Le Droit et la géométrie

Le Droit et la géométrie

Il fait frais, ce matin, sur les Bourses asiatiques. Tout particulièrement à Tokyo : voilà plusieurs jours que les commentateurs font état, avec un bel ensemble, des craintes liées « au ralentissement chinois et à l’Ukraine ». Wall Street était également morose hier soir, après des dégagements marqués en Europe, notamment en Allemagne – Chinois et Russes sont de bons clients de l’industrie teutonne… Bref, la chienlit qui agite les confins orientaux de l’Union finit, tardivement, par soulever des inquiétudes économiques, après que les observateurs patentés nous ont expliqué doctement que les Russes seraient les grands perdants d’une partition de l’Ukraine. A cause des sanctions terribles que l’Occident va leur infliger, en vertu des tables du droit constitutionnel. Selon lequel le coup d’Etat de Kiev a produit un gouvernement légal, mais un referendum d’autodétermination en Crimée serait totalement irrecevable. Autant autoriser le Texas à faire sécession, ou permettre au Conseil Régional de Bretagne de se fédérer avec le Pays de Galles. Faut pas charrier : il y a des limites aux droits des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Nous saurons donc bientôt, après la consultation criméenne, si l’embrouille se résoudra grâce aux docteurs de la loi, ou par généraux d’armée interposés. En attendant, les Boursiers mouillent leurs braies, témoignant ainsi une confiance modérée dans le pouvoir apaisant du droit international à géométrie variable. Alors qu’ils peuvent se fier les yeux fermés à l’efficacité de leur justice interne. Voyez par exemple l’Angleterre : le marché de Londres n’a connu, hier, qu’une baisse modérée. Car la justice du pays est d’une fiabilité exemplaire : les banquiers de la City qui ont manipulé les taux d’intérêt, truandé les cours des devises, faussé le prix des matières premières et, d’une façon générale, celui de tout ce qui se cote sur un marché, eh bien ces malandrins vont être sévèrement sanctionnés. Il se pourrait même que leurs chefs de service se fassent gronder. En tout cas, il est question de leur sucrer les bonus faramineux qu’ils ont engrangés depuis six ans ! Ils pourraient même être privés de tickets-restaurant. On compatit sincèrement, tout en saluant la retenue de la justice britannique. Qui n’a pas réclamé l’intervention des armées de l’Otan contre la City, car la place financière jouit d’une très large autonomie au sein de la Couronne.

La recette du jour

Confiance et investissement

Aujourd’hui est un jour où vous déplorerez d’avoir investi votre confiance dans le droit international. Mais où vous ne regrettez pas d’avoir conservé vos lingotins et vos napoléons.

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