Les Fourberies de Sapin

Les Fourberies de Sapin

Comédie en trois actes inspirée du Phormion de Térence et largement influencée par la commedia dell’arte italienne. L’intrigue se déroule dans un pays autrefois orgueilleux de sa grandeur et désormais honteux de son impécuniosité. Prologue : Elysée, fraîchement promu paterfamilias de la collectivité, veut rabibocher deux membres de sa famille, brouillés depuis des temps immémoriaux : CGT et MEDEF, deux cousins en perpétuelle concurrence pour obtenir les faveurs de travailleuses-travailleurs, une fiancée rouspéteuse, exigeante, versatile et pour tout dire exaspérante. Mais dont il convient, pour l’un comme pour l’autre, d’obtenir l’assentiment sur le montant de la dot, appelée SMIC. Parvenir au consensus sur cet inusable sujet de discorde, c’est s’assurer une paix relative autour de la table familiale. C’est éviter la soupe à la grimace et ainsi garantir une prospérité raisonnable au patrimoine commun, appelé PIB.

Le lever de rideau a eu lieu le 6 mai à 20 heures. Dans le premier acte en cours, Elysée demande à son valet Sapin de rédiger un protocole susceptible d’accorder les cousins ennemis et de charmer en même temps la fiancée ombrageuse. On devine déjà l’argument principal de la pièce : des coups de théâtre successifs devant une telle ambition, hors de portée des facultés humaines. Car l’Histoire nous a enseigné, au moins depuis Térence, qu’un ménage à trois est toujours un composé instable, potentiellement détonnant et qui précipite souvent des déconvenues sismiques. Mais bon, la vie est un champ d’expériences permanentes. En foi de quoi Sapin, empressé mais pas très inventif, propose-t-il d’apaiser les parties sur un « coup de pouce ». Pas celui de César, vers le haut ou vers le bas, qui sanctifie le salut ou le trépas du gladiateur. Non, le coup de pouce horizontal, autrement appelé chiquenaude. Entendez par là le mouvement qui accroît le SMIC de façon symbolique, voire métaphorique. Et en plus, le bonus en cause serait accordé en avancement d’hoirie, pour paraphraser la langue notariale, c’est-à-dire à titre d’avance sur ce qui sera légalement attribué en janvier prochain. Assurément, le procédé donne du piment à la pièce : tout le monde est mécontent, ce qui accroit le suspense. Dans la vie réelle, le scénario aurait évidemment été différent : nul n’ignore qu’en politique, mieux vaut ne rien faire que d’opter pour le simulacre. Car si l’immobilisme fait rarement l’unanimité, il présente toujours l’avantage de satisfaire au moins une partie de l’opinion.

La recette du jour

Jeûne sur le pouce

Vous avez une famille nombreuse mais des moyens rikiki. Votre tablée exige une amélioration de l’ordinaire. Refusez tout net le coup de pouce : on vous réclamerait ensuite la main, puis le bras, et enfin tout le reste. Défendez plutôt une ascèse plus rigoureuse : le jeûne fortifie ceux qui le subissent. Aussi longtemps qu’ils y croient.

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