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Premier marathon pour Me Julien Prandi : « la satisfaction de t’être dépassé et de l’avoir fait ! »

Dimanche 9 novembre, le Marathon International de Nice-Cannes a rassemblé plus de 22 000 coureurs, parmi lesquels des avocat(e)s du Barreau de Nice, fidèles à ce rendez-vous sportif.

Pour l’édition 2025, deux équipes relais et, pour la première fois, deux duos ont représenté la profession, tandis que trois avocats ont relevé le défi ultime : les 42,195 km en individuel.

Parmi eux, Me Julien Prandi, président de la commission du Barreau et sportif aguerri : entre audiences et entraînements, son quotidien est une course d’endurance, où rigueur professionnelle et passion sportive se répondent. Un équilibre récemment mis à l’épreuve par un accident de vélo (et une blessure à l’épaule), qui l’a contraint à un repos forcé à quelques semaines de la ligne de départ. du marathon. Comment concilier la préparation d’un marathon et les exigences d’une profession aussi prenante ? Quelles leçons tirer de cette expérience, entre résilience et dépassement de soi ? Me Prandi nous livre son témoignage !


Après une préparation réduite à cause de votre blessure à l’épaule, comment avez-vous géré la fatigue et la douleur pendant le marathon ?

 Finalement, l’épaule ne m’a pas trop dérangé durant la préparation, que j’ai débutée fin juillet. C’est plutôt l’entraînement en pleine canicule, en juillet/août, qui a été dur pour le physique : même le matin, il faisait déjà 29 °C à 7 h. Et puis, se lever aux aurores quatre fois par semaine pendant quatre mois pour aller s’entraîner, avec parfois des sorties de deux heures avant d’aller en audience ou au bureau… Sur la course elle-même, j’étais relativement confiant, car j’avais été discipliné durant la préparation. Le premier semi (les 21 premiers kilomètres) s’est très bien passé : j’étais à l’aise, c’est devenu une autre histoire au 33e kilomètre, avec le passage de la montée de Vallauris, puis la pénétrante jusqu’à Cannes, qui est un vrai toboggan. Au 37e kilomètre, je suis passé en mode survie  : tu débranches le cerveau, tu tiens ton allure sans écouter tous les signaux du corps qui te disent de t’arrêter. Puis, sur le dernier kilomètre, tu es envahi par un mélange d’émotions indescriptibles : tu pleures en même temps que tu souris et que tu ris, un vrai shoot d’adrénaline. Enfin, la libération au 42,2e kilomètre, où tu relâches tout et t’écroules littéralement, mais avec la satisfaction de t’être dépassé et de l’avoir fait !

Me Prandi en bleu, ici sur les remparts à la sortie d’Antibes. Le plus dur reste encore à venir ! ©DR

En tant que triathlète et cycliste, vous avez l’habitude des efforts longs, mais le marathon reste une discipline à part. Comment avez-vous adapté votre stratégie de course ?

 L’entraînement n’a pas forcément été moins dur : j’ai démarré tard, fin juillet à cause de l’épaule, mais ensuite, ce furent quatre mois d’entraînement intenses, avec quatre sorties par semaine plus une sortie vélo pour l’endurance. En revanche, la pratique de sports d’endurance avec des efforts longs a été un vrai avantage, car je savais déjà gérer mon effort et ma nutrition en course. En juillet, je sortais de l’Étape du Tour (132 km / 4 600 m de dénivelé positif), où l’épreuve avait duré 7 h 30 : j’étais donc confiant sur ces paramètres. Pour l’allure, je visais moins de 4 heures, ce qui signifiait tenir entre 5 min 30 s et 5 min 45 s au kilomètre. Je me suis donc entraîné sur une base de 5 min 20 s/km, et j’ai réussi à maintenir une allure entre 5 min 25 s et 5 min 35 s sur les 42,2 km. Résultat : 3h52 à l’arrivée pour mon premier marathon, contrat rempli ! Je dois avouer que j’ai été motivé par un ami coureur, Alexis Riboulet, qui m’a accompagné sur le parcours pour me pacer (meneur d’allure). Son record étant de 2h58, c’était un footing du dimanche pour lui, mais mentalement, c’est un vrai soutien d’avoir quelqu’un à ses côtés dans les moments difficiles.

Votre blessure à l’épaule a forcément impacté votre préparation. Est-ce que cela vous a aussi appris quelque chose sur vous-même ?

 Ça t’apprend surtout que le mental contrôle tout, et que tu reviens toujours plus fort ! C’est une question d’état d’esprit : tu as le choix entre pester et t’apitoyer, ou t’adapter, surmonter cette difficulté et atteindre tes objectifs. Comme pour un dossier, tu te défends ou tu subis ; personnellement, j’ai la défense dans la peau, alors le choix était vite fait. Vingt jours après l’opération, je me suis inscrit en salle pour faire du home-trainer ; début juin, je remontais sur un vélo et partais faire un stage en altitude dans les Alpes sur un week-end. Et le 29 juin, je participais au 70.3 de Nice en relais, où j’ai réalisé mon meilleur temps sur trois ans sur la partie vélo.L’équipe du Barreau a terminé 1ère au classement relais : il n’y a pas de meilleure récompense. Pour la suite, l’objectif est le Half-Ironman de Nice en juin 2026, que je n’ai pas pu faire les deux dernières années à cause de blessures. Cet hiver sera consacré à la récupération, puis à partir de mars, ce sera entraînement six jours sur sept.

En tant qu’avocat comment percevez-vous le regard de votre entourage (collègues, clients, proches) sur cette performance ? Est-ce que ce marathon a aussi une dimension symbolique pour vous, au-delà du sport ?

 Pour les clients, ils ne sont pas forcément au courant de tout cela : je veille à ce que cette pratique sportive n’impacte pas mon activité professionnelle. Mais pour ceux qui le savent, je reçois toujours un petit mot d’encouragement. Quant à mes confrères, certains me disent que je suis fou, qu’ils sont épuisés rien qu’à suivre mes sorties, mais ils ont toujours une approche bienveillante et soutenante. J’ai la chance d’être président de la Commission Sport d’un Barreau qui compte de nombreux athlètes :Camille Dire, multi-finisher de triathlon XL ; Nourdine El Attachi, coureur incroyable ; Cindy Marafico, qui a participé aux mondiaux d’Hyrox à Chicago en juin 2025 ; et tant d’autres. Nous avons même deux confrères qui viennent de faire le marathon de New York, Cécile Schwal et Olivier Romani. Je tiens à remercier tous les confrères qui participent activement toute l’année à la promotion du sport au sein du Barreau, ainsi que l’Ordre, qui nous soutient sans faille : sans eux, il n’y aurait aucun événement sportif professionnel. Pour la dimension symbolique, je voulais rendre hommage à un ami qui nous a quittés tragiquement en septembre. Il était mon inspiration sportive, alors cette course, je la lui dédie.

Défis relevés pour touts les participants ©DR

Si vous deviez résumer cette expérience en une image ou une métaphore, ce serait quoi ?

 J’emprunterais plutôt les mots d’Emil Zátopek, champion olympique : « Si tu veux courir, cours un kilomètre. Si tu veux changer ta vie, cours un marathon. »

Photo de Une : Finisher en 3h52 ! ©DR