La corvée de Westminster

La corvée de Westminster

Il faut aujourd’hui vous montrer indulgent avec le billettiste, qui est plutôt pressé. Un hélicoptère doit venir l’enlever dès potron-minet – l’engin va se poser dans le potager, entre les rangs de salade et les premières pousses de petits pois : il y a tout juste la place. « Surtout, ne pas être en retard à l’abbaye de Westminster » nous a rappelé le Prince Charles. Eh oui, c’est un vieux pote, Charles : nous sommes allés à l’école ensemble. L’Ecole des palefreniers de Saumur. Il aime beaucoup les chevaux, vous savez – et aussi Camilla, bien sûr, dont on a squeezé les épousailles au prétexte d’un concours départemental de belote en Haute-Lozère. Ce qui était un pieux mensonge, mais bon, même sans tralala, un mariage est toujours assez fatiguant pour les invités. Mais là, pour William, impossible de se défiler : c’est le fils préféré, bien qu’il soit avare d’affection pour son père. Pourtant, Charles le verrait bien sur le trône à sa place, quand Mummy Elisabeth lâchera le sceptre et transmettra son pouvoir de guérir les écrouelles – encore que ce soit sans intérêt, puisque personne n’en est plus affecté. Mais enfin, la tradition c’est la tradition. Surtout chez la perfide Albion.

Evidemment, on est honoré d’être invité au mariage. Mais les princes ne se rendent pas compte qu’ils mettent les roturiers dans l’embarras pour de telles occasions. Il faut d’abord s’habiller en conséquence : pas question de se saper à Londres. Les tailleurs de Savile Row sont impossibles et vous transforment en sac à patates au prix d’une berline de luxe. D’accord, c’est la mode anglaise, mais la complaisance a ses limites, tout de même. Il a donc fallu aller à Milan pour le costume de cérémonie, à Paris pour la redingote, à Hongkong pour les chemises de soie (c’est moins cher) et pour les souliers, eh bien, sachez-le : si vous n’avez pas vos habitudes chez Berluti, y chausser vos pieds vous coûtera un bras. Mais enfin, vu le marathon qui nous attend, mieux vaut garantir son confort. On va poireauter au moins une heure avant la cérémonie, prévue à 11 heures (midi à l’heure parisienne : à cette heure, nous autres Français, on déjeune. On ne se marie pas). A 12 :15, sortie en cortège jusqu’au Palais de Buckingham. Ce n’est pas le bout du monde, mais c’est quand même une petite trotte. Ensuite, on poireaute de nouveau pour accueillir les familles royales, et il y en a une tripotée. Le programme ne dit pas si l’on peut, pendant ce temps, siroter un peu de champagne pour tromper son ennui. Ensuite, à 13 :25, les mariés font leur coucou au balcon et à 13 :30, on ne peut échapper au sempiternel défilé aérien de la RAF. Bon, tout ça, c’est bien joli. Mais à quelle heure passe-t-on à table ?

La recette du jour

Mariage princier

Si vous êtes prince, ne vous inquiétez pas : une armée de gens va s’occuper de tout. Il vous suffira de dire « oui » lors de la cérémonie. Si vous êtes invité, vous pouvez commencer à paniquer : il vous faudra des semaines pour apprendre le protocole, des jours pour vous habiller, des heures pour vous faire suer et quelques minutes suffiront pour être ridiculisé. Mieux vaut décliner l’invitation et suivre le mariage à la télé. En nuisette de chez Tati et babouches de chez ben Azzi.

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