Le syndrome de l'axolotl

Le syndrome de l’axolotl

Le panache radioactif japonais a déjà fait chez nous une première victime. De façon très sélective, il a frappé avec une rare violence la matière cérébrale d’un député français, ou ce qu’il en reste après 33 ans de vie publique. Alors que se déroulait une très intéressante audition, retransmise par Public Sénat, sur le thème brûlant de la sécurité nucléaire, le député Maxime Gremetz a débarqué dans la salle, gesticulant et tonitruant, interrompant les débats pour protester contre un crime inqualifiable : deux véhicules ministériels étaient stationnés devant l’entrée principale, en infraction avec le Code de la route et le principe de libre-circulation des Parlementaires. L’incident a suffisamment duré pour méduser et exaspérer les participants, avant que l’histrion ne finisse par quitter la scène, avec ce regard absent qui fait dire aux Anglais : « il y a de la lumière à l’étage, mais personne à l’intérieur  »…

On ne sait à ce stade si le yaourt de l’intéressé a dépassé la date de péremption, si le député est adepte de la provocation de sauvageon ou bouffi de l’outrecuidance de l’intouchable. Car cette affection se propage désormais à une vitesse inquiétante parmi les décideurs, comme si le concept de responsabilité avait disparu de leur dictionnaire. Ni les gestionnaires des centrales japonaises, ni les politiques qui règlementent leur activité ne se sentent impliqués dans le désastre actuel ; de la même façon, les banquiers américains ne veulent pas être incriminés dans le cataclysme des « subprime » (leur métier, « c’est l’argent, pas la morale »), ni les spéculateurs dans l’envolée dramatique des matières premières (leur métier, c’est la spéculation, pas la faim dans le monde). Une goujaterie de préadolescent buté, qui ne s’érode pas avec l’âge, au contraire ; une immaturité pérenne –caractéristique de l’axolotl, ce curieux animal qui ne devient jamais adulte mais parvient à se reproduire à l’état larvaire. A croire que les leviers du monde sont maintenant aux mains de patriarches enfantins et de matrones impubères. C’est plus effrayant encore qu’un nuage de césium 137…

La recette du jour

Soufflé de conscience larvaire

Bien qu’ayant vécu une croissance normale et subi des études convenables, vous avez conservé une conscience de nourrisson. Oui, c’est grave. Mais pas rédhibitoire. Devenez manager d’une multinationale, prédicateur allumé ou parlementaire amiénois. Vous exercerez votre irresponsabilité en toute impunité, sous l’œil attendri des caméras et le courroux impuissant de vos concitoyens.

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