La DDO (décision sur (...)

La DDO (décision sur dernière offre) du CMAP : une variante à essayer de règlement de litige

La procédure de DDO est une variante originale et astucieuse des modes alternatifs de règlement d’un différend. Inspirée d’une pratique pour la fixation du salaire de joueurs de base-ball, la procédure de DDO, désormais proposée par le CMAP (Centre de médiation et d’arbitrage de Paris), présente l’originalité de ne laisser au tiers décideur qu’une seule possibilité : celle de choisir l’une ou l’autre des dernières propositions formulées par les parties.

Par Maître Dominique Vidal, Professeur émérite, Arbitre

Rapide et "raisonnable"

La DDO est une méthode par laquelle les parties, soucieuses de régler efficacement un différend, conviennent de demander à un tiers de choisir l’une des ultimes propositions qu’elles auront formulées. Elle peut porter sur tout ou partie d’un différend.
L’expérience enseigne que la DDO conduit chacune des parties, qu’il s’agisse de l’évaluation d’un prix, d’un préjudice, d’une indemnité ou de certains actifs, à ne pas invoquer de montants dérisoires ou excessifs, de crainte de conduire le tiers décideur à choisir l’autre offre, au motif qu’elle lui semble plus raisonnable. La procédure a souvent pour effet de créer un climat
favorable à une négociation raisonnable et de bonne foi, contrairement, il faut bien l’admettre, à ce que l’on observe souvent dans le contexte judiciaire ou arbitral, voire même dans celui d’une médiation.

Une procédure contractuelle

D’ailleurs, la procédure de DDO laisse ouverte la voie d’un éventuel accord des parties.
Lors de la mise en œuvre de la DDO, les parties conviennent de la force obligatoire qu’elles entendent conférer au choix qui sera fait par le décideur ; il s’agira par exemple, à leur convenance commune, d’un élément simplement indicatif ou à l’inverse de la fixation d’un prix à valeur contractuelle par les soins d’un mandataire commun, dans les conditions de l’article 1592 du Code civil.
La DDO est donc une procédure éminemment contractuelle.
Le déroulement de la procédure est assez classique.
Chaque partie présente un mémorandum assez complet assorti des pièces pertinentes permettant d’identifier les origines et les termes du différend.
Il est à noter que la procédure peut être engagée par une seule partie, l’autre partie ayant alors la possibilité (si les deux parties n’avaient pas préalablement conclu une clause de DDO) d’y donner suite ou non. Dans le premier cas, la procédure se déroule normalement comme si les parties avaient conclu une clause de DDO ; dans le second cas, la partie qui avait pris l’initiative (le "demandeur") devra mieux se pourvoir. Le seul risque pris par ce dernier est celui … d’avoir tenté de gagner du temps.
La DDO est en effet un recordman absolu de célérité des modes de règlement des différends. Sa durée de référence est de deux mois ; elle peut être plus longue, ou plus courte.
Seule contrainte bien entendu, les parties doivent exposer des frais et honoraires. Mais compte tenu précisément de la célérité de la procédure et de la possibilité de désigner un seul tiers décideur, de tels honoraires peuvent être notoirement inférieurs à ceux qui sont requis par un arbitrage. Ils dépendent évidemment de la nature du litige et de la personnalité du DDO.
Le DDO (décideur sur dernière offre) doit faire preuve, outre une compétence appropriée au dossier, d’indépendance, d’impartialité et de neutralité.
Il est tenu à la plus stricte confidentialité pour tout ce qui concerne sa mission.
Si la mission du DDO est définie par les parties, le DDO est maître des modalités d’exécution de sa mission, dans le respect de la contradiction, de l’obligation de loyauté et des intérêts de chacune des parties.
Dans ce contexte, le DDO détermine le calendrier des opérations permettant les échanges d’offres et spécialement une date pour la présentation des dernières offres et leur argumentation.
Le DDO peut contradictoirement effectuer toute recherche utile à sa mission et les parties s’engagent à lui laisser libre accès aux lieux d’exécution de sa mission. Il peut le cas échéant diligenter une expertise aux frais des parties. Chaque partie peut évidemment se faire assister par toute personne de son choix, en particulier un avocat ainsi que par tout conseil spécialisé dans le domaine du différend (expert-comptable, ingénieur, etc…).

Une solution "sur mesure"

Au terme de la procédure, si la mission est limitée à un avis non contraignant et sauf convention contraire, les parties s’interdisent de produire l’avis dans une instance judiciaire ou arbitrale ultérieure. En définitive, sur un fondement qui ne peut échapper à la convention souveraine des parties, dans un délai
exceptionnellement court, et pour un budget dont la modicité est sans concurrence, la DDO permet d’aboutir à l’une des trois solutions suivantes :
- Un avis non contraignant confidentiel
- Un avis non contraignant non confidentiel
- Un choix valant décision contractuelle.
La pratique enseigne qu’un avis contraignant mais autorisé, qu’il demeure ou non confidentiel, et obtenu après un débat
documenté et contradictoire est déjà un élément qui peut être très précieux. Il peut suffire, par exemple, à documenter et justifier la décision à prendre par plusieurs personnes (associés ou membres d’un organe collégial, par exemple). Au total, les parties ont ainsi très peu à engager et beaucoup à gagner avec une DDO.
Pourquoi ne pas essayer ?

Photo de Une : DR

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