Bonne année !

Bonne année !

Ah, la période des vœux ! C’est le moment le plus cool de l’année. Où l’on peut distribuer des tombereaux de souhaits tous plus chimériques les uns que les autres, sans que leur sincérité soit mise en doute. Où l’on peut distiller des espérances aussi crédibles que des serments d’ivrogne, sans être obligé de souffler dans le ballon. Où l’on peut offrir des châteaux en Espagne aussi généreusement que des pralines belges. La période charrie de la bienveillance à la brouette, comme si tout le monde avait fumé la moquette. Ainsi, la saison des vœux est un délicieux épisode virtuel qui nous déconnecte, pour un moment trop bref, de la barbarie ordinaire du monde réel. Enfin, tel est le cas général. Mais l’année qui débute est une exception. Qu’on se le dise : en 2014, tous les vœux seront exaucés. Vous n’avez pas remarqué ? Déjà sont en place les signes annonciateurs d’une nouvelle ère de bonheur, de santé et de prospérité.

La santé, d’abord : promesse a été faite que le budget de la Sécu parviendrait à l’équilibre avant que l’espèce humaine ne devienne immortelle. Cette perspective est beaucoup plus proche que vous ne le croyez : nos chirurgiens ont déjà réussi la greffe d’un cœur artificiel. Dès qu’ils sauront remplacer le cerveau des politiciens, il n’y aura pas plus de déficit que de yaourt en broche. La prospérité, ensuite : il ne vous a pas échappé que les indices boursiers ont fait un soleil, certains ayant même atteint leur plus haut niveau de tous les temps. C’est donc que les actionnaires - qui sont à la prospective ce que les grenouilles sont à la météo -, anticipent une période de vaches grasses : le lait et le miel de leurs portefeuilles vont ruisseler jusque dans la gamelle des plus humbles, selon la théorie économique dominante. Enfin, peut-être pas ruisseler, mais au moins suinter. De toute façon, la courbe du chômage s’entraîne dur, pour tenter de battre le record du monde de l’inversion : il y aura bientôt tellement de travail à assumer que personne n’aura plus le temps d’écrire, ni de lire des billevesées. Le pied. En somme, le bonheur est pour demain. Le billettiste souhaite de tout cœur que vous sachiez l’apprécier à sa juste valeur.

La recette de l’année

Les risques de la félicité

Si vous êtes d’une nature émotive, soyez prévenu : 2014 sera une année idyllique. Pour supporter le choc, adoptez le régime approprié : un bol de punch au petit-déjeuner, un flacon de bordeaux au déjeuner et un petit joint après dîner. Si cela ne suffit pas, ajoutez une séance de télé (avec modération, tout de même). A la fin de l’année, faites-vous greffer un foie en plastique et un cerveau en nougatine. Et priez pour qu’en 2015, tout redevienne comme avant.

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