Hermione sacrifiée

Hermione sacrifiée

Il suffit de peu de choses pour changer le cours de l’Histoire. Pascal l’avait déjà noté : « Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé ». Encore que, n’en déplaise à Blaise, l’Egyptienne ait davantage influencé son époque par son tempérament volcanique que par la joliesse de son nez. Si la saillie de Pascal a traversé le temps, c’est davantage pour illustrer l’anastrophe – une figure de style plutôt hardie – que pour célébrer les talents d’historien du prude moraliste. Précisément, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, les secrets d’alcôve ont souvent joué un tout premier rôle dans la vie politique. Non, il n’est pas ici question de l’actualité élyséenne, qui n’influence guère que le chiffre d’affaires des tabloïds et celui des croissanteries du boulevard Saint-Honoré. Non, non, il n’est pas davantage question des désordres supposés dans le couple Obama – Michelle aurait déserté le baldaquin conjugal, après avoir appris que les Services secrets couvraient les fredaines de son Barak (le Président ne pourra jamais pardonner à Snowden d’avoir vendu la mèche). Toutes ces péripéties sont certes affligeantes, mais elles ne devraient pas faire dévier d’un poil le cheminement de l’Histoire.

En revanche, une révélation stupéfiante vient contrarier une histoire autrement plus populaire que celle de la France ou des Etats-Unis : celle de Harry Potter. Dame Rowling, la maman plumitive du brillant sorcier, vient d’avouer publiquement sa possible erreur d’entremetteuse. En ayant acoquiné Hermione Granger et Ron Weasley, contre l’attente légitime des fans de la saga, qui eussent volontiers célébré les noces de Harry et Hermione – manifestement épris l’un de l’autre. Cela dit, l’option littéraire ne manque pas de pertinence : il fallait sans doute une bonne pâte comme Ron pour supporter durablement le caractère irritant de mademoiselle-je-sais-tout. On aurait en effet de la peine à imaginer le futur : Harry à la tête de Poudlard – la prestigieuse école des sorciers -, constamment contrarié dans ses décisions par une épouse péremptoire. L’enfer. On comprend bien la Rowling, qui a écrit un roman initiatique à l’attention de son fils : dans un monde idéal, les vrais hommes de pouvoir font un mariage de raison, convenable, stable et durable. Et ils n’abusent pas de leur baguette magique, quand bien même serait-elle la plus prestigieuse du canton.

La morale du jour

« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point ». C’est toujours vrai. Si votre fille Hermione est amoureuse, relisez illico l’Andromaque de Racine. Imposez à votre fille des bains glacés et la fréquentation des Pensées de Pascal, ou envoyez-la étudier à Poudlard. Avant qu’il n’arrive malheur à son Pyrrhus, à Oreste et à toute la clique.

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