La corvée réhabilitée

La corvée réhabilitée

Savez-vous que l’on doit à Louis XV la création de notre réseau routier, qui fut en son temps unique dans l’Europe entière ? Les statistiques font défaut pour mesurer la contribution de ces grands travaux au PIB de l’époque, et leur impact sur les finances du Royaume. Mais il est permis de penser que cette entreprise pharaonique coûta moins cher au Trésor que le faste louis-quatorzien. Car aucune entreprise de travaux publics ne fut sollicitée, ni aucun concessionnaire pour financer ces infrastructures. On s’inspira alors d’une pratique tombée en désuétude depuis le Moyen-Age : la corvée seigneuriale. Un impôt féodal que le pékin payait en nature pour aider aux moissons, aux vendanges et autres travaux saisonniers de la terre seigneuriale. Au maximum, la corvée royale a représenté jusqu’à un mois de travail gratuit, ce qui montre l’extrême modération de la fiscalité monarchique prérévolutionnaire : nombreux sont les contribuables démocrates qui aimeraient, aujourd’hui, n’acquitter en impôts que le douzième de leurs revenus…

Lorsque Turgot projeta d’abroger la corvée royale, pour y substituer un impôt en numéraire qui n’eût pas épargné les privilégiés (exonérés de corvée), ces derniers eurent la peau du Surintendant des Finances de Louis XVI. Déjà à cette époque, il ne fallait pas plaisanter avec l’impôt de la high society. C’est donc avec une curiosité non dissimulée que l’on voit réapparaître la corvée, abrogée en août 1789. L’initiative est imputable à une petite commune de Haute-Garonne, dont le Maire fraîchement élu a tenu a respecter ses engagements de campagne, à savoir ne pas augmenter les impôts. Pour ce faire, les résidents ont été invités à mettre la main à la pâte, afin de débroussailler, désherber et récurer les espaces collectifs. Il semblerait que le tiers de la population ait répondu favorablement à l’appel, ce qui montre une mobilisation remarquable en faveur du système fiscal de l’Ancien Régime. L’histoire ne dit pas si le Maire de Peyrissas entend se présenter au trône de France ; mais si tel était le cas, nul doute qu’il recueillerait l’assentiment de très nombreux sujets.

La recette du jour

Contributions en nature

Vous êtes las de vous faire étriller par de multiples impôts en numéraire. Proposez votre contribution en nature : vous pouvez par exemple offrir de cirer les pompes du Préfet pendant une semaine pour payer vos taxes foncières. Ou piloter le scooter présidentiel pendant un mois pour solder votre impôt sur le revenu. Si votre demande est refusée, attendez la prochaine prise de la Bastille.

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