Prévision : un gourou (...)

Prévision : un gourou français

Bon, tout le monde le sait désormais : notre système éducatif serait gravement défaillant. Et de plus en plus inégalitaire : l’Ecole produit des cohortes entières lestées d’un bagage culturel en papier mâché, tout en faisant émerger des élites qui s’empressent d’aller exploiter leur génie à l’étranger. Les exemples d’excellence abondent dans tous les domaines scientifiques, jusque dans la discipline très médiatisée de la prophétie économique. Ainsi, le magazine Bloomberg vient de décerner à un jeune Français la palme de « meilleur prévisionniste de l’année  » pour l’économie américaine. Sans que l’élu ait jamais mis les pieds chez l’Oncle Sam, notez-le bien, ce qui confère à Christophe Barraud l’aura du Dr House – ce serial doctor capable d’établir un diagnostic affûté sans voir ni écouter le patient (car « tout le monde ment », ce qui est assez largement démontré, surtout chez les Américains).

On observera que le jeune Christophe a relevé une analogie saisissante entre les marchés boursiers et les paris sportifs, analogie qui a inspiré sa thèse de doctorat. Les deux phénomènes seraient soumis à la loi de l’efficience informationnelle, un lemme mécanicien selon lequel les parieurs (ou les investisseurs, si vous préférez), intègrent à chaque instant les informations disponibles pour formuler leurs anticipations rationnelles – celles qui fixent la valeur fondamentale, la « vraie » valeur des choses. C’est assez amusant de constater qu’au moment où les théoriciens se mettent à douter de la rationalité des investisseurs – un doute qui les honore -, et que la notion de valeur soulève des angoisses métaphysiques, un modèle économétrique fondé sur ces préjugés parvienne à délivrer des prévisions pertinentes. Selon toute probabilité, une telle performance dans l’anticipation ne devrait donc pas être récurrente. Pourtant, les marchés boursiers semblent avoir été sensibles aux pronostics que Barraud a récemment distillés dans la presse américaine. Il prévoit une forte reprise aux Etats-Unis pour l’année prochaine, une nette amélioration du marché de l’emploi et un revirement rapide de la FED (ce mois-ci ou le mois prochain) sur sa politique monétaire : les robinets à liquidités commenceraient alors à se refermer. Ces perspectives effrayantes ont jeté un froid sur l’enthousiasme des marchés. Car le retour de la croissance serait un puissant antidote contre l’euphorie boursière. Heureusement, cette anticipation demeure à ce jour faiblement rationnelle…

La recette du jour

Back to basics

Quand l’incertitude domine, il est rationnel de revenir aux fondamentaux. Et de retourner aux activités qui prospèrent depuis le début des temps. Renoncez toutefois au « plus vieux métier du monde », car les clients seront désormais persécutés. Choisissez plutôt de prédire l’avenir au pifomètre : vous aurez raison une fois sur deux. C’est-à-dire plus souvent que les économistes experts.

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