Le couturier déchiré

Le couturier déchiré

Ne croyez surtout pas que diriger une grande maison de couture soit une sinécure. Certes, c’est un business à strass et à paillettes qui permet de côtoyer les têtes couronnées, et quelquefois de les habiller. Certes, c’est un business qui peut rapporter gros. De gros titres, du gros argent ou... de gros embêtements. C’est selon le flair des marketeurs, bien sûr, mais surtout selon le talent des créateurs et de leur styliste en chef. Un poste qui exige une personnalité charismatique, un ego de diva avec une bonne dose d’excentricité pour épater le bourgeois, et un goût prononcé pour la provocation – le passeport indispensable pour mériter une griffe internationale. Et il faut aussi que l’élu soit capable de créer des vêtements qui se portent. Pas seulement des vêtements qui se montrent. Bref, on se doute que le recrutement d’un grand couturier est une épreuve autrement plus exigeante que les travaux d’Hercule.

Voilà pourquoi la firme LVMH se montra jadis fort avisée, en recrutant Juan Carlos Antonio Galliano Guillén, dit John Galliano, promis à la direction artistique de Dior après avoir dynamisé Givenchy : un créateur talentueux et très prolifique, excellent technicien, excentrique à souhait et provocateur au-delà de toute espérance. Le succès le plus remarquable de LVMH fut assurément d’être parvenu à coincer Galliano à jeun pour lui faire signer son contrat – sans doute de bon matin, vers 11 heures, avant qu’il ne se fût brossé les dents à la vodka. Depuis lors, chaque fois qu’il est question de l’individu Galliano, c’est pour rapporter les provocations qu’il profère nuitamment, lorsqu’il achève de se caraméliser dans les troquets du Marais. N’ayant jamais entendu ses réparties sans que le Couturier eût trois grammes dans chaque poche, le billettiste ne peut préjuger de la sobriété intellectuelle de l’intéressé. Une certitude toutefois : lorsqu’il est complètement bourré, Galliano ne fait pas dans la dentelle, ce qui le rend suspect de crétinisme alpin. On veut bien parier que si Archimède s’était plongé dans un tonneau d’hydromel plutôt que dans une baignoire, son principe eût quand même émergé. D’accord, Archimède était notoirement malhabile pour rapetasser sa toge. Mais il n’était pas nécessaire de lui coudre un cerveau : il en avait déjà un, lui.

La recette du jour

Génie en alambic

Pour compenser votre QI d’huître, la nature, bonne fille, vous a doté de doigts de fée. Devenez horloger, chirurgien ou grand couturier. Et dissimulez votre vide cérébral galactique en pochetronnant du soir au matin et du matin au soir. Vos éructations passeront pour du génie, jusqu’à ce que le public finisse par vomir votre stupidité.

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