Dans un courrier à Sébastien Lecornu, David Lisnard alerte sur le risque d’un « décrochage technologique » français dans le spatial
- Par Valérie Noriega --
- le 28 octobre 2025
Le maire de Cannes, David Lisnard, a adressé le 14 octobre une lettre au Premier ministre, Sébastien Lecornu, pour l’alerter sur les conséquences des baisses budgétaires envisagées par la France dans le cadre de la prochaine conférence ministérielle de l’Agence spatiale européenne (ESA). Cette réunion du Conseil de l’Agence spatiale européenne (ESA) au niveau ministériel (CM25) se tiendra à Brême, en Allemagne, les 26 et 27 novembre 2025 afin de déterminer les priorités de financement de l’Europe pour les années à venir.
Dans ce courrier, adressé ce jour à la presse, l’élu (LR), également président de l’Association des maires de France (AMF), s’inquiète d’un possible « décrochage technologique » et d’un « effondrement du leadership français » dans le domaine spatial, si les montants d’engagement de la France étaient abaissés de 3,2 milliards d’euros à 2,5 milliards pour la période 2026-2028.
Perte d’influence
Selon M. Lisnard, cette enveloppe serait inférieure de 700 millions d’euros à celle du précédent cycle (2023-2025) et consacrerait « plus d’un milliard d’euros aux lanceurs », ne laissant qu’« environ 400 à 700 millions d’euros par an pour le satellitaire ». Une telle répartition, estime-t-il, conduirait à « l’abandon partiel ou complet de domaines d’excellence française, tels que l’observation, la navigation ou les télécommunications ».
L’élu cannois, dont la ville accueille le siège de Thales Alenia Space, souligne également que la CMIN25 « est déterminante pour préparer les technologies qui seront déployées par l’Union européenne sous le prochain cadre financier pluriannuel (2028-2034) ». Il met en garde contre une perte d’influence face à l’Allemagne et à l’Italie, qui envisageraient respectivement des contributions de cinq à six milliards et de plus de quatre milliards d’euros.
David Lisnard évalue à « 2 000 à 4 000 » le nombre d’emplois susceptibles d’être perdus dans la filière satellites si le scénario bas se confirmait, sur un total de 12 000 actuellement. Il appelle donc le gouvernement à « assurer un positionnement fort de la France » à la conférence ministérielle de l’ESA et à « mettre en œuvre effectivement le volet spatial de la Loi de programmation militaire 2024-2030 », jugé pour l’instant en retard. « Un maintien de l’investissement français se traduirait par un retour sur investissement sans précédent », plaide le maire, estimant ce retour « de quatre à huit fois le montant initialement engagé ».
La sénatrice Alexandra Borchio Fontimps avait déjà lancé une alerte il y a deux semaines dans un post sur les réseaux sociaux, à la suite d’une réunion de travail à sa permanence à Antibes avec Benoit Hancart de Thales Alenia Space : « à l’approche de la CMIN25, j’alerte sur les risques d’un désengagement budgétaire de la France dans le spatial. Préservons notre souveraineté technologique et nos emplois ! »
En amont de la conférence ministérielle de l’Agence spatiale européenne, le directeur général de l’ESA, Josef Aschbacher, a déclaré que « le CM25 sera le moment de prendre des décisions radicales. Il marquera le début d’une longue série de jalons budgétaires et politiques majeurs, dont la conférence ministérielle de l’ESA de 2028 et l’adoption du cadre financier pluriannuel (CFP) 2028-2034 de la Commission européenne, qui dessineront les ambitions à long terme de l’Europe dans le domaine spatial. Le CM25 offre à l’Europe une occasion rêvée de dépasser ses hésitations en faisant preuve d’ambition, de refuser de se laisser distancer en affirmant son leadership et de sortir de l’inertie en prenant en main son avenir. Reste à savoir si nous aurons le courage de la saisir ! »