La chaudière portugaise

La chaudière portugaise

Savez-vous pourquoi les Bourses se sont offert, hier, un rebond spectaculaire, tout particulièrement en Europe ? Grâce au Portugal. Qui émettait une petite tranche (1.5 milliard) des emprunts dont il aura besoin cette année (20 milliards, si la situation n’empire pas). Tout le monde sait, même les Portugais, que les finances du pays sont mal en point, que la probabilité d’un défaut sur sa dette approche la certitude et en conséquence que les créanciers, principalement bancaires, sont menacés de se faire écorner. Et dans la foulée, la même punition serait promise à l’Espagne (très exposée à la dette portugaise), ainsi qu’à l’Italie (très exposée à la combinazione gestionnaire, nationale et locale). Si bien que l’Europe tout entière se retrouverait finalement sous séquestre en deux coups de cuillère à pot.

Survint alors le miracle, selon les commentateurs patentés du jour. Enfin, plutôt un tour de passe-passe. Figurez-vous que la demande portant sur les obligations portugaises à 10 ans était 3.2 fois supérieure à l’offre ? Un signe évident de confiance, à n’en pas douter. Ainsi donc le Portugal a emprunté à un taux moindre qu’en novembre dernier : 6.71% au lieu de … 6.80%. C’est encore le double du prix facturé aux Allemands. Sa signature de long terme est donc passée de la catégorie « pouilleuse » à la catégorie « pouilleuse à tendance stable ». En revanche, sur la tranche émise à 3 ans, le taux est passé de 4.04% à… 5.39% ! Une note pouilleuse à tendance catastrophique. Il aura donc suffi de mobiliser moins d’un milliard d’euros (pour la tranche à 10 ans), ce qui représente une fraction de goutte d’eau dans les émissions mondiales de dette souveraine, pour vendre à l’opinion l’illusion d’un retour à l’équilibre. Une manipulation boursière que l’on appelait autrefois « la chaudière ». Le procédé n’est pas seulement insultant à l’égard de l’intelligence commune. Il est aussi illégal.

La recette du jour

Bacalao à la portugaise

Vous pratiquez le négoce de la morue et vos dernières salaisons ayant échoué, votre marchandise est avariée. Mettez-en une infime fraction aux enchères et demandez à des amis de l’acheter à bon prix. Votre stock ainsi revalorisé, offrez-le en garantie contre du crédit. Puis gavez-vous de morue fraîche avant que vos créanciers ne comprennent qu’ils ont acheté des obligations pourries.

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