
Croisières sur la Côte d’Azur : l’État propose une régulation, Nice et Cannes jugent les mesures insuffisantes
- Par Valérie Noriega --
- le 13 octobre 2025
Les services de l’État ont présenté, vendredi 10 octobre, un ensemble de mesures destinées à encadrer l’accueil des navires de croisière sur le littoral des Alpes-Maritimes. Ces dispositions, élaborées à l’issue de plusieurs mois de concertation entre les préfectures, les collectivités et les acteurs économiques, visent à concilier « protection de l’environnement et de la santé publique » avec « les enjeux économiques et touristiques » du secteur.
Le dispositif, détaillé par le préfet des Alpes-Maritimes, Laurent Hottiaux, et le préfet maritime de la Méditerranée, Christophe Lucas, limite à une moyenne de 2 000 passagers débarqués par escale et à un maximum de 3 000 passagers par port la capacité d’accueil des paquebots. Une seule escale quotidienne de navires de plus de 1 300 passagers sera autorisée, avec un renforcement des restrictions durant l’été. En cas de pic de pollution, les préfets pourront réduire les émissions des navires ou interdire les escales. Les compagnies adhérant à la charte « Croisière durable en Méditerranée » bénéficieront d’une priorité d’accès.
Ces mesures doivent encore être soumises à une consultation publique de 21 jours avant la publication d’un arrêté préfectoral.
Christian Estrosi dénonce un « constat d’échec »
À Nice, le maire et président de la métropole, Christian Estrosi, a réagi sévèrement à ces annonces dans un communiqué, estimant qu’« un constat d’échec s’impose ». Selon lui, les propositions de l’État « auraient un impact marginal sur le littoral niçois et métropolitain » et « ne répondent pas aux attentes légitimes des habitants ».
L’élu réclame une régulation « plus ambitieuse », fondée sur trois principes : limiter strictement le nombre d’escales, interdire l’accès des “géants des mers” et favoriser les navires les moins polluants.
Il a également menacé de déposer un recours contre l’État pour “carence fautive” si les mesures actuelles étaient confirmées sans durcissement, invoquant la nécessité de protéger la santé publique et les écosystèmes côtiers.
David Lisnard défend la souveraineté locale
À Cannes, la municipalité, dirigée par David Lisnard, a elle aussi exprimé ses réserves, tout en saluant « un début de prise de conscience ». Le maire estime toutefois que les seuils proposés par les préfets, « jusqu’à 3 000 passagers simultanément », demeurent « trop élevés » et « plus permissifs » que ceux décidés localement. La ville rappelle avoir déjà adopté en 2022 un plan de régulation prévoyant une réduction de 48 % des escales de navires de plus de 3 000 passagers, un plafonnement à un seul paquebot simultanément en baie et une limitation progressive à 1 300 passagers par navire d’ici 2030.
Pour M. Lisnard, l’approche uniforme de l’État « fait abstraction des spécificités territoriales » et remet en cause « les décisions souveraines prises par les élus au nom des habitants ». Il plaide depuis plusieurs années pour un renforcement des pouvoirs de police des maires sur la gestion des plans d’eau, afin de leur permettre d’appliquer des politiques environnementales adaptées à leur territoire.
Vers un débat public élargi ?
La publication prochaine de l’arrêté préfectoral et la consultation publique qui l’accompagne devraient donner lieu à de nouveaux échanges entre l’État et les collectivités locales.
Entre la volonté des communes d’affirmer leurs prérogatives et la recherche d’une cohérence départementale, la régulation des croisières sur la Côte d’Azur illustre les tensions persistantes entre impératifs environnementaux, attractivité touristique et gouvernance locale du littoral méditerranéen.