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- Par Jean-Michel Chevalier --
- le 31 octobre 2025
C’est un nouvel avertissement qui a été adressé vendredi dernier à la France par Moody’s. Avec un ciel bas et lourd comme un couvercle, toute petite éclaircie est bonne à prendre. Heureuse surprise après les dégradations de S&P et Fitch, la dernière des grandes agences de notation à se prononcer n’a pas abaissé la note de notre pays, mais s’est contentée de la faire passer de « perspective stable » à « perspective négative ». Les experts de l’agence américaine nous ont donc accordé un sursis quand beaucoup redoutaient une nouvelle sanction de la part de ceux qui font (surtout) la pluie et (parfois) le beau temps sur les marchés internationaux.
Cela étant, l’instabilité politique – pour ne pas dire plus – crée une méfiance à l’endroit de notre pays. Elle va au-delà de nos comptes très dégradés. Il faut reconnaître que les signaux que nous émettons ont de quoi faire douter du sérieux des mesures de rétablissement imaginées pour ralentir notre dépendance à l’emprunt : la suspension de la réforme des retraites, la révision à la baisse des perspectives de croissance, les hurlements dans l’Hémicycle dignes d’une république bananière, la fragilité même du gouvernement qui peut être emporté à tout moment... Tout cela est de nature à entraver les efforts de réduction des déficits publics et de la maîtrise de l’endettement. Une incertitude que le monde de la finance n’aime pas, et qu’il fait payer cher en intérêts. Si l’activité économique fléchit, les rentrées fiscales présentées par le gouvernement comme la meilleure des solutions ne seront pas au rendez-vous, et les objectifs budgétaires ne seront pas tenus.
Rien ne garantit que Moody’s restera dans une bienveillance attentive à l’égard de la France. Une dégradation de la note reste possible, sinon probable, d’autant que l’objectif de réduction du déficit semble toujours s’éloigner. Au cours des prochaines semaines, la responsabilité des parlementaires sera écrasante s’ils n’arrivent pas à voter un budget, ce qui aboutira fatalement à une nouvelle et désastreuse dissolution.
Il nous faut donc passer au-dessus des idéologies, des calculs mesquins, des ambitions personnelles, bref, de tout ce qui fait la vie politique, car nous n’avons plus les moyens de perdre du temps. Il nous faut comme boussole la raison et le pragmatisme. En sommes-nous seulement capables ?
P.S. : Est-il vraiment judicieux et nécessaire que Gérald Darmanin aille en personne et ès qualité rendre visite à Nicolas Sarkozy à la Santé ? S’il est du devoir du ministre de la Justice de s’assurer du sort des prisonniers, il dispose évidemment d’autres moyens pour vérifier que l’ancien président y est bien traité et en sécurité. Ce genre d’initiative ne peut que renforcer le sentiment, dans le public, que les « élites » se soutiennent entre elles, quand plus de 5 000 personnes dorment aujourd’hui sur des matelas à même le sol dans nos établissements pénitentiaires et que des détenus cohabitent à deux ou trois dans une cellule de 9 mètres carrés. Quant à l’initiative de députés LFI, pris d’une irrépressible et soudaine envie de visiter la Santé (que ne l’ont-ils fait plus tôt…), cette démarche politico-politicienne manque pour le moins d’élégance.
 
                                                     
                                                    