Rentrée patronale : (...)

Rentrée patronale : le Medef « effrayé » par le budget 2013

Le projet de budget ne plaît pas aux patrons. Laurence Parisot craint que la modération annoncée des dépenses publiques ne suffise pas à calmer les marchés. Elle dénonce également le veto du président de la République, opposé à l’exploitation des gaz de schiste.

Le regard bleu fixe l’infini, le ton est calme, la voix posée. « Nous sommes effrayés », dit-elle calmement. Laurence Parisot ne ménage pas ses effets pour dénoncer le projet de budget pour 2013, qui doit être présenté le 28 septembre par l’exécutif. « Nous estimons que le gouvernement prend le risque de créer un choc de non-compétitivité », assure encore la patronne du Medef, lors de sa conférence de presse mensuelle, tenue le lendemain de la réunion du Conseil exécutif de l’organisation, le 17 septembre. La formule répond à celle du Premier ministre, qui a promis de lancer « un choc de compétitivité », et ce « avant la fin de l’année ». Un rapport demandé à l’ancien président du groupe aéronautique européen EADS et de la SNCF, Louis Gallois, sur la compétitivité des entreprises doit en effet déboucher sur des mesures concrètes.
Mais avant cela, il y a donc le budget. Le projet n’est pas encore public mais Laurence Parisot admet en avoir lu des éléments dans la presse. Jean-Marc Ayrault devrait ainsi annoncer des hausses d’impôts pesant, pour un tiers, sur les ménages et, pour un autre tiers, sur les entreprises, le reste de l’« effort » étant assuré par une baisse de la dépense publique. « Très préoccupant », lâche Laurence Parisot, sur un ton dramatique. « Le budget qu’il conviendrait d’établir devrait baisser deux fois plus les dépenses qu’augmenter les impôts. C’est ce qu’ont fait tous les pays confrontés à des difficultés budgétaires », ajoute-t-elle à l’intention du Premier ministre, qui avait, fin août, tenté d’amadouer les patrons à l’Université d’été du mouvement, sur le campus de Jouy-en-Josas (Yvelines).

Controverse sur les chiffres

Le gouvernement se targue de baisser de 10 milliards d’euros le volume des dépenses publiques ? « En réalité, cette réduction n’en est pas une. Il s’agit seulement d’une réduction de l’augmentation des dépenses publiques », dénonce la patronne des patrons. En outre, les dépenses supplémentaires atteindront 8,8 milliards d’euros contre 16,5, la moyenne de ces dernières années. Et d’ailleurs, « 16,5 moins 8,8, cela ne fait même pas 10 milliards », calcule Laurence Parisot.
Peu lui importe que le gouvernement Ayrault semble faire mieux, en matière de déficits, que celui que dirigeait François Fillon. Pour la présidente du Medef, « nous ne nous attaquons toujours pas au cœur du problème ». Et pourtant, « les pistes de réduction des dépenses publiques sont nombreuses », martèle Laurence Parisot. Des rapports, publiés par l’Inspection des finances ou la Cour des comptes, « donnent des solutions ». La patronne des patrons ne fournit pas d’exemple précis mais préfère citer… un contre-exemple. « La communauté d’agglomération d’Amiens a décidé, le 17 septembre, d’augmenter de 13% le ‘versement transport’, financé uniquement par les entreprises ». Les collectivités locales sont maîtres de cet impôt destiné à financer des infrastructures et le fonctionnement des transports. Or, les entreprises ont rarement leur mot à dire en matière d’organisation locale des transports, même lorsque ceux-ci ne bénéficient pas à leurs salariés. Pour le Medef, chaque hausse du versement transport agit dès lors comme un chiffon rouge.

Flexisécurité

L’organisation patronale n’est pas seulement le porte-parole des acteurs économiques que sont les entreprises. Elle est également chargée, comme représentant des employeurs, des négociations sociales, menées avec les syndicats de salariés. Les discussions sur l’emploi, qui débuteront le 4 octobre, doivent s’achever à la fin de l’année ou au début de l’année prochaine. Le Medef espère faire progresser la notion de « flexisécurité » que la patronne des patrons définit avec un brin de paternalisme. « Il faut que les salariés aient un meilleur accès à la formation et que cette adaptation ne leur fasse pas peur, et même qu’ils puissent penser que cette adaptation les aide à progresser dans leur parcours professionnel », détaille Laurence Parisot. Le Medef propose également, pour les petites entreprises, « des mécanismes qui permettent de plafonner des dommages et intérêts », en cas de litige entre un salarié et son employeur. Les patrons se targuent aussi de penser à leurs employés. « La portabilité de certains droits » pourrait être encouragée. En clair, il s’agirait de favoriser le passage d’une entreprise à une autre sans que cela se traduise par la perte d’avantages acquis.

Le patronat souhaite enfin « améliorer significativement l’accompagnement des demandeurs d’emploi ». Une proposition qui est la bienvenue. En effet, aujourd’hui, sur le site de Pôle Emploi, le demandeur qui trouve une annonce correspondant à ses attentes ne peut contacter directement l’employeur. Il lui faut passer par un conseiller de l’organisme public. D’autres sites spécialisés ou non, gérés par des sociétés privées, se montrent beaucoup plus réactifs. En pratique, bien entendu, c’est vers ceux-ci que se tournent aussi bien les employeurs que les chômeurs…

Gaz de schiste

Le Medef n’oublie pas un autre de ses chevaux de bataille, celui de l’énergie. La baisse de la production nucléaire, annoncée par le Président Hollande, et le refus d’investir dans l’exploitation des gaz de schiste, agacent beaucoup le patronat. « Comment peut-on souhaiter la réindustrialisation du pays tout en négligeant les enjeux de la transition énergétique ? », s’interroge Laurence Parisot. Les services de l’organisation ont calculé que la réduction de la part du nucléaire à 50% de l’approvisionnement en énergie nécessiterait « un investissement de 100 milliards d’euros ». Comment « absorber les surcoûts ? » demande le Medef, qui répond : « on ne le sait pas, puisque la question n’a pas été posée », au cours de la Conférence environnementale des 14 et 15 septembre. Pour Laurence Parisot, les concessions de la majorité socialiste à son allié écologiste « sont en train de priver la France d’un atout considérable ».

deconnecte