Edito -Sortie de route pour le permis ?
- Par Jean-Michel Chevalier --
- le 7 novembre 2025
Depuis Bruxelles, les eurodéputés ont voté pour une révision des règles sur le permis de conduire. Ils ont notamment prévu la fin du permis à vie pour les voitures et les motos, en limitant la validité du document à 15 ans, et des visites médicales pour les titulaires de plus de 65 ans. Tout cela au nom de la sécurité routière, un objectif que personne ne peut contester puisque, l’an passé, 20 000 personnes ont encore perdu la vie sur les routes des 27 pays de l’UE.
Bien sûr, l’actualité monte régulièrement en épingle l’histoire du petit papy (ou de la petite mamie) qui prend l’autoroute à contresens, mettant en avant son âge pour justifier une perte de repères et de réflexes qui devraient plutôt les inciter à laisser leur auto au garage. C’est la même histoire qu’avec les compteurs Linky, lorsque la presse relatait, au début de leur installation chez les particuliers, que l’un de ces appareils avait pris feu. Comme si cela n’arrivait jamais du temps des anciens compteurs bleus, alors que des millions de boîtes vert-jaune fonctionnent depuis sans problème.
On est donc dans l’erreur quand on fait d’un épiphénomène une généralité. Les accidents de la route ne sont pas l’apanage des seniors. Cette catégorie n’est pas celle qui, dans les statistiques, apparaît comme la plus « dangereuse ». Pour un grand-père égaré sur la ligne du tramway, combien de « petits jeunes » roulant en (grand) excès de vitesse, sous l’effet de l’alcool, de la drogue ou des médicaments ? Combien de comportements irresponsables, comme ces scooters qui font de la roue arrière en ville, ou cette voiture récemment filmée en train de doubler n’importe comment dans les rues de Nice (ligne continue franchie, à droite du véhicule qui précède, sur la voie opposée) jusqu’au choc final avec un autre usager après avoir grillé un feu rouge sur le port ?
Si certains eurodéputés disposent d’une voiture et d’un chauffeur et/ou du remboursement des notes de taxi, ce n’est évidemment pas le cas des retraités, surtout ceux vivant à la campagne. Faute de transports en commun, ils ont absolument besoin de leur voiture pour faire leurs courses ou aller se soigner. Comment feront-ils sans leur triptyque rose pour parcourir les quelques kilomètres qui les séparent des magasins et des médecins ? Les condamner à la voiturette sans permis ou au scooter ne va pas faire baisser les risques que Bruxelles veut combattre.
Ces nouvelles dispositions partent d’une bonne intention, mais risquent bien de s’avérer socialement injustes et inapplicables lorsqu’elles rencontrent la réalité du terrain. Comme les zones à faibles émissions (ZFE), par exemple, qui ont prouvé par l’absurde que les grandes idées paperassières n’ont de réelle utilité que si elles rendent des services effectifs.
Durcissement des conditions d’obtention du permis, des contrôles techniques des véhicules, chasse automatisée aux infractions (vitesse, feux tricolores), assistance à la conduite sur les voitures (EPS, freinage anti-collision, etc.)… les moyens d’améliorer la sécurité routière ne manquent pas. Ils ont prouvé leur efficacité : 20 000 morts (de trop) sur les routes de toute l’Europe, c’était le triste score réalisé en France dans les années 1970.
Faut-il encore en rajouter une couche ?