Marronnier d’été
- Par Jean-Jacques Jugie --
- le 29 juillet 2010
Pas besoin de mettre le nez dehors pour savoir que l’on est maintenant entré dans la période traditionnelle de torpeur estivale. Il suffit de parcourir le sommaire des grands journaux pour se rendre compte que l’actualité est en vacances. Même les quotidiens financiers secouent le marronnier, alors qu’ils ne manquent pas de pain sur la planche s’ils veulent éplucher le récent Dodd-Frank Act américain de 2.300 pages, ou le dernier document en date du Comité de régulation financière de Bâle, pourtant beaucoup plus court. Mais non moins savoureux pour apprécier la bienveillance du régulateur dans la préparation de « Bâle III » – les normes auxquelles devront se soumettre les banques d’ici, euh… eh bien, d’ici la saint glinglin. Ou un peu plus tard.
Au lieu de cela, le très institutionnel Wall Street Journal nous offre un papier d’été sur… les revenus des grands patrons. Et pas seulement leurs revenus de l’année dernière. Pour varier le menu, il est question ici de leurs revenus de la décennie écoulée. Pour des financiers, dix ans représentent le très, très long terme, celui qui ordinairement n’intéresse pas le lecteur. Ni les journalistes, du reste. Ni les grands patrons, d’ailleurs. On vous le donne en mille : le gagnant n’est pas celui que vous attendiez, à la tête de l’une des plus grosses multinationales. Il s’agit d’un « petit patron » qui n’a que 40.000 employés – une quasi-TPE. Larry Ellison, 66 ans le mois prochain, a été le fondateur de la société de logiciels Oracle Corporation, qu’il dirige toujours bon pied bon œil. Et Oracle n’arrive qu’à la 113ème position au palmarès des grandes firmes établi par le magazine Forbes. Pourtant, en dix ans, Larry a perçu 1.84 milliard de dollars de sa petite boîte, nettement plus du double que les salaires de Steve Jobs, le patron d’Apple. Pas mal, n’est-ce pas ? Voilà qui doit vous donner à méditer pendant que vous prenez un repos bien mérité : à la rentrée, il vous faudra créer une petite affaire. Une nouvelle, si vous en avez déjà plusieurs, car aucune ne vous a rapporté 2 milliards de dollars sur les dix dernières années. Vous voulez une idée ? Inventez un journal qui ne paraîtra que les deux mois d’été. C’est l’idéal : vous n’avez pas besoin de journalistes.
La recette du jour
Marrons aux deux saisons
Dans celles de nos contrées peuplées de châtaigniers, les marrons envahissent les vicinales dès l’automne venu. Offrez un bakchich aux services de la voirie pour stocker les marrons ainsi recueillis. Transformez-les en glace en été, et glacez-les en hiver. Le reste du temps, réfléchissez à la façon d’investir les 2 milliards de dollars que vous allez gagner.