciens publics nous privaient de courant pour obtenir la semaine de travail de 25 heures…

Reconnaissons-le : tout le monde, ou presque, a un jour eu l’occasion de maudire les Cheminots et leurs grèves paralysantes. D’autant que leurs revendications sont ordinairement incompréhensibles au pékin. Et lorsqu’elles sont claires, il n’est pas toujours facile d’en partager le bien-fondé. Mais chercher à mettre fin à la situation en privatisant la SNCF, ce ne serait sans doute pas un bon plan. D’abord, on ne pourra endormir les Cheminots par la promesse d’un statut plus confortable que celui qu’ils ont négocié au fil du temps. Ensuite, s’ils ne sont pas d’accord, ils vous paralysent le pays plus efficacement qu’un nuage volcanique : aucun gouvernement ne se réjouit de cette perspective. Enfin, ce serait dommage de sacrifier le dernier vestige de l’entreprise publique plutôt performante : il pourrait servir de modèle dans un avenir proche, quand l’obsession de la gestion par la finance aura abattu de grandes firmes privées, autrefois opulentes. Finalement, le Cheminot français devrait être classé dans les espèces à protéger.

La recette du jour

Poulet SNCF

Dans une rame de TGV bien bondée, choisissez un contrôleur pas trop mûr. Si vous en trouvez un, brossez-le aimablement dans le sens de la marche sans toucher à la tête, qui est très fragile. Puis demandez-lui de vous prêter son IHGC (Indicateur des Horaires de Grève des Cheminots, édité par Sud-Rail). S’il ne répond pas, il est cuit. Vous pouvez alors savourer votre mauvaise plaisanterie.

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