Gloire aux ambidextres

Gloire aux ambidextres

Il y a des disciplines qui demandent beaucoup plus d’entraînement que d’autres avant d’être exercées au plus haut niveau. Voyez par exemple le tennis : pour espérer devenir un champion, mieux vaut savoir tenir une raquette avant d’user ses shorts sur les bancs de l’école. Le prodige Nadal a commencé à taper la balle à l’âge de 3 ans, pendant que ses petits copains trituraient maladroitement la pâte à modeler. Il a dû s’en coltiner, des gammes, pendant son enfance et son adolescence. Si bien que pour devenir un Mozart des courts, il faut vraiment croire à son destin et ne jamais laisser la place au doute.
Voyez par exemple cette autre discipline : le trône d’Espagne. Certes, il n’est pas nécessaire d’éliminer d’autres prétendants pour y parvenir. Mais le Prince Felipe a quand même 46 ans d’entraînement dans les pattes : il doit être maintenant fin prêt à assumer son rôle après l’abdication de Juan Carlos. Prêt à faire oublier les dernières années controversées du règne de son père, lequel demeurera toutefois le héros inoubliable de la transition de l’Espagne à la fin du Franquisme.

La petite histoire nous narre que le jeune Nadal était droitier, ce qu’infirme son jeu actuel. Mais il a appris à jouer du bras gauche, afin d’exploiter sa droite exceptionnelle dans le revers à deux mains – une arme redoutable dont usent désormais la plupart des joueurs du circuit. Or, si l’on en croit l’étude de ce psychologue américain, gauchers et droitiers ne verraient pas le monde de la même façon – ce qu’infirme formellement le paysage politique français contemporain. On imagine sans peine l’avantage dont disposent les ambidextres sur le commun des mortels, avec leur talent naturel pour l’œcuménisme panoramique. Il est ainsi permis de souhaiter que ses précepteurs aient doté de cette même qualité Felipe Juan Pablo Alfonso de Todos los Santos de Borbón y Grecia : le futur Roi en aura bien besoin pour épargner au pays les dérives ténébreuses – voisines de celles qui menaçaient l’Espagne lors de l’accession de son père au trône. S’il n’était aussi occupé à ravir un nouveau titre à Roland Garros, Rafael Nadal mériterait une place de choix dans la garde rapprochée du futur Felipe VI.

La recette du jour

Education à deux mains

Votre fils est gaucher. Ne paniquez pas : il a une bonne option pour devenir président des Etats-Unis, comme Clinton, Bush Père ou Obama – tous trois gauchers avérés. Mieux encore : aidez votre rejeton à exploiter très tôt sa droite. Car les ambidextres excellent dans les arts (Michel Ange, Léonard de Vinci), dans le sport (Nadal, Zidane), dans la monarchie glorieuse (la Reine Victoria) et dans la fiction horrifique (Dr Hannibal Lecter).

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